« Laissons les citoyens se faire une opinion »
Gaëtan Gorce était hier l’invité de l’émission « Face aux chrétiens » animée par Dominique Gerbaud. Il répondait aux questions de Louis Daufresne (Radio Notre-Dame), Véronique de La Maisonneuve (RCF) et Bernard Gorce ( La Croix ).
Pourquoi ne pas avoir pris position pour un candidat de la primaire ?
Gaëtan Gorce : Parce que je n’en voyais pas l’intérêt. À partir du moment où on a choisi de faire appel aux citoyens, ils n’ont pas besoin qu’on leur donne des consignes comme cela se fait dans un congrès socialiste. Ce serait même contradictoire. Je trouve préférable de laisser les citoyens se faire leur opinion en écoutant les candidats, plutôt que d’interposer l’avis de notables ou dirigeants du parti. Le PS fonctionne avec des courants dont la justification me semble de plus en plus discutable. Avec cette primaire, l’occasion est donnée de passer par-dessus la tête des courants. J’ai soutenu les primaires pour que ce ne soient pas ces vieilles et mauvaises habitudes qui s’imposent, mais le souffle frais de la démocratie.
Pourquoi avoir choisi de vous faire élire au Sénat ?
G. G. : Je suis déçu d’avoir dû abandonner ma circonscription de député du fait d’un redécoupage électoral. Mais en même temps, après quatorze années passées à l’Assemblée, où je pense avoir gagné le respect de mes pairs par le travail accompli, je n’ai aucun regret. Pour être franc, j’éprouve un peu d’irritation par rapport à ce que le débat politique, y compris à gauche, devient. Quand je vois l’état de crise profonde que traversent la société et le monde, le manque de courage des politiques me déçoit. Dire cela m’a valu d’être mis un peu au ban du parti, mais j’y ai trouvé une liberté de parole pour dénoncer la dérive d’une politique égocentrique, médiatisée et théâtrale.
La réforme du Sénat s’impose-t-elle ?
G. G. : Il faut faire preuve de discrétion quand on arrive au Sénat. On m’a déjà fait comprendre que, malgré toute mon expérience à l’Assemblée, je repars à zéro ! Plaisanterie à part, on voit bien qu’il faut apporter à notre assemblée plus de transparence dans les rémunérations, lutter contre les conflits d’intérêts, rénover les modes de fonct i o n n e m e nt p ou r é v i t e r l e s polémiques politiques permanentes. Et la réforme clé sera celle du mode de scrutin. J’ai été élu par 430 grands électeurs au premier tour. C’est à peu près avec le même nombre qu’on élisait les députés sous la monarchie de Juillet ! Il faut élargir le corps électoral de manière plus importante.
Pourquoi voulez-vous relancer le débat sur la fin de vie ?
G.G. : Il faut profiter de la présidentielle pour sensibiliser sur cet enjeu et identifier les vraies questions. Non pas pour attiser les positions entre les pour et les contre l’euthanasie, car le débat doit être tout sauf manichéen. Nous sommes sur un sujet où la diversité des situations prime et où la réponse ne peut pas être unique. Chaque fois que la personne malade peut demander une aide à la fin de vie, la question se pose en des termes différents. C’est pour cette raison que j’ai toujours eu une grande réserve par rapport au droit de mourir. Philosophiquement, l’idée que la société aide à mourir ne me dérange pas. Ce qui me gêne, c’est que cette aide se transforme en droit opposable qui ne tienne plus compte de situations spécifiques. Quand on parle de droit à mourir, que fait-on de toutes les personnes qui commencent à être atteintes par la sénilité ? Peut-on imaginer une société qui élimine ceux qui commencent à succomber à la démence ?
« Philosophiquement, l’idée que la société aide à mourir ne me dérange pas. Ce qui me gêne, c’est que cette aide se transforme en droit opposable. »
(1) Auteur de L’avenir d’une idée, une histoire du socialisme, Fayard, 300 p., 22 €.
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