Rapport enregistré le 18 novembre 2004
Doit-on légiférer sur la fin de vie ? Peut-on légiférer sur la fin de vie ? Pour nombre de théologiens, de professionnels de santé et de juristes, l'exercice serait vain, hasardeux et terriblement complexe au regard de l'extrême diversité des situations susceptibles d'être appréhendées. Pour d'autres observateurs, en étant transposées au cas français, les législations hollandaise et belge, qui ont fait le choix de la dépénalisation de l'euthanasie, constitueraient des réponses appropriées aux interrogations de la société sur la fin de vie. Plus que tout autre sujet, une telle question aux enjeux philosophiques, religieux, éthiques, juridiques, sociaux et médicaux exige réflexion, maturation et consensus. Elle ne peut se réduire à un débat binaire enfermant le législateur dans une seule alternative : la défense du statu quo ou l'adoption d'une législation sur l'euthanasie.
A l'issue des 81 auditions auxquelles elle a procédé, de ses déplacements en Belgique, aux Pays-Bas et dans une unité de soins palliatifs, des échanges qui ont nourri sa réflexion pendant huit mois, la Mission d'information sur l'accompagnement de la fin de vie s'est attachée à identifier les attentes de notre société et à proposer des réponses à celles-ci, adaptées à nos valeurs, à notre système juridique et à nos pratiques médicales(2).
Il est apparu que si les malades refusent naturellement la douleur, la souffrance et la déchéance, ils récusent en même temps l'acharnement thérapeutique et redoutent le risque d'une décision médicale, qui pourrait parfois être clandestine et susceptible d'être prise à leur insu. S'ils sont opposés à toute euthanasie et à tout acharnement thérapeutique, les professionnels de santé, quant à eux, revendiquent une clarification de termes employés le plus souvent très confusément et aspirent à une plus grande sécurité juridique.
La conjugaison de deux impératifs a convaincu les membres de la mission d'information de la nécessité de légiférer sur ces questions, qui à la fois touchent au plus profond de l'être et constituent indiscutablement, avec l'allongement de l'espérance de vie, un problème de santé publique appelé à s'accentuer.
Le premier impératif est de respecter la dignité du patient, en tenant compte de sa volonté, lorsqu'il est en état de l'exprimer, en l'accompagnant par des soins palliatifs et psychologiques dont le développement doit être encouragé.
Le deuxième impératif consiste à conférer un ancrage législatif aux conditions de limitation ou d'arrêt de traitement, qui n'ont été encadrées jusqu'à présent que par les bonnes pratiques de sociétés savantes telles celles des médecins réanimateurs qui arrêtent chaque année entre 75 000 et 100 000 appareils de réanimation. A cet effet, il convient d'éviter de laisser le juge arbitrer le flou juridique entourant la définition des droits des malades et des obligations professionnelles des médecins, sachant qu'un contentieux de plus en plus abondant pèse sur l'exercice de la profession médicale et sur son attractivité.
Or, dans la mesure où elle affecte soit directement, soit indirectement les droits fondamentaux des malades, la satisfaction de ces impératifs ne peut être assurée que par la loi.
Après avoir écarté toute dépénalisation de l'euthanasie sur le modèle des législations néerlandaise et belge, tout en ne s'accommodant pas pour autant du statu quo, la mission d'information a présenté une proposition de loi relative aux droits des malades et à la fin de vie (n° 1766). Le dispositif figurant à l'origine dans ce texte a été remanié ensuite à la marge ; ces modifications ont été prises en compte dans la proposition de loi n° 1822, qui a été renvoyée à la commission spéciale.
Reflet du consensus qui a animé depuis l'origine les travaux de la mission d'information, ce texte, adopté à l'unanimité de ses membres, contient pour l'essentiel trois séries de dispositions, qui complètent le code de la santé publique :
- Les actes médicaux ne devraient pas être poursuivis par une obstination déraisonnable, lorsqu'il n'existe aucun espoir réel d'obtenir une amélioration de l'état de la personne et que ces actes entraînent une prolongation artificielle de la vie ;
- Les droits des malades seraient renforcés par la définition des procédures de limitation ou d'arrêt de traitement et par l'obligation faite aux médecins de recourir, en pareille situation, aux soins palliatifs ;
Si, à l'origine, la mission d'information n'avait pour vocation que de traiter des malades en fin de vie, il est rapidement apparu qu'elle ne pouvait se pencher exclusivement sur ces patients et ignorer en même temps les droits des personnes qui ne sont pas en fin de vie. Formellement le dispositif proposé sur les droits des patients s'insère dans les articles du code de la santé publique issus de la loi n° 2002-303 du 4 mars 2002 relative aux droits du malade et à la qualité du système de santé. Aussi régit-il d'abord la situation des malades qui ne sont pas en fin de vie avant de définir, dans une nouvelle section, les droits des malades en fin de vie. Au surplus, la proposition de loi appréhende les situations de ces deux catégories de patients, en envisageant précisément chaque fois, l'hypothèse où ils sont conscients et celle où ils ne le sont pas.
_ Le cas du patient en fin de vie
S'il est en fin de vie, conscient et qu'il décide de limiter ou d'arrêter tout traitement, deux obligations s'imposent au médecin : d'une part, respecter la volonté du patient après l'avoir informé des conséquences de son choix, la décision du malade devant être inscrite dans son dossier médical ; d'autre part, sauvegarder la dignité du mourant et assurer la qualité de sa fin de vie en dispensant des soins palliatifs.
S'il est en fin de vie et inconscient, plusieurs droits lui sont reconnus, obéissant à un double souci de collégialité dans la concertation et de transparence dans la décision médicale :
- s'il a antérieurement désigné une personne de confiance dans les conditions prévues par l'article L. 1111-6 du code de la santé publique, l'avis de cette dernière, sauf urgence ou impossibilité, prévaut sur tout autre avis non médical, dans les décisions d'investigation, d'intervention ou de traitement prises par le médecin ;
- il peut rédiger des directives anticipées pour le cas où il serait un jour hors d'état d'exprimer sa volonté. Celles-ci indiquent les souhaits relatifs à sa fin de vie concernant notamment les conditions de la limitation ou de l'arrêt de traitement. Elles sont révocables à tout moment. Sous réserve qu'elles aient été établies moins de trois ans avant l'état d'inconscience de la personne, le médecin en tient compte pour toute décision d'investigation, d'intervention ou de traitement concernant cette même personne ;
- le médecin peut décider de limiter ou d'arrêter un traitement inutile ou impuissant à améliorer l'état du malade, après avoir respecté la procédure collégiale définie par voie réglementaire et consulté la personne de confiance, la famille et, le cas échéant, les directives anticipées de la personne. Il sauvegarde la dignité du mourant et assure la qualité de sa fin de vie en dispensant les soins palliatifs.
Dans son exposé des motifs, la proposition de loi suggère que cette définition réglementaire de la procédure collégiale revienne au code de déontologie médicale.
_ Le cas du patient qui n'est pas en fin de vie
S'il n'est pas en fin de vie et est conscient et si sa volonté de refuser ou d'interrompre son traitement met sa vie en danger, le médecin doit tout mettre en œuvre pour le convaincre d'accepter les soins indispensables, aux termes de l'article L. 1111-4 du code de la santé publique. La proposition de loi précise ces dispositions. Le médecin peut faire appel à un autre membre du corps médical et, après un délai raisonnable, le malade doit réitérer sa décision. Celle-ci est inscrite dans son dossier médical. En autorisant le malade conscient à refuser tout traitement, le dispositif admet le droit au refus à l'alimentation artificielle.
S'il n'est pas en fin de vie et est inconscient, l'arrêt ou la limitation de traitement susceptible de mettre sa vie en danger ne peut être réalisé sans que la procédure collégiale définie par voie réglementaire ait été respectée et sans que la personne de confiance ou la famille ou à défaut un de ses proches ait été consulté.
Si elles sont adoptées, ces dispositions ne seraient pas sans conséquences à la fois sociales et juridiques.
Reconnaître de nouveaux droits aux malades grâce à ces règles relatives à la limitation ou à l'arrêt de traitement, grâce aux directives anticipées et à la personne de confiance, c'est permettre à toute personne d'assumer sa fin de vie plus sereinement et c'est par là même, l'aider à mieux préparer sa mort.
Exiger également plus de transparence et plus de collégialité de la part des médecins dans les procédures de limitation ou d'arrêt de traitement, c'est conforter le corps médical dans ses bonnes pratiques. C'est exposer à des sanctions pénales les médecins qui s'affranchiraient de ces obligations et, à l'inverse, c'est exonérer de responsabilité pénale les médecins qui y satisferaient, conformément à l'article 122-4 du code pénal. C'est, par là même, contribuer à renouveler et à enrichir cette relation fondamentale de confiance entre le patient, sa famille et le médecin, qui doit rester au cœur de notre société.
- Enfin, les obligations palliatives des établissements de santé devraient recevoir une concrétisation plus effective.
Aujourd'hui, l'article L. 1110-9 du code de la santé publique reconnaît à chaque malade le droit d'accéder à des soins palliatifs. Afin que les efforts engagés sur ce terrain puissent, non seulement se poursuivre mais être propres à diffuser une véritable culture palliative, il serait suggéré d'inscrire dans la loi l'obligation de créer des lits identifiés de soins palliatifs et d'imposer des référents en soins palliatifs dans chaque grand service, confronté à des malades en fin de vie (cancérologie, gérontologie...) et assurant une importante activité palliative. Cette obligation devrait figurer dans les dispositions relatives aux contrats pluriannuels conclus par les agences régionales d'hospitalisation avec les établissements de santé publics et privés et dans celles afférentes aux projets d'établissement de ces établissements de santé.
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Le double objectif de renforcement des droits du malade et de développement de la culture des soins palliatifs auquel tend cette proposition de loi, participe en réalité d'une seule et même démarche. Ces deux orientations sont animées par la même volonté de permettre à chacun de donner un sens à sa fin de vie et de l'aider à affronter le dernier passage.
Si, en effet, la confrontation avec l'échéance ultime est davantage anticipée et préparée, si l'obstination déraisonnable se voit strictement encadrée et si la consultation de l'entourage du mourant devient une obligation, cet instant pourra peut-être alors être à la fois mieux vécu et plus accepté.
La reléguant souvent à une simple abstraction, la société aujourd'hui refoule la mort. Puisse cette proposition de réforme du code de la santé publique, élaborée consensuellement et qui n'a d'autre ambition que de codifier de bonnes pratiques, contribuer à modifier le regard de notre société sur la mort.
La commission spéciale a examiné, sur le rapport de M. Jean Leonetti, la proposition de loi relative aux droits des malades et à la fin de vie n° 1882 au cours de sa séance du mercredi 17 novembre 2004.
Le président a émis le vœu que la sérénité qui avait présidé aux travaux de la mission d'information prévale à nouveau dans les débats de la commission. Il a fait valoir que celle-ci était saisie d'une proposition de loi résultant des travaux approfondis de la mission d'information, laquelle pouvait s'honorer d'avoir élaboré, non pas un texte de compromis mais un dispositif juridique à la fois équilibré et novateur.
Il a souhaité cependant que les travaux de la commission permettent d'améliorer la proposition de loi, en adoptant notamment des amendements présentés par le rapporteur, afin de rendre encore plus explicites les choix de la mission d'information. Il a considéré que ceux-ci poursuivaient plusieurs objectifs : instaurer un droit non à faire mourir mais à laisser mourir ; respecter en toutes circonstances l'autonomie du malade en écartant les solutions juridiques générales et impératives ; réaliser enfin un travail de pédagogie en direction de l'opinion publique. Relevant avec satisfaction que la proposition de loi n'avait paru heurter aucune conscience, il a estimé que ce texte n'avait pas la prétention de tout régler et devait être perçu comme une étape.
Le rapporteur a d'abord précisé que la proposition de loi avait été élaborée par la mission d'information au terme de 81 auditions et que, après 8 nouvelles auditions conduites par la commission, il lui était apparu nécessaire de présenter quelques amendements.
Il a rappelé que dans une société qui valorise avant tout la vitesse, la jeunesse, l'efficacité et la rentabilité, la mort était niée, voire volée aux individus et aux familles et que la préoccupation de la mission d'information avait été de replacer les valeurs d'humanité au centre du débat. Il a fait valoir que les droits en présence figuraient parmi les plus fondamentaux, à savoir d'un côté, la liberté et l'autonomie de la vie humaine et de l'autre, le respect de la personne.
Abordant les conséquences de la médicalisation de la société, il a observé que les demandes d'euthanasie étaient, en réalité, bien souvent liées à la peur de la souffrance et de la déchéance et que la confiance dans la médecine, qui en l'espace d'un demi-siècle avait su allonger de dix ans l'espérance de vie, avait pour contrepartie la crainte d'un acharnement thérapeutique déraisonnable. Ayant souligné qu'en réponse à ce défi, la mission d'information avait tenu à faire de la transparence une composante déterminante du dialogue entre le médecin et le malade et qu'elle avait entendu codifier les pratiques des médecins tout à la fois fidèles à leur éthique et respectueux de la liberté du malade, il en a déduit que la proposition de loi était un texte essentiellement motivé par le souci de respecter la dignité et la liberté des malades et des médecins.
A la question : faut-il légiférer ? il a rappelé que deux réponses avaient été proposées au cours des auditions de la mission d'information : la nécessité de conserver le statu quo, d'une part, la dépénalisation de l'euthanasie, d'autre part, M. Henri Caillavet, président d'honneur de l'Association pour le droit à mourir dans la dignité, reconnaissant lui-même au demeurant l'extrême difficulté juridique de la rédaction de cette dernière option.
Le rapporteur a constaté qu'en refusant ces deux possibilités, la mission d'information avait fait le choix d'une troisième voie qui, tournée vers la reconnaissance de droits aux malades, débouchait sur une modification de la loi du 4 mars 2002 sur les droits des malades.
S'agissant des malades en fin de vie conscients, il a précisé que la proposition de loi prenait en compte la volonté du malade de limiter ou d'arrêter tout traitement, tout en imposant au médecin d'informer le patient des conséquences de son choix.
S'agissant des malades en fin de vie inconscients, il a indiqué que l'introduction des directives anticipées, la reconnaissance du rôle de la personne de confiance et de la famille, ainsi que l'obligation du respect du principe de la collégialité par les médecins, traduisaient la volonté du législateur de conférer de nouveaux droits au malade.
