Chers camarades,
On compte dans cette salle de grands absents ! Les 800 000 sympathisants qui, à l’issue des Primaires, avaient souhaité travailler avec nous ! Quelle place leur faisons-nous dans ce Congrès ? Pourquoi les avoir réduit au rôle de spectateurs, eux qui ont été à l’automne les premiers acteurs du changement ?
Question d’autant plus pressante que nos militants eux-mêmes se demandent s’ils ne seront pas, à leur tour, exclus du débat. N’a-t-on pas cherché ces derniers jours à limiter les possibilités d’expression que leur offrent, bien timidement pourtant, nos procédures et nos statuts?
Car au fond, quel est l'enjeu de ce Congrès ? Et de quoi a-t-on peur ?
J'avoue qu'à lire ou écouter les uns et les autres, je finis par m'interroger ! S'agit-il de nous doter d'un leader ? Ce serait oublier que cette question a été réglée avec les Primaires ! De débattre de notre ligne politique ? Notre projet a été arrêté voici moins d'un an et à l'unanimité ! S'agirait-il alors de discuter des premières orientations de ce gouvernement ? Ce serait un peu tard ! Ou des critiques à lui adresser ? Ce serait, avouons-le, un peu tôt !
Dès lors, la seule véritable question qui vaille n’est-elle pas celle que nous avons posée : quel rôle devons-nous faire jouer à notre parti dans cette période nouvelle ? Et quelles transformations lui apporter pour y réussir ?
Y répondrons-nous en nous livrant au « petit jeu » des « petits arrangements » dont certains ont fait une science quasi-exacte ? Ou en poursuivant avec entêtement le processus engagé lors des Primaires ?
Nous avons aujourd’hui à faire à deux types de contributions. Celles qui constituent en quelque sorte un rappel à l’ordre. Ce qui peut se comprendre, au nom de l’unité et du rassemblement , mais avec le risque de vider le débat de son sens et de frustrer une fois de plus les socialistes d’un véritable échange. Et puis celles qui sont un « appel à projet » et qui, tout en faisant le choix de la raison, veulent préserver la part de l’innovation et font le choix aussi de la liberté et de l’imagination. Notre contribution se veut par conséquent la voix des militants, des sympathisants, qui se réjouissent de nos succès, veulent soutenir le Président et le Gouvernement. Mais veulent aussi participer au changement et concrétiser au sein du PS les formidables promesses contenues par le succès des Primaires. Notre ambition, à Toulouse, doit être de donner aux Français certes l’image d’un parti rassemblé, mais plus encore celui d’un parti tourné résolument vers eux pour les écouter, les accueillir, les associer !
Or, s’il existe une crise économique et financière, auquel le Gouvernement doit faire face, notre démocratie traverse aussi une crise profonde, que notre parti a pour devoir d’affronter. Nous vivons sur un modèle politique qui s’est construit à la fin du XIXème siècle. Les socialistes y ont d’ailleurs largement pris leur part. Mais n’est-il pas temps de passer à autre chose ? De renouveler la forme de nos partis ? D’inventer d’autres méthodes de participation et de délibération, un peu à l’instar de ce que Daniel Cohn-Bendit avait intelligemment mis en débat voici quelques années autour de l’idée de coopérative ?
L'enjeu doit être de rapprocher la politique de ceux qu'elle concerne ! Et pour cela de repolitiser la société !
Pour nous, recréer de la confiance se fera par l'exemplarité de nos comportements. Regonfler notre démocratie, par la qualité et la collégialité de nos débats. Mobiliser l'opinion, par notre ouverture sur la société.
Mais d'où vient que tant reste à faire ? N'est-ce pas aux causes qu'il convient maintenant de s'attaquer ? C’est-à-dire au poids excessif et ubuesque des courants ! Qu'il faut réduire pour réduire les rentes de situation. Aux pratiques de cooptation qui nous privent du choix de nos dirigeants. C’est pourquoi nous voulons rétablir le libre choix du premier secrétaire par les militants. Et même aller encore plus loin avec la mise en place, à tous les niveaux, d’une Co-direction, paritaire, tournée vers la jeunesse ! Aux luttes d’influence qui pourrissent la vie de nos Fédérations. C’est pourquoi nous proposons un Congrès exemplaire ! Dont les résultats ne puissent souffrir aucune contestation. Nous demandons avec force, qu’à l’instar des Primaires, une haute Autorité soit mise en place, s’il devait y avoir plusieurs motions, pour garantir les résultats dans toutes les fédérations. La suspicion qui règne encore dans trop de nos sections n’illustre-t-elle pas, par l’absurde, la nécessité de transformer radicalement nos méthodes de fonctionnement ?
Au total, si notre contribution se veut celle de nos militants de base, et de nos sympathisants, c’est parce qu’elle en appelle au respect. Respect dû à nos adhérents, qui doivent pouvoir se prononcer librement et en toute sincérité. Respect dû à nos sympathisants qui doivent se voir proposer de nouvelles formes de collaboration. Respect dû à nos élus, dont l’influence dans nos instances devra dépendre du travail effectué plus que des amitiés entretenues. Respect dû à nos idées, dont on devra pouvoir débattre sans préjugé, sans caricature, et sans captation par des groupes constitués. Respect dû à nos concitoyens, qui doit nous protéger de l'esprit de caste. Celui qui finit par couper les dirigeants des militants puis des citoyens. Qui transforme un mandat en rente. Le pouvoir en arrogance. L'expertise en suffisance.
Chers camarades,
La démocratie pour exister doit être constamment réinventée. Celle que nous pratiquons entre nous doit être le modèle, la préfiguration de celle que nous voulons pour la République tout entière. Parce que nous sommes les dépositaires d'une histoire ; parce que nous sommes les héritiers d'un parti qui a fait rentrer le prolétariat, puis les femmes, dans la République, nous devons bousculer les habitudes pour nous porter à l’avant-garde.
Ce serait un beau Congrès que celui qui serait tout entier consacré à cette grande et belle question de l’innovation démocratique.
Un Congrès qui ne ressemblerait à aucun de ceux qui l’ont précédé !
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