Il a signalé que les problèmes les plus difficiles étaient soulevés par les personnes conscientes n'étant pas en fin de vie, qui demandaient l'arrêt d'un traitement, cet arrêt entraînant inéluctablement leur mort. Considérant que la loi actuelle était insuffisante et floue sur ce point, dès lors qu'il incombait au médecin de convaincre le patient d'accepter tous les traitements indispensables, il a fait remarquer que pour parvenir à une législation équilibrée, la proposition de loi introduisait la notion de délai raisonnable, afin que la demande par le malade d'un refus de traitement ne reçoive pas une réponse immédiate mais laisse place à un dialogue. Il a indiqué qu'en outre, elle prévoyait l'intervention d'un autre médecin, la collégialité favorisant de la sorte un travail de discussion avec le malade et une réflexion plus approfondie. Il a ajouté, qu'en prévoyant ainsi un temps raisonnable de réflexion pour la réitération de la demande du malade et l'intervention d'un second médecin, cette nouvelle législation traçait la voie de la résolution de cas aussi douloureux que celui de M. Vincent Humbert. Il a précisé que ce dispositif tirait les conséquences de deux décisions juridictionnelles : d'une part, l'arrêt sur les « témoins de Jéhovah », par lequel le Conseil d'Etat a jugé qu'un acte thérapeutique, pratiqué en urgence, indispensable à la survie du malade et proportionné à son état était conforme à la loi ; d'autre part, une jurisprudence britannique, qui a admis qu'une malade tétraplégique sous alimentation artificielle était en droit de refuser cette alimentation, considérée comme un traitement médical. Ayant rapproché de ces nouveaux droits des malades le dispositif de l'article 1er sur l'obstination déraisonnable, il l'a justifié, en mettant en exergue la nécessité de définir et d'interdire l'« obstination déraisonnable », notion plus précise que celle d'« acharnement thérapeutique » et bien connue des médecins, puisqu'elle figure déjà dans leur code de déontologie.
Avant de conclure sa présentation, il a souhaité insister sur l'un de ses amendements, dont l'utilité n'est apparue qu'après les auditions réalisées par la commission: celui portant sur le « double effet », c'est-à-dire sur l'administration de doses calmantes à des malades en fin de vie en vue d'apaiser leurs douleurs, avec le risque d'abréger leur vie. Il a précisé à ce propos que les représentants du Conseil national de l'Ordre des médecins qui avaient été entendus, avaient considéré, que si la collégialité pouvait être insérée dans le cadre du code de déontologie médicale, la question du « double effet » ne pouvait y être traitée car elle relève de diverses dispositions figurant déjà dans ce code, telles que l'information du malade, l'effet secondaire des médicaments ou la lutte contre la souffrance. Faute d'obtenir dudit Conseil une mention spécifique concernant les malades en fin de vie, dans l'article 38 du code de déontologie médicale, le rapporteur a préconisé, afin d'éviter des situations d'hypocrisie, de traiter cette question par voie d'amendement. Celui-ci aurait pour conséquence de rendre licite l'administration d'un traitement destiné à soulager la douleur, au risque d'abréger la vie, à la double condition d'assurer une totale transparence à l'égard de la famille et de recourir à une procédure écrite, établissant que le traitement a été donné en toute connaissance de cause. Cet amendement serait destiné à éviter d'un côté, les euthanasies masquées par l'utilisation de morphines à dose volontairement mortelle et d'un autre côté, les traitements anti-douleur insuffisants pour calmer la souffrance sous prétexte du risque vital potentiel encouru.
Mme Catherine Génisson s'est réjouie que la question importante de la transparence des actes touchant à l'accompagnement des personnes en fin de vie soit mieux garantie par la proposition de loi. Elle a estimé que le texte devrait non seulement permettre de répondre aux demandes d'une fin de vie digne mais devrait également mettre fin aux carences de l'accompagnement de la fin de vie, qui sont souvent la cause de décès prématurés.
M. Pierre-Louis Fagniez a considéré que la définition du « double effet » renforçait aussi bien la sécurité juridique des médecins que l'autonomie des patients. Il a fait valoir que le texte de l'amendement proposé excluait, a contrario, l'emploi de produits, tels que le chlorure de potassium et le curare, qui ont pour seul effet de provoquer une mort très douloureuse.
Mme Paulette Guinchard-Kunstler a souligné qu'en définissant le « double effet » et en consacrant l'information de la personne de confiance, l'amendement du rapporteur conférait une grande portée à la proposition de loi. Elle a déclaré qu'en suscitant une réflexion autour de la fin de vie, ce dispositif devrait également avoir pour mérite d'assurer un véritable changement des pratiques dans les établissements d'hébergement de personnes âgées dépendantes. Après avoir exprimé le voeu que le dispositif de l'article premier ne se limite pas à l'arrêt des traitements et que la future loi s'applique aussi aux établissements médico-sociaux, elle a conclu son propos, en considérant que le législateur dans l'avenir serait amené à aller plus loin mais que la proposition de loi comportait des avancées réelles.
Tout en souscrivant à la dernière remarque de Mme Paulette Guinchard-Kunstler, Mme Martine Billard a souhaité que le problème de l'alimentation artificielle soit clarifié lors du débat en séance publique, afin d'éviter le développement de contentieux à ce sujet. Elle a ensuite jugé que la question de la fin de vie se poserait probablement à nouveau dans quelques années, en raison tant des progrès de la médecine que du vieillissement de la population et de l'augmentation du nombre des accidents de la route.
S'il a approuvé l'idée de formaliser le « double effet » d'un traitement, M. Patrick Delnatte a émis des réserves sur les dispositions de l'amendement relatives à l'obligation d'en informer le patient, soulignant que ce dernier n'était pas toujours conscient.
M. Jean-Marc Nesme a insisté sur la nécessité de ne pas confondre l'objectif du traitement à « double effet », c'est-à-dire le soulagement de la douleur, avec sa conséquence seulement éventuelle, qui est la mort du patient.
En réponse à M. François Dosé, qui l'interrogeait sur les différentes solutions jurisprudentielles des juridictions françaises et étrangères sur le refus de traitement, le rapporteur a apporté les précisions suivantes :
- Dans l'arrêt Diane Pretty, la Cour européenne des droits de l'homme a approuvé le refus de la Chambre des Lords d'autoriser le mari de Mme Pretty à lui donner la mort, considérant qu'il n'existait ni un droit à la mort équivalent au droit à la vie ni une liberté de recevoir la mort ;
- En revanche, dans l'espèce Mme B., évoquée précédemment, le juge britannique a estimé que le refus du médecin d'enlever une sonde gastrique était injustifié, au motif que l'alimentation artificielle constituait un traitement et pouvait par conséquent être refusée par le patient ;
- En ce qui concerne plus particulièrement les témoins de Jéhovah, le Conseil d'Etat a jugé licite une transfusion sanguine effectuée en urgence sur un homme jeune, estimant que le devoir de protéger la vie pouvait dans ce contexte prévaloir sur la volonté du malade.
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La commission spéciale a examiné les articles de la présente proposition de loi au cours de sa séance du mercredi 17 novembre 2004.
(article L. 1110-5 du code de la santé publique)
Interdiction et définition de l'obstination déraisonnable
L'article L. 1110-5 du code de la santé publique reconnaît à chaque personne le droit, compte tenu de son état de santé et de l'urgence des interventions que celui-ci requiert, de recevoir les soins les plus appropriés et de bénéficier de thérapeutiques efficaces. Les actes de prévention, d'investigation ou de soins ne doivent pas lui faire courir de risques disproportionnés par rapport au bénéfice escompté.
L'article premier de la proposition de loi tend à compléter cet article, en posant le principe selon lequel ces actes médicaux ne doivent pas être poursuivis par une obstination déraisonnable et en définissant les cas dans lesquels cette dernière doit être proscrite : lorsqu'il n'existe aucun espoir d'obtenir une amélioration de l'état de santé de la personne et lorsqu'ils entraînent une prolongation artificielle de la vie.
Placé en tête de la proposition de loi, ce principe doit être interprété comme étant commun aux dispositions qui vont suivre et qui déclinent les procédures applicables à la personne, qu'elle soit ou non en fin de vie.
Poser ce principe revient à répondre à trois questions : Comment définir l'obstination déraisonnable ? Pourquoi faut-il prohiber l'obstination déraisonnable ? Pourquoi faut-il inscrire cette interdiction dans la loi ?
_ Comment définir l'obstination déraisonnable ?
Lorsqu'une notion fondamentale ne peut être appréhendée précisément, tant elle est affaire d'espèce, de frontière aux fondements fragiles et instables et d'appréciation individuelle, praticiens et juristes préfèrent ne pas s'enfermer dans les carcans d'une définition rigoureuse mais par trop rigide. Qualifiée hier d'acharnement thérapeutique, l'obstination déraisonnable fait partie de ces termes que l'on ne se risque pas à définir en quelques mots.
Pour la désigner, les textes internationaux de bioéthique recourent aux critères de proportionnalité et de justification de traitement. En disposant qu'« en toutes circonstances, le médecin doit s'efforcer de soulager les souffrances de son malade, l'assiste moralement et évite toute obstination déraisonnable dans les investigations et la thérapeutique », l'article 37 du code de déontologie médicale cerne les contours de cette notion, tout en se gardant de la définir. C'est le commentaire de cet article qui décrit le mieux l'équilibre auquel est tenu le médecin. Celui-ci doit se garder de deux écueils : l'erreur par défaut, dans le cas où la pathologie est curable et où le médecin renonce trop tôt aux soins et l'erreur par excès, qui l'amène à imposer au malade des investigations invasives, sans visée thérapeutique et des soins douloureux, difficiles à supporter pour le patient, afin de prolonger sa vie de quelques jours dans des souffrances supplémentaires inutiles.
En proposant de reformuler le libellé de l'article 37 à la suite des travaux de la Mission d'information sur l'accompagnement de la fin de vie, le Conseil national de l'Ordre des médecins, lors de sa session extraordinaire du 22 juillet 2004, a précisé encore davantage les cas où l'obstination déraisonnable devrait être évitée : « En toutes circonstances, le médecin doit s'efforcer de soulager les souffrances du malade, les traiter par des moyens proportionnés à son état et l'assister moralement. Il doit éviter toute obstination déraisonnable dans les investigations ou la thérapeutique et peut se limiter aux seuls soins palliatifs lorsque la synthèse des éléments cliniques et para cliniques montre que poursuivre les soins ou en entreprendre d'autres ne peut plus bénéficier au malade et aurait pour seule conséquence de le maintenir artificiellement en vie ».
_ Pourquoi faut-il prohiber l'obstination déraisonnable ?
Comme l'ont montré sans équivoque les travaux de la mission d'information, l'obstination déraisonnable est contestée aussi bien par la société et les théologiens que par les professions de santé.
Identifiée à la poursuite de traitements inutiles et associée par une population vieillissante à l'image de la déchéance, l'obstination déraisonnable est refusée par nos concitoyens. La crainte de se voir intubé, attaché, soumis à des traitements dont la justification est douteuse, est non seulement très vive mais nourrit en même temps des courants de pensée qui, au nom de la dignité humaine, réclament la dépénalisation de l'euthanasie.
Les églises monothéistes, quant à elles, ne défendent nullement la cause de l'acharnement thérapeutique (3). L'obstination déraisonnable est condamnée par la voix d'un éthicien qui fait autorité en la matière, le père Patrick Verspieren. En invoquant les deux critères de l'inutilité médicale et de la disproportion, il justifie ainsi l'abstention ou l'interruption de traitements : « Est inutile et doit donc être arrêté le traitement qui n'apporte aucun bénéfice au malade, surtout quand il crée douleur et inconfort ; celui dont le bénéfice est disproportionné par rapport aux effets nocifs qu'il va entraîner ou celui qui n'a pour but que de contrecarrer la mort en créant des conditions très difficiles de survie. Dans ces hypothèses, l'arrêt du traitement est consécutif au constat par le médecin de son impuissance et de la nécessité de laisser la mort accomplir son œuvre, au contraire de l'euthanasie qui précipite la mort sans que, le plus souvent, d'autres solutions aient été recherchées (4) ».
Ce refus de l'acharnement thérapeutique est partagé enfin par les professionnels de santé, comme ont pu s'en convaincre les membres de la mission d'information. Ces professionnels reconnaissent en effet, que lorsque le malade a atteint le terme de sa vie et que toute obstination deviendrait pour lui plus source d'inconfort que synonyme d'amélioration de son état, cette obstination serait déraisonnable et n'aurait pas de sens. Mais lorsqu'ils prescrivent une analgésie morphinique, une sédation ou un arrêt de traitement, les médecins redoutent d'être à la merci de poursuites pénales pour non-assistance à personne en danger ou de faire l'objet de poursuites disciplinaires pour méconnaissance du devoir général d'assistance et de soins aux malades. Or, cette insécurité juridique n'est pas neutre, lorsque l'on estime que les décisions de limitation ou d'arrêt de traitement touchent annuellement entre 75 000 et 100 000 personnes dans les services de réanimation et lorsque l'on voit nos concitoyens gagnés par la tentation procédurière à l'anglo-saxonne.
_ Pourquoi faut-il inscrire cette interdiction dans la loi ?
Dans la mesure où, en étant sensible aux propositions de la mission d'information, le Conseil national de l'Ordre des médecins a renouvelé sa réflexion sur l'obstination déraisonnable en proposant de reformuler l'article 37, d'aucuns pourraient se contenter de cette étape. Cependant, outre l'argument de la force symbolique qui s'attache par nature à la loi, la consécration par celle-ci de dispositions proscrivant l'obstination déraisonnable obéit à des considérations juridiques fortes. Définir les cas dans lesquels la poursuite de l'obstination devient déraisonnable, c'est en effet toucher aux droits des malades et à une liberté fondamentale, qui ressortissent à la compétence du législateur. C'est au demeurant inscrire cette démarche dans celle que le législateur a engagée avec la loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé et conférer une plus grande sécurité juridique à la relation de confiance entre le malade et le médecin.
Pour l'ensemble de ces raisons, la rédaction de l'article premier, d'une part, pose le principe que les actes médicaux ne doivent pas être poursuivis par une obstination déraisonnable et, d'autre part, définit celle-ci, en ayant recours aux critères d'inutilité médicale et de disproportion. Sont par exemple inutiles des examens tels que des prélèvements sanguins ou des thérapeutiques comme ces chimiothérapies renouvelées, alors que l'on sait pertinemment qu'aucun traitement n'améliorera l'état de santé du malade.
En faisant ce choix dans la loi, le législateur devrait encourager le passage d'une logique curative à une logique palliative et le développement de cette dernière. Il devrait également priver d'arguments ceux qui, au nom de la stigmatisation de l'obstination déraisonnable, revendiquent un droit à l'euthanasie, qui ne répond pas à l'ensemble des problèmes de la fin de vie dans notre société.
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La commission a examiné un amendement du rapporteur interdisant, d'une part, l'obstination déraisonnable et définissant, d'autre part, les cas où le médecin peut suspendre ou ne pas engager les actes de prévention, d'investigation ou de soins, lorsque les traitements apparaissent inutiles, disproportionnés ou n'ayant d'autre effet que le seul maintien artificiel de la vie.
M. Jean Leonetti, rapporteur, a souligné que la préoccupation exprimée par Mme Nicole Questiaux lors de son audition devant la commission, de toujours peser l'a contrario d'une proposition devait être prise en compte pour l'élaboration des conclusions de la commission à l'article premier. Il a fait valoir que cet amendement était en effet destiné à bien montrer que tout ce qui pourrait être tenté ne doit pas obligatoirement l'être et qu'un traitement dont le bénéfice est médiocre par rapport à sa lourdeur pour le malade ne doit pas être envisagé. Il a précisé qu'entraient également dans le champ de l'obstination déraisonnable, les traitements qui n'ont pour effet que de maintenir le patient en vie de manière artificielle, alors qu'il est dans une situation qui ne laisse aucun espoir. Il a relevé qu'a contrario, il était clair que des traitements de suppléance vitale comme la dialyse rénale ne devaient pas être considérés comme n'ayant comme seul effet que le maintien artificiel de la vie. Il a rappelé qu'en outre dans la situation visée par l'article premier, l'obligation d'accompagner le patient par des soins palliatifs devait toujours peser sur le médecin.
Mme Muriel Marland-Militello a souhaité que la personne chargée de prendre la décision médicale soit davantage précisée.
Devant la multiplicité des personnes susceptibles d'intervenir auprès d'un malade, notamment les spécialistes, M. Olivier Jardé s'est interrogé sur l'opportunité de prévoir qu'un médecin puisse disposer d'une voix prépondérante.
Le rapporteur a répondu que :
- la définition de la responsabilité médicale figurait aux articles 4 et 8 de la proposition de loi et qu'en aucun cas la collégialité ne devait se traduire par un vote à bulletins secrets aboutissant à imposer au médecin une décision avec laquelle il ne serait pas d'accord et qui le contraindrait à opposer sa clause de conscience. Le médecin doit conserver, in fine, la responsabilité de la décision ;
- si la détermination des responsabilités des médecins doit être précisée par le code de déontologie médicale, il existe toujours au demeurant, un médecin référent pouvant être considéré comme « compétent et responsable ».
La commission a adopté l'amendement du rapporteur.
La commission a adopté l'article premier ainsi modifié.
Article additionnel après l'article 1er
(article L. 1110-5 du code de la santé publique)
Traitements anti-douleur administrés au malade en fin de vie
La commission a examiné un amendement du rapporteur visant à compléter le dernier alinéa de l'article L. 1110-5 du code de la santé publique afin d'encadrer la pratique dite du « double effet ».
Le rapporteur a rappelé qu'il arrivait que la souffrance ne puisse être soulagée que par un traitement anti-douleur pouvant abréger la vie. Après avoir indiqué qu'administrés à certaines doses et compte tenu des spécificités et fragilités physiologiques des personnes en fin de vie, certains traitements anti-douleur pouvaient effectivement avoir cet effet secondaire, il a fait valoir que ce dispositif n'était appelé à s'appliquer qu'aux personnes en fin de vie, définies comme étant en phase avancée ou terminale d'une affection grave et incurable, quelle qu'en soit la cause, à savoir tant les personnes atteintes d'une maladie que les victimes d'un accident. Si l'amendement impose au médecin qui envisage un tel traitement une obligation d'information à l'égard du malade, le rapporteur a tenu à préciser qu'il préservait dans le même temps le droit pour le malade de ne pas savoir, puisque l'article L. 1111-2 du code de la santé publique pouvait être opposé. Le rapporteur a souligné qu'en exigeant du médecin une information du malade, de la personne de confiance, de la famille ou d'un des proches, le dispositif proposé n'avait pas d'autre but que de faire échec à la clandestinité de certaines pratiques et n'imposait pas une information systématique du malade.
Mme Martine Billard a fait part de ses craintes à l'égard des éventuels désaccords entre le malade, la personne de confiance et les proches.
Rejointe par Mmes Muriel Marland-Militello et Claude Greff, Mme Catherine Génisson a indiqué partager cette objection ; elle s'est par ailleurs interrogée sur le terme de souffrance, celui de douleur lui semblant plus approprié car il englobe la notion de souffrance à la fois physique et morale.
M. Yves Bur a fait remarquer que si le malade souffrait, il était forcément conscient et que son avis était donc nécessaire. Pour autant, l'avis des proches pourrait aussi être demandé mais il ne faudrait pas que cette procédure entraîne des conflits.
M. Alain Néri a souligné combien le jugement du malade pouvait être altéré par la souffrance, ce qui justifiait une grande vigilance du législateur dans la rédaction de ce dispositif.
Répondant à Mme Catherine Génisson, le rapporteur a considéré que le terme de souffrance lui paraissait être une notion à la fois physique et morale, alors que celle de douleur avait une dimension seulement physique, l'article 37 du code de déontologie médicale faisant référence au demeurant aux « souffrances du malade ». Il a ajouté que, tout comme la souffrance physique, la souffrance morale pouvait faire l'objet d'une thérapeutique, l'objet de la sédation étant de soulager l'angoisse du malade.
Il a par ailleurs apporté des précisions sur deux points du dispositif proposé :
- Il a indiqué que cet article introduisait une hiérarchie entre les personnes informées. Si le malade est conscient, l'information et la consultation des autres personnes ne devraient être en principe d'aucune utilité sauf le cas particulier évoqué précédemment où le malade ne demande pas la vérité. On ne saurait cependant faire abstraction de l'altération de la lucidité du malade souffrant en fin de vie. Aussi dans certains cas, le médecin sera amené à informer la personne de confiance ou un proche plutôt que le malade ;
- Cette information donnée au malade doit être rapprochée du droit du malade à consentir à une thérapeutique. Au-delà de l'information, c'est l'avis du malade qui est demandé.
En réponse aux autres interventions, le rapporteur a insisté sur la possibilité pour le médecin de passer outre à une opposition de la personne de confiance ou des proches, qui serait fondée sur la valeur rédemptrice de la douleur, laquelle n'a plus cours, dans la religion catholique depuis 1516. Un médecin respectant la procédure d'information prévue pourrait donc administrer des doses proportionnées à la souffrance du malade dans ces cas.
Ayant estimé délicate son application concrète, M. Gérard Dubrac s'est interrogé sur le bien-fondé de cet article additionnel. Il lui est apparu psychologiquement inhumain d'associer le malade à une telle décision. Considérant que c'était moins le produit qui était en cause que la dose avec laquelle il était administré, il a exprimé la crainte que cet amendement ne soit interprété comme une forme d'autorisation à pratiquer des doses létales et donc l'euthanasie, ce qui dénaturerait l'esprit du texte. Jugeant que cet article risquait de poser des problèmes moraux et d'être source de contentieux, il a plaidé pour que le médecin conserve une compétence exclusive en la matière.
Le rapporteur a fait observer qu'en tout état de cause pesait sur le médecin une obligation générale d'information à laquelle il ne pouvait se dérober. Il a ajouté que ce droit à l'information devait au demeurant être satisfait avec tact et mesure car il est « des vérités crues qui transpercent les cœurs », selon les mots de M. Jacques Ricot devant la mission d'information. Si le médecin doit apprécier les degrés de la vérité en fonction de la personnalité du malade, il ne doit pas laisser celui-ci dans une ignorance coupable. La possibilité d'informer à la place du malade, la personne de confiance, la famille ou les proches permet de ne pas avoir à asséner une vérité brutale et éventuellement inhumaine. Par ailleurs, le rapporteur a défendu le dispositif proposé, en considérant qu'en permettant à des procédures d'être appliquées dans un souci de transparence et de loyauté, il devait éviter d'être confronté à deux situations extrêmes : d'une part, celle où des doses mortelles de produit sont injectées avec l'intention délibérée de donner la mort et, d'autre part, celle où le médecin, soucieux de ne pas courir de risque juridique, ne prescrira pas plus que la dose permise dans les posologies habituelles même si la douleur n'est pas calmée par cette dose.
En réponse à M. Pierre-Louis Fagniez qui a jugé utile de préciser dans l'article quelle était la mention à inscrire dans le dossier médical, celle de la décision ou celle de l'information, le rapporteur a indiqué qu'il était sous-entendu que la procédure d'information était visée et a proposé un sous-amendement visant à le prévoir expressément.
Mme Claude Greff s'est déclarée défavorable sur le fond à ces dispositions, a contesté l'opportunité de les inscrire dans la loi et s'est dite choquée par l'obligation ainsi faite au médecin d'informer le malade, même si cette information fait partie des droits des malades.
Mme Catherine Génisson a indiqué qu'elle considérait cet amendement comme fondamental pour l'équilibre du texte. Elle a fait observer que cette information donnée au malade s'inscrivait dans la dynamique du respect des droits des malades et a noté qu'à la lumière de son expérience professionnelle et tout en convenant de la nécessité pour les médecins de faire preuve de compétence pour annoncer ces décisions, les malades étaient, dans la majorité des cas, très demandeurs d'un langage de vérité. Elle a ajouté que deux arguments militaient en faveur de l'adoption de cet amendement : d'une part, il devrait éviter les situations de clandestinité dans lesquelles l'incompétence de l'équipe soignante se traduit par des actes provoquant délibérément la mort ; d'autre part, il permettrait de soulager la souffrance dans le respect de la dignité humaine.
Mme Martine Billard a insisté également sur le caractère indispensable de cet amendement, jugeant infondées les craintes d'apporter au malade une information insupportable car dans la majorité des cas, le médecin a eu l'occasion d'apprécier dans quelle mesure ce malade souhaitait une information ou non. Elle s'est prononcée pour ce dispositif, en faisant valoir qu'il avait le mérite de permettre au malade de programmer l'adieu à ses proches, afin que ce départ se fasse de la façon la plus apaisée possible.
Mme Christine Boutin a rappelé qu'au terme des travaux de la mission d'information, les membres s'étaient accordés sur un texte et avaient convenu de ne pas l'amender sur le fond. Aussi, a-t-elle déclaré comprendre que cet amendement suscite des interrogations par rapport à cet accord initial. Elle a considéré cependant que cet amendement ne dérogeait pas pour autant à l'économie générale du texte car il participait de la démarche de transparence et de vérité qui avait animé les travaux de la mission d'information et a regretté que ces dispositions n'aient pas été inscrites dans la première proposition de loi. Elle a conclu son propos, en souhaitant que cet amendement de fond soit le seul adopté, les membres de la mission d'information ayant eu à cœur tout au long de leurs travaux de préserver le consensus auquel ils étaient parvenus et de ne pas répondre aux sollicitations d'où qu'elles viennent.
En réponse à ces différentes interventions, le rapporteur a :
- mis en avant les raisons pour lesquelles cette disposition ne figurait pas dans la proposition de loi initiale. Le Conseil national de l'Ordre des médecins avait envisagé dans un premier temps la possibilité d'inscrire le « double effet » dans le code de déontologie médicale, dans le cadre de la modification des articles 37 et 38 de ce code. Il y a renoncé, non pas qu'il était opposé au principe, mais parce qu'il a estimé que ces situations sont déjà prises en compte dans plusieurs dispositions du code. Il est donc apparu nécessaire que le législateur inscrive lui-même ce principe d'une manière plus explicite que dans le cadre de ces dispositions réglementaires ;
- affirmé la nécessité absolue de tout faire pour que le mourant souffre le moins possible, en rappelant les auditions de la mission d'information, qui ont insisté sur l'inutilité de la douleur et l'urgence de sa prise en compte, surtout si elle est silencieuse. Si cette nécessité est reconnue, cet amendement s'impose comme une évidence ;
- rappelé qu'il est impossible de se soustraire à l'obligation d'information du malade dans ce domaine comme dans d'autres mais que le médecin, dans certaines circonstances de fin de vie, peut donner l'information à un tiers ;
- nié que cet amendement puisse être assimilé à une permission de pratiquer l'euthanasie. En aucun cas, l'intention du médecin ne peut être létale. A cet égard, les termes de l'amendement sont très clairs : le traitement peut avoir pour effet secondaire d'abréger la vie mais ce n'est pas l'objectif poursuivi. Aucun médecin ne percevrait cette disposition comme l'habilitant à pratiquer une euthanasie.
A l'appui de cet amendement, M. Christian Vanneste s'est félicité qu'il respecte totalement l'esprit du texte et le consensus qui a prévalu lors de la réflexion menée par la mission d'information sur ce terrain. Faisant valoir que ce consensus reposait sur un souci de transparence, sur la double nécessité de respecter la dignité du malade et de définir la responsabilité du médecin, il a souligné qu'il aurait pour mérite de mettre fin à certaines hypocrisies et à des situations d'inégalité dans la relation entre le médecin et le malade. Par ailleurs, il lui est apparu important de préciser que le médecin ne peut aller contre l'avis du malade de refuser un traitement ayant un « double effet » ; en revanche, le médecin retrouve la plénitude de sa décision au cas où ce refus émanerait de la personne de confiance ou des proches.
Ayant déclaré comprendre les inquiétudes de Mme Claude Greff sur le risque d'une information inopportune du malade, notamment en milieu hospitalier quand le patient ne connaît pas bien le médecin qui le soigne, Mme Martine Aurillac a salué, dans ces dispositions, la volonté de transparence grâce à laquelle le malade ne se verrait pas voler sa mort. Elle a ajouté toutefois que la bonne application de ces dispositions dépendra aussi de la bonté, du tact et de la délicatesse avec laquelle les médecins pratiqueront l'information des mourants ; dans cet esprit, le volet relatif à la formation des médecins aux problèmes de la fin de vie est fondamental. Tout comme Mme Christine Boutin, elle a estimé que ces dispositions ne remettaient pas en cause l'équilibre du texte mais que ce risque était réel si d'autres amendements de fond étaient adoptés.
M. Pascal Ménage s'est lui aussi fait l'écho des problèmes qui pourraient se poser en cas de désaccord de la personne de confiance avec la famille et Mme Christine Boutin a voulu également être rassurée sur ce point. Le président a souhaité que sur ces sujets sensibles, le débat parlementaire apporte des précisions.
Le rapporteur a convenu que ce dispositif aurait dû être proposé à la mission d'information. Afin de lever toute ambiguïté sur ces dispositions, il a insisté sur le fait qu'elles n'étaient applicables qu'aux cas très particuliers des personnes en fin de vie pour lesquelles, compte tenu de la fragilité de leur métabolisme, le traitement anti-douleur faisait courir un risque vital. Celui-ci doit être mis en balance avec la souffrance souvent insoutenable et doit être resitué dans un contexte où l'espérance de vie du patient est en tout état de cause très limitée. En aucun cas, l'objet de cet amendement n'est de faire mourir. Il condamne même les pratiques qui utilisent les morphiniques à dose volontairement mortelle.
Le rapporteur a confirmé par ailleurs la nécessité de délivrer l'information avec tact et mesure, selon la formule consacrée par le code de déontologie médicale. Si la personne a perdu conscience, il est évident que le problème de la douleur ne se pose pas mais si elle se trouve dans la zone grise de semi conscience ou dans l'incapacité psychologique de recevoir la vérité, l'utilité de l'information de la personne de confiance ou d'un proche doit être soulignée.
La commission a adopté l'amendement du rapporteur ainsi sous-amendé.
(article L. 1111-4 du code de la santé publique)
Droit de la personne d'interrompre ou de refuser tout traitement
L'article 2 a pour objet de préciser la portée du droit au refus de traitement garanti par l'article L. 1111-4 du code de la santé publique.
Celui-ci est issu de la loi n° 2002-303 du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé. Il s'insère dans un chapitre II intitulé « Droits et responsabilités des usagers » figurant dans un titre de la loi relatif à la « Démocratie sanitaire ».
Les trois premiers alinéas de cet article L. 1111-4 régissent respectivement l'association du malade aux décisions médicales le concernant, le droit au refus de traitement et le libre consentement.
En précisant que « toute personne prend avec le professionnel de santé et compte tenu des informations et des préconisations qu'il lui fournit, la décision concernant sa santé », le dispositif du premier alinéa de l'article institue une concertation avec le patient, en l'associant à la décision médicale.
Le deuxième alinéa rappelle la nécessité pour le médecin « de respecter la volonté de la personne après l'avoir informée des conséquences de ses choix ». Cependant, dans l'hypothèse où la « volonté de la personne de refuser ou d'interrompre un traitement met sa vie en danger, le médecin doit tout mettre en œuvre pour la convaincre d'accepter les soins indispensables. » Imposant au médecin « le grand écart » (5) selon l'image éloquente employée par le docteur Marie-Sylvie Richard devant la mission d'information, ces dispositions ont donné lieu à une jurisprudence du Conseil d'Etat rendue le 16 août 2002 à propos de transfusions sanguines à des témoins de Jéhovah, la Haute juridiction faisant s'incliner dans ce cas précis la volonté du malade devant le maintien de la vie (6).
Enfin, en vertu du troisième alinéa de cet article, « aucun acte médical ni aucun traitement ne peut être pratiqué sans le consentement libre et éclairé de la personne » et celui-ci peut être retiré à tout moment. Des dispositions similaires figurent à l'article 36 du code de déontologie médicale, celui-ci indiquant que « lorsque le malade, en état d'exprimer sa volonté, refuse les investigations ou le traitement proposé, le médecin doit respecter ce refus après avoir informé le malade de ses conséquences. »
Pour s'inscrire dans la démarche de garantie de droits au malade ouverte en 2002, l'article 2 de la proposition de loi vise à renforcer ces droits, en instituant un droit au refus à « tout » traitement, au lieu de faire seulement référence à « un » traitement, selon les termes du deuxième alinéa de l'article L. 1111-4 du code de la santé publique.
Inscrire ce droit au refus de « tout » traitement, c'est conférer un droit au refus de l'alimentation artificielle. Comme l'ont montré les travaux de la mission d'information(7), l'alimentation artificielle est en effet aujourd'hui considérée comme un traitement par des médecins, des théologiens et par plusieurs Etats membres du Conseil de l'Europe.
Pour les médecins qui se sont penchés sur ce problème difficile, il s'agit en effet d'un élément du maintien en vie, donc d'un traitement dont on devrait savoir respecter la demande d'arrêt, tout en poursuivant les soins palliatifs. L'alimentation ne peut être mise en place sans que le malade en soit informé.
Pour des éthiciens comme le père Patrick Verspieren, « on n'a pas à nourrir - les soignants parlent de gaver - quelqu'un contre sa volonté. »
Enfin, le Chef du service de la bioéthique du Conseil de l'Europe, M. Carlos de Sola, a conforté ce point de vue, en rappelant devant la mission d'information, que dans certains Etats membres de l'organisation européenne, l'alimentation artificielle était considérée comme un traitement(8). Il en est ainsi notamment en Allemagne, en Angleterre et dans le Pays de Galles (9). Par ailleurs dans un arrêt Cruzan v. Missouri Department of Health du 25 juin 1990, la Cour suprême des Etats-Unis a considéré qu'un malade dans un état végétatif persistant avait un droit constitutionnel au retrait de la nutrition artificielle, le patient pouvant la refuser au même titre que n'importe quel traitement médical, si sa volonté peut être établie sans ambiguïté (10)
Si le droit au refus de l'alimentation artificielle doit désormais être reconnu, en revanche, l'hydratation artificielle dont l'arrêt est générateur de souffrance, elle, ne saurait être arrêtée.
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La commission a adopté l'article 2, sans modification.
(article L. 1111-4 du code de la santé publique)
Procédure de refus de traitement applicable à la personne consciente qui n'est pas en fin de vie
Comme on l'a vu à l'article précédent, l'article L. 1111-4 du code de la santé publique, issu de la loi du 4 mars 2002, précise les droits du malade dans ses trois premiers alinéas. Il associe celui-ci à la décision du professionnel de santé ; il lui reconnaît, sous certaines conditions, un droit au refus de traitement et consacre un droit au libre consentement du traitement.
Ce droit au refus de traitement doit toutefois se concilier avec l'obligation de traitement imposée au médecin. En effet, « si la volonté de la personne de refuser ou d'interrompre un traitement met sa vie en danger, le médecin doit tout mettre en œuvre pour la convaincre d'accepter les soins indispensables. »
Ces exigences apparemment contradictoires et, d'évidence, d'application malaisée ont dû être interprétées par le juge administratif, à l'occasion de transfusions pratiquées sur des témoins de Jéhovah, comme on l'a vu à l'article précédent. Analysant devant les membres de la mission d'information l'ordonnance rendue sur ce sujet le 16 août 2002 par le Conseil d'Etat statuant en tant que juge des référés, M. Renaud Denoix de Saint Marc, Vice-président du Conseil d'Etat, a fait valoir que « la thérapeutique salvatrice devait être proportionnée à l'état du patient »(11). En d'autres termes, pour être conforme à la loi, l'acte thérapeutique doit être indispensable à la survie du patient et proportionné à son état.
Loin de remettre en cause ce droit au refus de traitement du malade conscient, même s'il ne peut être évalué qu'au cas par cas, le dispositif suggéré à l'article 3 vise à l'expliciter. A cet effet, il a pour objet de l'entourer de garanties procédurales, dans le double intérêt bien compris du malade et du médecin. C'est en effet parce que ce droit est défini aujourd'hui de manière trop abstraite, que sa concrétisation au regard d'un traitement nécessaire à la survie du malade ne peut être arbitrée en réalité que par le juge. Entourer ce droit de garanties procédurales, c'est donc en faciliter l'expression. De fait, en distinguant nettement les demandes fortement motivées des malades de celles qui sont moins fondées, le médecin pourra accéder à une demande de refus de traitement. A cette fin, la procédure proposée par le dispositif de l'article 3 de la proposition de loi apporte une triple garantie :
- d'abord, au vu de la demande de refus de traitement du malade, le médecin pourra faire appel à un autre membre du corps médical permettant éventuellement de renouer un dialogue avec le malade afin de le convaincre.
- ensuite, que le premier médecin ait ou non recouru à cet autre membre du corps médical, le malade devra réitérer sa décision après un délai raisonnable. Celui-ci devra permettre au malade de prendre la mesure des conséquences de sa décision, pour lui-même et pour ses proches, grâce notamment aux informations fournies par le corps médical. Si le malade met à profit ce délai pour réitérer sa décision, il apportera la démonstration de la force et de la stabilité de sa volonté et de sa décision. Quant au corps médical, il pourra de son côté, pendant ce laps de temps, mieux appréhender la nature de la demande du patient et ses motivations.
Cette procédure devrait permettre de répondre aux demandes de malades conscients, qui n'aspirent pas à être maintenus en vie par le seul biais de traitements de suppléance vitale ou qui se refusent à subir des traitements invasifs. En tout état de cause, cette obligation de réitérer le refus de tout traitement dans un délai raisonnable laissera aux médecins la possibilité de pratiquer un acte médical dans des situations d'urgence où un patient pourrait être sauvé par un acte thérapeutique approprié.
- Enfin, la décision du malade conscient sera inscrite dans son dossier médical, afin de conserver la preuve de la réalité de sa volonté, ce qui devrait mettre l'interruption de traitement à l'abri de tout contentieux éventuel. Le dossier médical visé par la présente proposition de loi est celui qu'en application de l'article L. 1112-2 du code de la santé publique, les établissements de santé public et privé ont l'obligation de constituer pour chaque patient hospitalisé. Sur la liste des éléments contenus obligatoirement dans ce dossier, figure notamment « le consentement écrit du patient pour les situations où ce consentement est requis sous cette forme par voie légale ou réglementaire ». De la même façon, la mention de la décision de refus de traitement devra y être ajoutée.
Est également visé le dossier médical que les médecins dans le cadre d'un exercice libéral doivent tenir pour chacun de leurs patients, en application des articles 45 et 73 du code de déontologie médicale.
Il est à noter que le dossier médical est appelé à évoluer à la fois dans sa forme et dans son rôle, avec la mise en place du dossier médical personnel prévu par l'article 2 de la loi n° 2004-810 du 13 août 2004 relatif à l'assurance maladie, le dossier médical personnel informatisé répondant au souci de développer les réseaux de santé (12).
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La commission a examiné trois amendements ayant pour objet de modifier la procédure qui devrait préalablement être suivie par le médecin avant de satisfaire la demande de refus de traitement d'un malade conscient qui n'est pas en fin de vie :
- deux de Mme Henriette Martinez, l'un précisant que le médecin a l'obligation et non pas la possibilité de faire appel à un autre médecin et l'autre, fixant la durée du délai raisonnable à un mois ;
- un de M. Christian Philip supprimant la condition d'un délai raisonnable.
Mme Martine Billard a souhaité obtenir des précisions sur le rôle du médecin appelé par le médecin traitant et s'est interrogée sur les raisons pour lesquelles son intervention était facultative. Elle a ensuite justifié la nécessité d'enserrer la durée du délai de réflexion du malade dans des limites, afin d'éviter d'éventuelles contestations de familiers ou de proches sur le respect de ce délai.
Considérant que cette procédure devait être placée dans le contexte du colloque singulier entre le médecin et le malade, M. Patrick Delnatte a affirmé que la consultation d'un second médecin ne devait pas constituer une obligation, au risque d'être un facteur de rigidité.
Le rapporteur a souligné que l'institution d'un délai raisonnable tendait à permettre de sortir du dilemme qu'impose au médecin l'actuelle rédaction du deuxième alinéa de l'article L. 1111-4 du code de la santé publique, à savoir observer la volonté du malade d'arrêter le traitement mais en même temps mettre tout en œuvre pour le convaincre de l'accepter.
Il a observé que l'appel à un second médecin se justifiait lorsque le médecin considère que, même si ses efforts de persuasion sont restés vains et, si le lien de confiance avec le malade n'a pas été établi ou s'est rompu, ce malade pourrait entendre les arguments d'un autre médecin et accepter de revenir sur sa décision.
Ayant fait valoir que l'amendement supprimant le délai raisonnable correspondait à un retour au droit en vigueur et que l'amendement fixant une durée à ce délai ignorait la diversité des situations individuelles et ne prenait pas en considération le caractère réversible ou non d'un traitement, le rapporteur s'est déclaré défavorable à ces deux amendements et s'en est remis à la sagesse de la commission pour le troisième amendement rendant obligatoire la consultation d'un second médecin·
La commission a rejeté les trois amendements
Le président s'est ensuite interrogé sur le point de savoir si les dispositions précédemment adoptées, relatives à la possibilité d'administrer des traitements anti-douleur à « double effet », s'appliquaient au malade visé par l'article 3, c'est-à-dire au patient conscient qui n'est pas en fin de vie et qui refuse un traitement dont l'arrêt met sa vie en danger.
Mme Nadine Morano s'est à son tour inquiétée des conséquences pour la personne qui n'est pas en fin de vie, d'un arrêt de traitement. Souhaitant qu'il soit précisé que ce dernier peut correspondre à l'arrêt d'une alimentation entérale, elle s'est demandée dans quelles conditions, un traitement anti-douleur, éventuellement à « double effet », ne pourrait pas être administré au patient dont la sonde entérale aurait été retirée.
Répondant à ces interventions, le rapporteur a observé que :
- l'article 2 visant « tout » traitement, comprend de facto l'alimentation artificielle, ce qui devra, toutefois, être réaffirmé avec force au cours du débat parlementaire ;
- l'autorisation de l'administration d'un traitement anti-douleur susceptible d'avoir pour effet secondaire d'entraîner la mort d'une personne qui ne serait pas en fin de vie, pourrait à juste titre être considérée comme l'institution d'une euthanasie déguisée. Ayant rappelé que c'est parce qu'il est en fin de vie, qu'un malade est plus sensible aux effets d'un traitement, il a précisé que le « double effet » d'un traitement serait plus important chez un tel sujet et qu'il pourrait raccourcir une vie qui arrive à son terme ; il a donc jugé hasardeux de permettre d'abréger une vie qui n'est pas sur le point de s'achever ;
- lorsqu'un malade, en demandant l'arrêt d'un traitement, met sa vie en danger, il s'agit surtout, d'un point de vue médical, de régler des problèmes de défaillance vitale plutôt que de traiter une souffrance telle qu'elle ne puisse être combattue que par des traitements à « double effet » ;
- il faut accompagner cette personne ayant arrêté son traitement, par une mise en place de soins palliatifs dont l'efficacité à soulager la souffrance d'un patient n'est plus à démontrer.
Le président a, dès lors, souhaité présenter un amendement oral afin d'étendre l'obligation de dispenser des soins palliatifs, édictée aux articles 5 et 8, au malade conscient qui n'est pas en fin de vie et qui refuse un traitement dont l'arrêt met sa vie en danger.
Après avoir relevé que cet amendement ne lui apparaissait pas essentiel, puisque d'une manière générale tout malade dont l'état le requiert peut accéder aux soins palliatifs, le rapporteur a observé qu'il correspondait toutefois à la logique du texte de la proposition de loi.
La commission a adopté l'amendement du président.
La commission a adopté l'article 3 ainsi modifié.
(article L. 1111-4 du code de la santé publique)
Procédure de limitation ou d'arrêt de traitement applicable à la personne inconsciente qui n'est pas en fin de vie
En l'état actuel de la science, les patients pourraient quasiment être maintenus en vie indéfiniment dans des conditions caractéristiques d'un acharnement thérapeutique, qualifié aujourd'hui d'obstination déraisonnable, comme on l'a souligné à l'article premier. Toutes les études se rejoignent en effet pour indiquer que dans notre pays, un pourcentage important de décès est consécutif à des décisions de limitation ou d'arrêt de traitement. D'après une étude LATAREA (Limitations ou arrêts des thérapeutiques actives en réanimation) réalisée sur des malades dans 120 services de réanimation pendant trois mois, 50 % des décès sont précédés d'une décision de limitation ou d'arrêt de traitement. Ces décès concernent donc chaque année 75 000 à 100 000 personnes qui, dans 95 % des cas, sont inconscientes.
L'article premier de cette proposition de loi a pour objet de refuser l'obstination déraisonnable. La limitation ou l'arrêt de traitements devenus inutiles, disproportionnés et maintenant le malade en vie dans des conditions difficiles, constituent à la fois le corollaire et la traduction concrète du refus de l'obstination déraisonnable. En la matière, le législateur se fait l'écho de la crainte de nos concitoyens de pouvoir être l'objet d'une décision clandestine, prise à leur insu dans le cas où ils seraient inconscients. Dans ces situations où l'autonomie du malade ne peut s'exercer, le strict encadrement des décisions concernant le malade est donc un impératif absolu.
Conscientes de ces problèmes aux enjeux à la fois éthiques, médicaux et juridiques, les sociétés savantes (13) et notamment celles des réanimateurs et des urgentistes, ont défini des règles de bonne conduite. Ainsi, en juillet 2002, la Société de réanimation en langue française a adopté des recommandations intitulées « Les limitations et arrêts de thérapeutique(s) active(s) en réanimation adulte ». En juin 2003, la Société francophone de médecine d'urgence présentait de son côté une recommandation professionnelle sous le titre : «Éthique et urgence ». Ces textes obéissent à trois préoccupations :
- le respect de la collégialité ;
- la participation du patient à la décision, lorsqu'il est conscient ou dans le cas contraire, d'une personne de confiance ou de la famille ;
- la transparence.
Si le législateur ne peut que souscrire à ces recommandations, il lui appartient d'en inscrire les principes généraux dans la loi :
_ Une définition de la procédure de limitation ou d'arrêt de traitement par la loi
S'agissant d'actes qui sont susceptibles de porter atteinte à l'intégrité de la personne et de rapprocher l'échéance de la mort, le législateur ne peut laisser à la seule responsabilité des professionnels, si éclairée soit-elle, le soin de définir les conditions dans lesquelles ceux-ci peuvent agir. L'intervention du législateur est d'autant plus justifiée que même dans le cadre de ces bonnes pratiques professionnelles, les médecins ne sont pas protégés juridiquement. En effet, d'une part, en droit pénal, l'intention ne se confondant pas avec le mobile, l'acte est intentionnel, même si le mobile est louable ; d'autre part, ces recommandations n'ont ni force légale ni force réglementaire. Les limitations ou arrêts de traitement sont donc susceptibles d'être qualifiés, selon les cas, d'homicides volontaires (art. 221-1 du code pénal), d'homicides involontaires (art. 221-6) ou de non-assistance à personne en danger (art. 223-6).
_ La procédure collégiale : une nécessité
Faisant écho à une revendication de transparence exprimée tant par les malades que par les professionnels de santé, l'article 4 de la proposition de loi a pour objet de préciser qu'aucune limitation ou qu'aucun arrêt de traitement ne peut être réalisé, sans qu'ait été respectée une procédure collégiale définie par voie réglementaire.
Compte tenu des conditions très diverses d'exercice de la médecine, suivant qu'il s'agit de médecine hospitalière ou de médecine de ville, il n'est en effet pas apparu opportun au législateur d'instituer une procédure collégiale uniforme. Dans un souci d'efficacité et de cohérence avec les dispositions de l'article 37 du code de déontologie médicale, il a semblé préférable de laisser le soin au Conseil national de l'Ordre des médecins de définir cette procédure dans le code de déontologie médicale, pris par décret en Conseil d'État. La mission d'information a clairement plaidé pour ce choix dans l'exposé des motifs de la proposition de loi n° 1882.
Au surplus, le code de déontologie médicale traite d'ores et déjà des droits fondamentaux des malades. Comme on l'a vu en présentant l'article premier de la proposition de loi, le Conseil national de l'Ordre des médecins a d'ailleurs proposé de modifier l'article 37 du code de déontologie. Il considère en effet que l'évaluation de la situation médicale d'un patient, qui doit conduire à éviter toute obstination déraisonnable et se limiter aux seuls soins palliatifs, doit être « faite par le médecin en charge du patient, après concertation avec l'équipe de soins et avis spécialisé s'il y a lieu, sauf quand les circonstances le conduisent à devoir se prononcer seul. »
Cependant, tout en souhaitant renvoyer au code de déontologie médicale le soin de définir la procédure collégiale, le législateur n'entend pas abdiquer toute compétence au pouvoir réglementaire. Il a en effet le souci de voir trois exigences prises en compte par le code de déontologie médicale :
- La diversité des situations des patients
Selon que le malade sera ou non en milieu hospitalier, la réalité de la collégialité ne sera pas la même. Autant on peut envisager une discussion entre plusieurs professionnels de santé dans un cadre hospitalier, autant la collégialité sera plus difficile à réaliser si le malade est chez lui et n'est soigné que par un seul médecin. Si cette dernière hypothèse risque d'être un cas d'école lorsque le malade n'est pas en fin de vie, puisque la plupart du temps celui-ci est traité dans un établissement hospitalier, il n'en demeure pas moins que le code de déontologie médicale devra ménager des règles de collégialité spécifiques à cette situation.
- La concertation
Un des mérites des travaux de la mission d'information a été de souligner la nécessité absolue de mettre fin à la pratique des décisions médicales solitaires de limitation ou d'arrêt de traitement, voire à la possibilité de décisions clandestines. Toutes les personnes auditionnées se sont accordées sur le besoin de prendre ces décisions médicales qui renvoient leurs auteurs à leur propre mort, en concertation avec la famille du malade ou ses proches et l'équipe soignante.
Cette concertation présente trois avantages : elle participe de l'élaboration de la relation de confiance entre le malade et le médecin ; elle garantit le maximum de transparence à la procédure ; enfin en permettant l'écoute et le dialogue, elle favorise le travail de deuil ultérieur.
Dans cette concertation, plusieurs éléments peuvent être pris en considération : le pronostic médical, la pénibilité du traitement pour le malade et son entourage et l'appréciation de la volonté du malade, qui, à défaut de pouvoir être exprimée par celui-ci s'il est inconscient, est à rechercher auprès de la personne de confiance, de la famille ou de l'un de ses proches.
- L'exclusivité de la décision médicale
Tous les professionnels de santé entendus par la mission d'information ont insisté également pour que la décision finale revienne au médecin. Tant des raisons juridiques que sociales, médicales et pratiques plaident en effet pour cette solution.
Confier la décision à l'ensemble de l'équipe soignante reviendrait à diluer cette décision. Il y aurait en effet quelque paradoxe pour le législateur, à se réclamer de la transparence pour imposer de nouvelles règles de procédure et dans le même temps à disperser cette décision, qui viderait de son sens cet objectif de transparence. Comme le soulignait avec force le Doyen Beignier devant la mission d'information, il convient de bien déterminer la responsabilité de la décision : « C'est un point sur lequel le juriste est catégorique car, dans la réalité, quand il y a une dérive, on ne sait plus à qui incombe la responsabilité de la décision qui dès lors deviendrait opaque. Celle-ci étant totalement diluée par cette chaîne de transmission, on ne sait plus qui, au départ, a donné réellement l'ordre. C'est l'éternelle histoire du lampiste, mais qui probablement aujourd'hui est beaucoup plus importante que par le passé ».(14)
Parce qu'elle est très lourde à prendre, la décision finale ne saurait non plus peser sur la famille ou sur le personnel paramédical.
Par ailleurs, si jamais il était demandé au personnel infirmier et aux aides-soignants de prendre une telle décision, ils s'y refuseraient, parce qu'ils considèrent que celle-ci ne relève pas de leur domaine de compétences. A l'inverse, leur consultation doit être recherchée et leur avis pris en compte.
Enfin, le poids des considérations pratiques ne doit pas être sous-estimé. Le système de rotation des équipes en milieu hospitalier ne permet pas qu'une infirmière soit référente pour un patient déterminé. Non seulement pendant une seule journée, plusieurs membres du personnel peuvent s'occuper à tour de rôle d'un même patient mais il faut également tenir compte de la succession d'un personnel de nuit à un personnel de jour. Au surplus, moins la concertation sera prétexte à déplacer les responsabilités médicales, plus elle sera libre en amont.
Comme dans le cas du malade conscient refusant un traitement, visé à l'article 3, les médecins qui respecteraient ces procédures de transparence et de collégialité seraient exonérés de responsabilité pénale, conformément à l'article 122-4 du code pénal. En revanche, ceux qui s'affranchiraient de ces règles s'exposeraient à des poursuites pénales.
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La commission a examiné un amendement du rapporteur présentant une nouvelle rédaction de l'article 4, afin de :
- préciser que la procédure collégiale instituée par cet article sera définie par le code de déontologie médicale ;
- permettre, en coordination avec les dispositions de l'article 8, la consultation des directives anticipées ;
- prévoir, en coordination avec les dispositions de l'article 5, une inscription de la décision de limitation ou d'arrêt de traitement dans le dossier médical.
La commission a adopté l'amendement du rapporteur.
La commission a adopté l'article 4 ainsi modifié.
(article L. 1111-10 nouveau du code de la santé publique)
Procédure de limitation ou d'arrêt de traitement applicable à la personne consciente en fin de vie
Cet article est le premier des quatre articles - 5 à 8 - créés par la proposition de loi, afin de conférer des droits spécifiques à la personne en fin de vie. Cette dernière, à laquelle le législateur entend prêter une attention toute particulière est définie comme étant dans « la phase avancée ou terminale d'une affection grave et incurable quelle qu'en soit la cause. »
Ce critère s'inspire des recommandations de l'Agence nationale d'accréditation et d'évaluation en santé (ANAES) qui, dans son document « Les modalités de prise en charge de l'adulte nécessitant des soins palliatifs » (2002), définit ce dernier comme étant « atteint d'une maladie grave évolutive ou mettant en jeu le pronostic vital ou en phase avancée ou terminale. »
La rédaction retenue par les articles 5 à 8 de la proposition de loi est toutefois plus restrictive, parce qu'elle ne fait pas référence à des personnes auxquelles des soins palliatifs peuvent être prodigués mais à des personnes en fin de vie. Dès lors, les deux critères cumulatifs de « phase avancée ou terminale » et d'« affection grave ou incurable quelle qu'en soit la cause », englobent les personnes pour lesquelles, à la suite d'une maladie, d'un accident de la vie ou d'une extrême vieillesse, le pronostic vital est engagé et qui se trouvent, soit au terme plus ou moins proche de leur vie, soit dans la phase avancée mais encore consciente de leur affection grave ou incurable.
Entrées dans une période de transition entre la vie et la mort, ces personnes ne peuvent pas échapper à une mort inéluctable mais peuvent bénéficier, pour retarder sa venue, des puissantes thérapeutiques de la médecine contemporaine.
Cependant, certains patients peuvent estimer, à un moment donné, que les traitements qui leur sont administrés ne leur apportent plus aucun bénéfice, qu'ils sont devenus trop lourds à supporter et que leur poursuite conduirait à basculer dans l'obstination déraisonnable.
L'article 5 permet d'entendre cette plainte et autorise la personne en fin de vie à limiter ou à refuser des traitements qu'elle ne peut plus endurer. Pendant de l'article premier de la proposition de loi, qui condamne l'obstination déraisonnable, cet article établit un équilibre entre la vocation première du médecin de soigner et de mettre en œuvre tous les moyens dont il dispose pour faire échec à la mort et le droit de tout patient de décider de la façon dont il entend vivre ses derniers moments, de se réapproprier sa mort et de choisir de la laisser survenir naturellement.
Le respect de cet équilibre suppose que le médecin délivre à la personne une information claire sur les conséquences de la limitation ou de l'arrêt de son traitement et qu'il entame avec elle un dialogue. Ce colloque singulier serait destiné à s'assurer que la volonté du malade de limiter ou d'arrêter un traitement est réellement fondée sur un refus d'obstination déraisonnable et non pas sur un découragement moral ou physique passager, sur un sentiment d'abandon de ses proches ou de l'équipe médicale ou sur tout autre cause réversible. Le médecin et son patient s'entretiendraient sur leurs souhaits respectifs et s'entendraient ainsi sur la solution la plus apte à soulager le malade et à répondre à sa demande.
Lorsque le malade en fin de vie persiste dans sa demande, « le médecin respecte sa volonté » dans le cadre du rapport privilégié qui le lie à cette personne. A la différence de la procédure prévue par l'article 3 relatif au refus de traitement de la personne consciente qui n'est pas en fin de vie (cf. supra), ce respect de la décision de la personne consciente, informée et dont les derniers moments de lucidité et de vie sont comptés, ne nécessite aucune autre intervention extérieure. Dans un simple souci de transparence, le médecin inscrit la décision de son patient dans le dossier médical.
La limitation et l'arrêt de traitement ainsi définis sont alors un arrêt des seules thérapeutiques actives. Ils ne sauraient entraîner un arrêt des soins qui doivent être assurés à la personne, pour « soulager sa douleur, apaiser sa souffrance psychique et sauvegarder sa dignité » selon les termes mêmes de l'article L. 1110-10 du code de la santé publique définissant les soins palliatifs.
Les dispositions de l'article 5 se comprennent à la lumière du rapport de la mission d'information(15). Elles ont pour finalité de permettre à la personne consciente de refuser des traitements insupportables, alors qu'elle considère que la mort doit désormais accomplir son œuvre. Il s'agit par conséquent, d'une part, de ne plus tenter de retarder par tous les moyens l'issue fatale mais d'assurer à la personne en fin de vie l'agonie la moins douloureuse possible en respectant sa volonté et, d'autre part, de changer l'orientation des soins, en passant des soins curatifs « futiles » et « inhumains» (16) à des soins palliatifs.
La limitation et l'arrêt de traitement ne sauraient dès lors être assimilés aux deux actes qui ont pour intention première de précipiter la mort de la personne afin, en la supprimant, de supprimer sa douleur. Il ne s'agit en effet :
- ni de suicide assisté, c'est-à-dire de l'« acte par lequel une personne se donne elle-même la mort à l'aide de moyens fournis par un tiers » (17) ;
- ni d'une euthanasie, c'est-à-dire de l'« acte délibéré par lequel un tiers entraîne directement la mort d'une personne pour mettre fin à la maladie incurable et insupportable dont elle souffre » (18).
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Saisie d'un amendement de M. Christian Philip supprimant l'obligation de dispenser des soins palliatifs au malade conscient en fin de vie ayant décidé de limiter ou d'arrêter un traitement, la commission a constaté qu'il n'était pas défendu.
Elle a examiné l'amendement de Mme Henriette Martinez autorisant l'équipe médicale à adapter la sédation à l'état clinique du malade, afin que son agonie ne soit pas longue et douloureuse.
Le rapporteur, ayant estimé que cet amendement était en partie satisfait par l'adoption, après l'article premier, du nouvel article relatif à l'administration de traitements anti-douleur à « double effet », la commission a rejeté l'amendement.
La commission a adopté l'article 5, sans modification.
(article L. 1111-11 nouveau du code de la santé publique)
Créée par la loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades, la personne de confiance est une institution récente dont le statut est régi par l'article L. 1111-6 du code de la santé publique. Ce dernier prévoit qu'une personne majeure peut désigner toute personne - parent, proche, médecin traitant - afin de présenter en son nom ses préférences thérapeutiques au cas où elle ne serait plus en mesure de les exprimer. Dans cette hypothèse, l'article L. 1111-4 du code précité précise que, sauf urgence ou impossibilité, cette personne de confiance doit être consultée, lors de toute intervention ou investigation sur la personne malade inconsciente, avant même la famille de cette dernière ou l'un de ses proches.
Cette institution présente donc pour chacun un intérêt certain, puisqu'elle lui garantit que, le jour où il sera dans l'incapacité d'exprimer sa volonté, une autre personne témoignera de ses convictions personnelles et en discutera avec le médecin.
L'article 6 conforte cette orientation pour renforcer le rôle de la personne de confiance, lorsque la personne qui l'a désignée est non seulement inconsciente mais est en fin de vie, en insérant un article L. 1111-11 dans le code de la santé publique. Cette nouvelle disposition fait alors prévaloir l'avis de cette personne de confiance sur tout autre avis non médical, pour toutes « les décisions d'investigation, d'intervention ou de traitement prises par le médecin ».
Cette primauté accordée à la personne de confiance s'explique par le fait, d'une part, que si une personne entreprend par une démarche volontaire de désigner un témoin auquel elle déclare accorder sa confiance, sa volonté doit être entendue. Elle se justifie, d'autre part, par l'intérêt que représente l'existence d'un interlocuteur unique et fiable pour les équipes médicales. Celles-ci sont en effet de plus en plus confrontées à des familles recomposées dont les membres s'opposent les uns aux autres sur leur aptitude à représenter le plus fidèlement le mourant et à témoigner des vœux que lui-même aurait émis quant au choix de ses traitements(19).
Le dispositif introduit par cet article permettra peut-être de favoriser une véritable reconnaissance de la personne de confiance par nos concitoyens. On constate en effet que, depuis son introduction dans notre droit, la désignation d'une personne de confiance n'est pas encore entrée dans les mœurs. Le peu d'écho rencontré par cette formule perdure, alors même que « lors de toute hospitalisation dans un établissement de santé, il est proposé au malade »(20) de procéder à sa désignation. Sans doute, cet insuccès s'explique-t-il en grande partie par le refus général de nos contemporains d'envisager une éventuelle perte de conscience et de manière plus générale, de prendre les décisions relatives à leur fin de vie.
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La commission a examiné un amendement du rapporteur faisant figurer le dispositif sur les directives anticipées à l'article 6 de la proposition de loi, avant l'article relatif à la personne de confiance et faisant prévaloir l'avis de celle-ci sur tout autre avis non médical, à l'exclusion des directives anticipées.
La commission a adopté l'amendement du rapporteur.
La commission a adopté l'article 6 ainsi modifié.
(article L. 1111-12 nouveau du code de la santé publique)
Poursuivant dans la voie tracée par l'article précédent en faveur de la reconnaissance des manifestations de volonté qu'a exprimées le malade en fin de vie, avant de sombrer dans un état d'inconscience, cet article consacre le rôle des directives anticipées, parfois improprement qualifiées de « testament de vie ».
Ces dernières sont les instructions que donne par écrit une personne majeure et consciente, sur les conduites de limitation ou d'arrêt de traitement qu'elle souhaite voir suivre au moment de la fin de sa vie, dans le cas où elle serait incapable de s'exprimer. N'ayant qu'une valeur indicative et étant révocables à tout moment, elles doivent avoir été établies moins de trois ans avant l'état d'inconscience.
Ce délai de trois ans a été institué pour :
_ protéger les personnes dont l'ancienneté des instructions serait telle que l'on pourrait douter qu'elles souhaitent toujours les faire appliquer ;
_ prendre en considération la fragilité, évoquée très souvent devant la mission d'information (21), d'une opinion, exprimée dans l'idéal et dans l'abstrait par une personne en bonne santé et qui ne reflète plus son état d'esprit, lorsqu'elle est en phase avancée d'une maladie grave et a fortiori lorsqu'elle a conscience de sa finitude, l'être humain évoluant en fonction de son âge et de sa maladie ;
_ tenir compte du délai moyen, qui s'écoule le plus souvent entre le diagnostic de la maladie grave et incurable et la survenue des derniers moments et d'un éventuel état d'inconscience qui les précéderait.
Éclairage des volontés de la personne à l'instant où elles sont rédigées, les directives anticipées ont donc une valeur relative. Toutefois, il sera d'autant plus facile à un médecin d'en tenir compte, si leur intitulé n'est ni standardisé ni général (22). Ainsi, des invitations à « ne pas réanimer », à « ne pas mettre en place des appareils de survie artificielle », formulées par crainte d'une survie longue, douloureuse et inutile, peuvent s'avérer contraires à l'intérêt d'un patient qui, grâce à ces techniques, pourrait voir ses souffrances soulagées. Les directives anticipées seront par ailleurs considérées comme nulles et non avenues, si elles placent le médecin dans l'illégalité. Sous ces réserves, elles peuvent présenter pour le patient et pour le médecin les avantages suivants :
_ elles permettent au malade de préparer et de maîtriser sa fin de vie. Elles pourraient en effet correspondre à une véritable planification des soins, établie après une discussion approfondie avec le médecin traitant, lorsqu'une maladie grave et incurable a été diagnostiquée : en définissant, en fonction des phases de la maladie ou de ses complications, les traitements qui peuvent être mis en œuvre et ceux qui ne doivent pas être tentés (réanimation, alimentation artificielle...) ou qui doivent être interrompus, les directives anticipées, assimilées à un contrat moral passé avec le médecin, rassureraient leur auteur sur la façon dont ses derniers instants seraient susceptibles de se dérouler ;
_ pour le médecin, les directives anticipées peuvent être :
- une source utile de renseignements, puisque leur consultation lui permet de prendre en compte les choix thérapeutiques qu'avait exprimés la personne, aujourd'hui inconsciente et en fin de vie. Ce rôle d'information se révélera extrêmement important si, à la suite d'une hospitalisation, le médecin traitant ayant reçu le malade, ne connaît pas son parcours personnel et ne peut rien en apprendre, en raison de son état d'inconscience, sauf à recueillir l'avis de la famille ou de proches ;
- une justification des traitements qu'il entreprend ou qu'il abandonne, lorsqu'il se trouve confronté à un entourage, qui soit conteste ses choix thérapeutiques, soit se déchire sur les décisions à prendre pour leur proche, mourant.
En tout état de cause, il appartiendra à un décret en Conseil d'Etat de définir les conditions de validité, de confidentialité et de conservation de ces directives. S'il échoit au médecin de s'assurer de la validité de ce document, un trop grand formalisme ne saurait être exigé pour sa rédaction. Comme le suggère le rapport de la mission d'information, le dossier médical (23) paraît être l'instrument le plus adapté pour accueillir ces directives, sous réserve d'une admission en urgence dans un établissement dans lequel le patient n'aurait pas été suivi antérieurement.
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La commission a examiné un amendement du rapporteur proposant une nouvelle rédaction de cet article, afin de prendre acte du fait que le dispositif sur les directives anticipées précède celui sur la personne de confiance et afin de faire prévaloir l'avis de la personne de confiance.
Elle a ensuite examiné trois amendements déposés à l'origine à l'article 6 : un amendement de M. Christian Philip, précisant que la personne malade « est » hors d'état de s'exprimer et deux amendements identiques de M. Christian Philip et de Mme Henriette Martinez, indiquant que l'avis de la personne de confiance est pris avant toute décision médicale « envisagée » par le médecin.
La commission ayant adopté l'amendement du rapporteur, les deux amendements de M. Christian Philip et l'amendement de Mme Henriette Martinez, sont devenus sans objet.
La commission a adopté l'article 7 ainsi modifié
(article L. 1111-13 nouveau du code de la santé publique)
Procédure de limitation ou d'arrêt de traitement applicable à la personne inconsciente en fin de vie
Comme à l'article 5, le malade en fin de vie est identifié à la personne qui a atteint « la phase avancée ou terminale d'une affection grave ou incurable (24) », mais à la différence de l'article 5, il est inconscient. Cet article 8 obéit à un triple souci : éviter tout acharnement thérapeutique à l'encontre du malade, préserver ce dernier de toute décision arbitraire et protéger le médecin des conséquences d'une poursuite pénale qui serait engagée à son encontre pour avoir causé la mort d'autrui.
- En raison des progrès constants de la technologie médicale, la période terminale de la vie peut aujourd'hui être considérablement allongée, au point de devenir une interminable agonie. Les moyens techniques actuels de réanimation permettent en effet désormais de maintenir en vie quasi indéfiniment des patients qui, inconscients(25), ne peuvent pas s'y opposer. Or, les conditions de cette survie sont le plus souvent douloureuses et inutiles et constituent par ailleurs un des fondements de la revendication euthanasique de nombreux de nos concitoyens qui craignent de devoir un jour subir, sans pouvoir les contester, des intubations, des perfusions, voire des expérimentations illégales (26).
Corollaire du principe de l'interdiction déraisonnable posé par l'article premier de la proposition de loi, la possibilité donnée au médecin « de limiter ou d'arrêter un traitement inutile ou impuissant à améliorer l'état de santé » de la personne en fin de vie inconsciente permet de répondre aux nouvelles peurs que nos contemporains ont développées autour de la fin de vie (27).
En tout état de cause, la limitation ou l'arrêt du traitement entraîne les mêmes conséquences que celles qui affectent une personne en fin de vie consciente : cette limitation ou cet arrêt ne doit pas empêcher la poursuite des soins de la vie quotidienne et doit être suivi d'une mise en place de soins palliatifs.
- La décision de limitation ou d'arrêt du traitement doit être prise dans le seul intérêt du malade et doit être fondée sur la certitude du médecin qu'il deviendrait véritablement déraisonnable de s'obstiner. Elle ne doit pas être le prétexte d'une euthanasie décidée pour plusieurs raisons que l'on peut imaginer : incapacité de l'équipe médicale à soulager les souffrances du patient inconscient, lassitude face à une situation sans issue qui perdure ou enfin volonté de libérer un lit (28).
Dès lors, cette décision doit être encadrée par une procédure protégeant le patient contre une décision solitaire et arbitraire correspondant à une véritable euthanasie.
S'inspirant des recommandations de bonnes pratiques élaborées par les sociétés savantes de diverses professions de santé (29), l'article 8 exige le respect d'une procédure semblable à celle mise en place par l'article 4 de la proposition de loi : la décision du médecin ne peut être exécutée qu'à l'issue d'une procédure collégiale - dont il est précisé qu'elle doit être définie par voie réglementaire, plus précisément, par le code de déontologie médicale - et après « avoir consulté la personne de confiance » éventuellement désignée par le malade, « la famille ou l'un de ses proches et, le cas échéant, les directives anticipées ». Les commentaires dont est assortie la présentation de l'article 4 peuvent être aisément transposés à cet article, la nécessité de tenir compte des spécificités de l'exercice de la médecine de ville trouvant en particulier ici toute sa justification.
En autorisant expressément le médecin à limiter ou à arrêter le traitement du patient inconscient en fin de vie ou du patient conscient en fin de vie (dont l'accord n'est pas en droit pénal une cause d'irresponsabilité), l'article 8, tout comme les articles 3 et 5, met en place les conditions d'application de l'article L. 122-4 du code pénal, qui déclare pénalement irresponsable « la personne qui accomplit un acte prescrit ou autorisé par des dispositions législatives ou réglementaires. »
De ce fait, le médecin qui satisfera aux conditions de collégialité et d'information des proches du mourant pourra éventuellement être mis en cause, aucun texte ne pouvant empêcher qu'une enquête soit ouverte. Mais il ne sera pas poursuivi, dès lors que le juge constatera que les conditions des nouveaux articles L. 1111-10 et L. 1111-13 ayant été respectées, il était autorisé à prendre la décision contestée.
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La commission a examiné un amendement du rapporteur tendant à :
- redéfinir, en cohérence avec la nouvelle rédaction de l'article premier condamnant l'obstination déraisonnable, les traitements qui peuvent être limités ou arrêtés lorsque la personne en fin de vie est inconsciente ;
- prévoir, en cohérence avec la nouvelle rédaction de l'article 4, que la procédure collégiale doit être définie par le code de déontologie médicale ;
- ajouter, en cohérence avec les articles 3, 4 et 5, que la décision de limitation ou d'arrêt du traitement d'un malade inconscient en fin de vie doit être inscrite dans son dossier médical.
La commission a adopté l'amendement du rapporteur.
La commission a adopté l'article 8 ainsi modifié.
Section II - Expression de la volonté des malades en fin de vie
Cet article a pour objet de permettre l'identification des droits du malade en fin de vie créés par les nouveaux articles L. 1111-10 à L. 1111-13, au sein du code de la santé publique.
Pour cette raison, ces articles sont insérés dans une section intitulée « Expression de la volonté des malades en fin de vie », tandis que les articles L. 1111-1 à L. 1111-9, déjà existants et de portée générale, sont regroupés dans une nouvelle section intitulée « Principes généraux ».
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La commission a examiné un amendement formel du rapporteur, qui permet de prendre en compte la création des deux nouvelles sections insérées par les deux précédents paragraphes de cet article au chapitre premier du titre premier du livre premier du code de la santé publique.
La commission a adopté l'amendement du rapporteur.
La commission a adopté l'article 9 ainsi modifié.
(article L. 6114-2 du code de la santé publique)
Contrats pluriannuels conclus entre les agences régionales de l'hospitalisation (ARH) et les établissements de santé
Cet article modifie l'article L. 6114-2 du code de la santé publique, qui définit le contenu des contrats pluriannuels conclus entre les agences régionales de l'hospitalisation (ARH) et les établissements de santé publics ou privés. Afin de promouvoir la démarche palliative, il prévoit que lesdits contrats doivent désormais identifier à l'intérieur des établissements hospitaliers, les services « au sein desquels sont dispensés des soins palliatifs » et introduire dans chacun, des formations de référents et des lits identifiés.
Aux termes de l'article L. 1110-9 du code de la santé publique, « toute personne malade dont l'état le requiert a le droit d'accéder à des soins palliatifs et à un accompagnement. » Afin d'appliquer ce droit sur l'ensemble du territoire, les ARH élaborent obligatoirement un volet spécifique aux soins palliatifs dans les schémas régionaux d'organisation sanitaire (SROS) mais, comme le rappelait Mme Marie de Hennezel dans son rapport « Fin de vie et accompagnement », en octobre 2003, « seules 18 régions » disposaient d'un tel volet (30).
L'article 10 choisit de privilégier le développement, non pas tant de structures palliatives - unités de soins palliatifs, équipes mobiles de soins palliatifs, réseaux (31) - mais d'une culture palliative dans tous les services qui dispensent des soins palliatifs. Il s'agit nullement de créer dans chaque établissement des structures spécialisées dans les soins à apporter aux mourants ou aux personnes gravement malades. Il convient plutôt, dans tous les services de soins, de former un référent en soins palliatifs et d'identifier des lits. Chaque équipe médicale pourra ainsi dispenser des soins palliatifs, en lieu et place des soins curatifs, sans avoir besoin pour cela de transférer dans un autre service spécialisé le patient dont elle aura suivi et accompagné la maladie et qui ne souhaite souvent pas lui-même rompre le lien de confiance établi avec cette équipe (32).
D'après les informations recueillies par le rapporteur, les efforts en faveur de la diffusion d'une culture palliative devraient se traduire par la mobilisation sur trois ans par le ministère de la Santé de 65 millions d'euros. Ces crédits seraient destinés à l'application de la proposition de loi notamment à travers des actions de formation des professionnels de santé et le développement des matériels nécessaires à ces soins.
La commission a adopté l'article 10, sans modification.
(article L. 6143-2-2 nouveau du code de la santé publique)
En cohérence avec l'article 10, cet article précise le contenu du projet médical que doit définir le projet d'établissement d'un établissement public de santé visé à l'article L. 6143-2.
Il crée, au sein de ce projet médical, un volet « activité palliative des services », qui doit identifier les services de l'établissement dispensant des soins palliatifs et préciser les mesures, qui doivent être prises en ce domaine pour appliquer les dispositions du contrat pluriannuel conclu avec l'ARH.
Il convient de souligner que le projet médical sert de base au projet d'établissement, pour notamment déterminer (33) « les objectifs généraux de l'établissement dans le domaine médical et des soins infirmiers » et pour fixer, en accord avec les objectifs du schéma d'organisation sanitaire, « les moyens d'hospitalisation, de personnel et d'équipement de toute nature, dont l'établissement doit disposer pour réaliser ses objectifs. »
Il doit enfin être précisé qu'en ne visant que les établissements publics hospitaliers, l'article 11 n'écarte pas pour autant les établissements privés. En effet, les dispositions relatives aux projets d'établissement de ces derniers (articles L. 6161-6 et L. 6163-8) renvoient à celles concernant le projet d'établissement des établissements publics.
La commission a adopté l'article 11, sans modification.
Articles additionnels après l'article 11
(articles L. 311-8 et L. 313-12 du code de l'action sociale et des familles)
Soins palliatifs dans les établissements médico-sociaux
La commission a examiné deux amendements de Mme Paulette Guinchard-Kunstler créant deux articles additionnels, afin de favoriser la démarche palliative dans les établissements médico-sociaux qui, assurant l'hébergement des personnes âgées ou offrant des soins de longue durée à des personnes âgées dépendantes, dispensent des soins palliatifs. Ces amendements proposent d'inscrire une formation de référents en soins palliatifs et une création de lits identifiés dans :
- la convention pluri annuelle que doivent signer, avec le président du conseil général et l'autorité compétente de l'Etat, les établissements précités ;
- les projets d'établissement ou de service de ces mêmes établissements.
M. Yves Bur a relevé l'extrême importance de ces amendements qui montrent que l'accompagnement de la fin de vie et les soins palliatifs doivent trouver leur place dans les établissements médico-sociaux dont un grand nombre n'ont aucune notion de la culture palliative. Il s'est réjoui qu'en exerçant une certaine pression sur ces établissements, ces textes contribuent à les faire évoluer vers la culture palliative.
S'associant à ces propos, le rapporteur a confirmé que le développement des soins palliatifs ne devait pas être limité aux seuls établissements hospitaliers mais devait être encouragé dans tous les établissements dispensant des soins à des personnes en fin de vie.
Suivant l'avis favorable de son rapporteur, la commission a adopté les deux amendements de Mme Paulette Guinchard-Kunstler.
(articles 575 et 575 A du code général des impôts)
Cet article a pour objet de compenser, à due concurrence, les charges éventuelles qui résulteraient pour l'État de l'application de la présente loi, par la création d'une taxe additionnelle aux tarifs visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La commission a adopté l'article 12 sans modification.
La commission a adopté ensuite l'ensemble de la proposition de loi ainsi modifiée.
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* *
En conséquence, la Commission spéciale chargée d'examiner la proposition de loi relative aux droits des malades et à la fin de vie vous demande d'adopter la proposition de loi dans le texte ci-après.
TEXTE ADOPTÉ PAR LA COMMISSION
Proposition de loi relative aux droits des malades
et à la fin de vie
Après le premier alinéa de l'article L. 1110-5 du code de la santé publique, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Ces actes ne doivent pas être poursuivis par une obstination déraisonnable. Lorsqu'ils apparaissent inutiles, disproportionnés ou n'ayant d'autre effet que le seul maintien artificiel de la vie, ils peuvent être suspendus ou ne pas être entrepris. Dans ce cas, le médecin sauvegarde la dignité du mourant et assure la qualité de sa vie en dispensant les soins visés à l'article L. 1110-10. »
Le dernier alinéa de l'article L. 1110-5 du même code est complété par deux phrases ainsi rédigées :
« Si le médecin constate qu'il ne peut soulager la souffrance d'une personne, en phase avancée ou terminale d'une affection grave et incurable, quelle qu'en soit la cause, qu'en lui appliquant un traitement qui peut avoir pour effet secondaire d'abréger sa vie, il doit en informer le malade, sans préjudice des dispositions du quatrième alinéa de l'article L. 1111-2, la personne de confiance visée à l'article L. 1111-6, la famille ou, à défaut, un des proches. La procédure suivie est inscrite dans le dossier médical. »
Dans la deuxième phrase du deuxième alinéa de l'article L. 1111-4 du même code, les mots : « tout traitement » sont substitués aux mots : « un traitement ».
Le deuxième alinéa de l'article L. 1111-4 du même code est complété par quatre phrases ainsi rédigées :
« Il peut faire appel à un autre membre du corps médical. Dans tous les cas, le malade doit réitérer sa décision après un délai raisonnable. Celle-ci est inscrite dans son dossier médical. Le médecin sauvegarde la dignité du mourant et assure la qualité de sa fin de vie en dispensant les soins visés à l'article L. 1110-10. »
Après le quatrième alinéa de l'article L. 1111-4 du même code, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsque la personne est hors d'état d'exprimer sa volonté, la limitation ou l'arrêt de traitement susceptible de mettre sa vie en danger ne peut être réalisé sans avoir respecté la procédure collégiale définie par le code de déontologie médicale et sans que la personne de confiance prévue à l'article L. 1111-6 ou la famille ou, à défaut, un de ses proches et, le cas échéant, les directives anticipées de la personne, aient été consultés. La décision motivée de limitation ou d'arrêt de traitement est inscrite dans le dossier médical. »
Après l'article L. 1111-9 du même code, il est inséré un article L. 1111-10 ainsi rédigé :
« Art. L. 1111-10. - Lorsqu'une personne, en phase avancée ou terminale d'une affection grave et incurable, quelle qu'en soit la cause, décide de limiter ou d'arrêter tout traitement, le médecin respecte sa volonté après l'avoir informée des conséquences de son choix. La décision du malade est inscrite dans son dossier médical.
« Le médecin sauvegarde la dignité du mourant et assure la qualité de sa fin de vie en dispensant les soins visés à l'article L. 1110-10. »
Après l'article L. 1111-9 du même code, il est inséré un article L. 1111-11 ainsi rédigé :
« Art. L. 1111-11. - Toute personne majeure peut rédiger des directives anticipées pour le cas où elle serait un jour hors d'état d'exprimer sa volonté. Ces directives anticipées indiquent les souhaits de la personne relatifs à sa fin de vie concernant les conditions de la limitation ou l'arrêt de traitement. Elles sont révocables à tout moment.
« A condition qu'elles aient été établies moins de trois ans avant l'état d'inconscience de la personne, le médecin en tient compte pour toute décision d'investigation, d'intervention ou de traitement la concernant.
« Un décret en Conseil d'État définit les conditions de validité, de confidentialité et de conservation des directives anticipées. »
Après l'article L. 1111-9 du même code, il est inséré un article L. 1111-12 ainsi rédigé :
« Art. L. 1111-12. - Lorsqu'une personne, en phase avancée ou terminale d'une affection grave et incurable, quelle qu'en soit la cause et hors d'état d'exprimer sa volonté, a désigné une personne de confiance en application de l'article L. 1111-6, l'avis de cette dernière, sauf urgence ou impossibilité, prévaut sur tout autre avis non médical, à l'exclusion des directives anticipées, dans les décisions d'investigation, d'intervention ou de traitement prises par le médecin. »
Après l'article L. 1111-9 du même code, il est inséré un article L. 1111-13 ainsi rédigé :
« Art. L. 1111-13. - Lorsqu'une personne, en phase avancée ou terminale d'une affection grave et incurable, quelle qu'en soit la cause, est hors d'état d'exprimer sa volonté, le médecin peut décider de limiter ou d'arrêter un traitement inutile, disproportionné ou n'ayant d'autre objet que la seule prolongation artificielle de la vie de cette personne, après avoir respecté la procédure collégiale définie par le code de déontologie médicale et consulté la personne de confiance visée à l'article L. 1111-6, la famille ou, à défaut, un de ses proches et, le cas échéant, les directives anticipées de la personne. Sa décision, motivée, est inscrite dans le dossier médical.
« Le médecin sauvegarde la dignité du mourant et assure la qualité de sa fin de vie en dispensant les soins visés à l'article L. 1110-10. »
I. - Après l'article L. 1111-9 du même code, il est inséré l'intitulé suivant :
« Section II. - Expression de la volonté des malades en fin de vie ».
II. - En conséquence, avant l'article L. 1111-1 du même code, il est inséré l'intitulé suivant :
« Section I. - Principes généraux ».
III. - En conséquence, dans la première phrase de l'article L. 1111-9, les mots : « du présent chapitre » sont remplacés par les mots : « de la présente section. »
Après le premier alinéa de l'article L. 6114-2 du même code, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Ils identifient les services au sein desquels sont dispensés des soins palliatifs et définissent, pour chacun d'entre eux, le nombre de référents en soins palliatifs qu'il convient de former ainsi que le nombre de lits qui doivent être identifiés comme des lits de soins palliatifs. »
Après l'article L. 6143-2-1 du même code, il est inséré un article L. 6143-2-2 ainsi rédigé :
« Art. L. 6143-2-2. - Le projet médical comprend un volet « activité palliative des services ». Celui-ci identifie les services de l'établissement au sein desquels sont dispensés des soins palliatifs. Il précise les mesures qui doivent être prises en application des dispositions du contrat pluriannuel mentionné aux articles L. 6114-1 et L. 6114-2.
« Les modalités d'application du présent article sont définies par décret. »
I. - Après la première phrase de l'article L. 311-8 du code de l'action sociale et des familles, il est inséré une phrase ainsi rédigée :
« Le cas échéant, ce projet identifie les services de l'établissement ou du service social ou médico-social au sein desquels sont dispensés des soins palliatifs et précise les mesures qui doivent être prises en application des dispositions des conventions pluriannuelles visées à l'article L. 313-12. »
II. - Les modalités d'application du présent article sont définies par décret.
Le I de l'article L. 313-12 du même code est complété par une phrase ainsi rédigée :
« La convention pluriannuelle identifie, le cas échéant, les services au sein desquels sont dispensés des soins palliatifs et définit, pour chacun d'entre eux, le nombre de référents en soins palliatifs qu'il convient de former ainsi que le nombre de lits qui doivent être identifiés comme des lits de soins palliatifs. »
Les charges éventuelles qui résulteraient pour l'État de l'application de la présente loi sont compensées, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux tarifs visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
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Texte en vigueur ___ |
Texte de la proposition de loi ___ |
Conclusions de la Commission ___ |
CODE DE LA SANTÉ PUBLIQUE |
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Article 1er |
Article 1er | |
Art. L. 1110-5. - Toute personne a, compte tenu de son état de santé et de l'urgence des interventions que celui-ci requiert, le droit de recevoir les soins les plus appropriés et de bénéficier des thérapeutiques dont l'efficacité est reconnue et qui garantissent la meilleure sécurité sanitaire au regard des connaissances médicales avérées. Les actes de prévention, d'investigation ou de soins ne doivent pas, en l'état des connaissances médicales, lui faire courir de risques disproportionnés par rapport au bénéfice escompté. |
Le premier alinéa de l'article L. 1110-5 du code de la santé publique est complété par une phrase ainsi rédigée : « Ils ne doivent pas être poursuivis par une obstination déraisonnable, lorsqu'il n'existe aucun espoir d'obtenir une amélioration de l'état de santé de la personne et qu'ils entraînent une prolongation artificielle de la vie. » |
Après le premier alinéa de l'article L. 1110-5 du code de la santé publique, il est inséré un alinéa ainsi rédigé : « Ces actes ne doivent pas être poursuivis par une obstination déraisonnable. Lorsqu'ils apparaissent inutiles, disproportionnés ou n'ayant d'autre effet que le seul maintien artificiel de la vie, ils peuvent être suspendus ou ne pas être entrepris. Dans ce cas, le médecin sauvegarde la dignité du mourant et assure la qualité de sa vie en dispensant les soins visés à l'article L. 1110-10. » |
Les dispositions du premier alinéa s'appliquent sans préjudice de l'obligation de sécurité à laquelle est tenu tout fournisseur de produit de santé, ni des dispositions du titre II du livre Ier de la première partie du présent code. |
Article 2 | |
Toute personne a le droit de recevoir des soins visant à soulager sa douleur. Celle-ci doit être en toute circonstance prévenue, évaluée, prise en compte et traitée. |
Le dernier alinéa de l'article L. 1110-5 du même code est complété par deux phrases ainsi rédigées : | |
Les professionnels de santé mettent en oeuvre tous les moyens à leur disposition pour assurer à chacun une vie digne jusqu'à la mort. |
« Si le médecin constate qu'il ne peut soulager la souffrance d'une personne, en phase avancée ou terminale d'une affection grave et incurable, quelle qu'en soit la cause, qu'en lui appliquant un traitement qui peut avoir pour effet secondaire d'abréger sa vie, il doit en informer le malade, sans préjudice des dispositions du quatrième alinéa de l'article L. 1111-2, la personne de confiance visée à l'article L. 1111-6, la famille ou, à défaut, un des proches. La procédure suivie est inscrite dans le dossier médical.» | |
Art. L. 1111-4. - Toute personne prend, avec le professionnel de santé et compte tenu des informations et des préconisations qu'il lui fournit, les décisions concernant sa santé. |
Article 2 |
Article 3 |
Le médecin doit respecter la volonté de la personne après l'avoir informée des conséquences de ses choix. Si la volonté de la personne de refuser ou d'interrompre un traitement met sa vie en danger, le médecin doit tout mettre en oeuvre pour la convaincre d'accepter les soins indispensables. |
Dans la deuxième phrase du deuxième alinéa de l'article L. 1111-4 du même code, les mots « tout traitement » sont substitués aux mots : « un traitement ». |
(Sans modification) |
Article 3 |
Article 4 | |
Le deuxième alinéa de l'article L. 1111-4 précité est complété par trois phrases ainsi rédigées : « Il peut faire appel à un autre membre du corps médical. Dans tous les cas, le malade doit réitérer sa décision après un délai raisonnable. Celle-ci est inscrite dans son dossier médical. » |
... L. 1111-4 du même code est complété par quatre phrases... ...Le médecin sauvegarde la dignité du mourant et assure la qualité de sa fin de vie en dispensant les soins visés à l'article L. 1110-10.» | |
Aucun acte médical ni aucun traitement ne peut être pratiqué sans le consentement libre et éclairé de la personne et ce consentement peut être retiré à tout moment. |
Article 4 |
Article 5 |
Lorsque la personne est hors d'état d'exprimer sa volonté, aucune intervention ou investigation ne peut être réalisée, sauf urgence ou impossibilité, sans que la personne de confiance prévue à l'article L. 1111-6, ou la famille, ou à défaut, un de ses proches ait été consulté. |
Après le quatrième alinéa de l'article L. 1111-4 précité, il est inséré un alinéa ainsi rédigé : |
...L. 1111-4 du même code, il est... |
« Lorsque la personne est hors d'état d'exprimer sa volonté, l'arrêt ou la limitation de traitement susceptible de mettre sa vie en danger ne peut être réalisé sans avoir respecté la procédure collégiale définie par voie réglementaire et sans que la personne de confiance prévue à l'article L. 1111-6 ou la famille ou à défaut un de ses proches, ait été consulté. » |
...volonté, la limitation ou l'arrêt de traitement... ...définie par le code de déontologie médicale et sans que ... ... proches et, le cas échéant, les directives anticipées de la personne, aient été consultés. La décision motivée de limitation ou d'arrêt de traitement est inscrite dans le dossier médical.» | |
Le consentement du mineur ou du majeur sous tutelle doit être systématiquement recherché s'il est apte à exprimer sa volonté et à participer à la décision. Dans le cas où le refus d'un traitement par la personne titulaire de l'autorité parentale ou par le tuteur risque d'entraîner des conséquences graves pour la santé du mineur ou du majeur sous tutelle, le médecin délivre les soins indispensables. |
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L'examen d'une personne malade dans le cadre d'un enseignement clinique requiert son consentement préalable. Les étudiants qui reçoivent cet enseignement doivent être au préalable informés de la nécessité de respecter les droits des malades énoncés au présent titre. |
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Les dispositions du présent article s'appliquent sans préjudice des dispositions particulières relatives au consentement de la personne pour certaines catégories de soins ou d'interventions. |
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Article 5 |
Article 6 | |
Après l'article L. 1111-9 du même code, il est inséré un article L. 1111-10 ainsi rédigé : « Art. L. 1111-10. - Lorsqu'une personne, en phase avancée ou terminale d'une affection grave et incurable, quelle qu'en soit la cause, décide de limiter ou d'arrêter tout traitement, le médecin respecte sa volonté après l'avoir informée des conséquences de son choix. La décision du malade est inscrite dans son dossier médical. « Le médecin sauvegarde la dignité du mourant et assure la qualité de sa fin de vie en dispensant les soins visés à l'article L. 1110-10. » |
(Sans modification) | |
Article 6 |
voir article 8 | |
Article 7 |
Article 7 | |
Après l'article L. 1111-9 du même code, il est inséré un article L. 1111-12 ainsi rédigé : « Art. L. 1111-12. - Toute personne majeure peut rédiger des directives anticipées pour le cas où elle serait un jour hors d'état d'exprimer sa volonté. Ces directives anticipées indiquent les souhaits de la personne relatifs à sa fin de vie concernant les conditions de la limitation ou de l'arrêt de traitement. Elles sont révocables à tout moment. « A condition qu'elles aient été établies moins de trois ans avant l'état d'inconscience de la personne, le médecin en tient compte pour toute décision d'investigation, d'intervention ou de traitement la concernant. « Un décret en Conseil d'Etat définit les conditions de validité, de confidentialité et de conservation des directives anticipées. » |
Après l'article... L. 1111-11... « Art. L. 1111-11. - ... | |
Article 6 |
Article 8 | |
Reprise de l'article 6 de la proposition de loi ainsi modifié : | ||
Après l'article L. 1111-9 du même code, il est inséré un article L. 1111-11 ainsi rédigé : « Art. L. 1111-11. - Lorsqu'une personne, en phase avancée ou terminale d'une affection grave et incurable, quelle qu'en soit la cause et hors d'état d'exprimer sa volonté, a désigné une personne de confiance en application de l'article L. 1111-6, l'avis de cette dernière, sauf urgence ou impossibilité, prévaut sur tout autre avis non médical, dans les décisions d'investigation, d'intervention ou de traitement prises par le médecin. » |
Après l'article... L. 1111-12... « Art. L. 1111-12. - ... ... non médical, à l'exclusion des directives anticipées, dans les décisions d'investigation... | |
Article 8 |
Article 9 | |
Après l'article L. 1111-9 du même code, il est inséré un article L. 1111-13 ainsi rédigé : « Art. L. 1111-13. - Lorsqu'une personne, en phase avancée ou terminale d'une affection grave et incurable, quelle qu'en soit la cause, est hors d'état d'exprimer sa volonté, le médecin peut décider de limiter ou d'arrêter un traitement inutile ou impuissant à améliorer l'état de santé du malade, après avoir respecté la procédure collégiale définie par voie réglementaire et consulté la personne de confiance visée à l'article L. 1111-6, la famille ou à défaut un de ses proches et, le cas échéant, les directives anticipées de la personne. « Le médecin sauvegarde la dignité du mourant et assure la qualité de sa fin de vie en dispensant les soins visés à l'article L. 1110-10. » |
(Alinéa sans modification) « Art. L. 1111-13. - ...inutile, disproportionné ou n'ayant d'autre objet que la seule prolongation artificielle de la vie de cette personne, après avoir respecté la procédure collégiale définie par le code de déontologie médicale et consulté ... Sa décision, motivée, est inscrite dans le dossier médical du malade.» (Alinéa sans modification) | |
Article 9 |
Article 10 | |
I. - Après l'article L. 1111-9 du même code, il est inséré l'intitulé suivant : « Section II. - Expression de la volonté des malades en fin de vie ». II. - En conséquence, avant l'article L. 1111-1 du même code, il est inséré l'intitulé suivant : « Section I. - Principes généraux ». |
I. - (Sans modification) II. - (Sans modification) III.- En conséquence, dans la première phrase de l'article L. 1111-9, les mots «du présent chapitre» sont remplacés par les mots :« de la présente section ». | |
Art. L. 6114-1. - Les agences régionales de l'hospitalisation concluent avec les établissements de santé, les groupements de coopération sanitaire et les autres titulaires de l'autorisation mentionnée à l'article L. 6122-1 des contrats pluriannuels d'objectifs et de moyens d'une durée de cinq ans. |
||
Les contrats sont signés par le directeur de l'agence régionale et les personnes physiques et morales mentionnées à l'alinéa précédent. |
||
Ils peuvent faire l'objet d'une révision par avenant. |
||
Des organismes concourant aux soins, des professionnels de santé exerçant à titre libéral, des instituts de recherche ou des universités peuvent être appelés au contrat pour tout ou partie de ses clauses. |
||
Pour les établissements publics de santé, ces contrats sont conclus après délibération du conseil d'administration prise après avis de la commission médicale d'établissement et du comité technique d'établissement. |
||
La demande de renouvellement des contrats est déposée auprès de l'agence régionale de l'hospitalisation un an avant leur échéance. L'agence est tenue de se prononcer sur cette demande dans un délai de quatre mois à compter de sa réception. Le refus de renouvellement doit être motivé. |
||
Les contrats peuvent être résiliés ou suspendus avant leur terme par l'agence régionale de l'hospitalisation en cas de manquement grave du titulaire de l'autorisation aux dispositions législatives et réglementaires ou à ses obligations contractuelles. |
||
Les contrats fixent les éléments nécessaires à leur mise en oeuvre, le calendrier d'exécution et mentionnent les indicateurs de suivi et de résultats nécessaires à leur évaluation périodique. Le titulaire de l'autorisation adresse à l'agence régionale un rapport annuel d'étape ainsi qu'un rapport final. |
||
Sans préjudice des dispositions de l'article L. 162-22-6 du code de la sécurité sociale, les contrats déterminent les pénalités applicables aux titulaires de l'autorisation au titre des articles L. 6114-2 et L. 6114-3 en cas d'inexécution partielle ou totale des engagements dont les parties sont convenues. |
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Article 10 |
Article 11 | |
Art. L. 6114-2. - Les contrats mentionnés à l'article L. 6114-1 déterminent les orientations stratégiques des établissements, groupements de coopération sanitaire et titulaires d'autorisations sur la base des schémas d'organisation sanitaire. |
Après le premier alinéa de l'article L. 6114-2 du code de la santé publique, il est inséré un alinéa ainsi rédigé : |
...L. 6114-2 du même code... |
« Ils identifient les services au sein desquels sont dispensés des soins palliatifs et définissent, pour chacun d'entre eux, le nombre de référents en soins palliatifs qu'il convient de former ainsi que le nombre de lits qui doivent être identifiés comme des lits de soins palliatifs ». |
||
Art. L. 6143-2. - Le projet d'établissement définit, notamment sur la base du projet médical, les objectifs généraux de l'établissement dans le domaine médical et des soins infirmiers, de la recherche biomédicale, de la gestion et du système d'information. Il comprend un projet social. Ce projet, qui doit être compatible avec les objectifs du schéma d'organisation sanitaire, détermine les moyens d'hospitalisation, de personnel et d'équipement de toute nature dont l'établissement doit disposer pour réaliser ses objectifs. |
||
Le projet d'établissement est établi pour une durée maximale de cinq ans. Il peut être révisé avant ce terme. |
||
Art. L. 6143-2-1. - Le projet social définit les objectifs généraux de la politique sociale de l'établissement ainsi que les mesures permettant la réalisation de ces objectifs. Il porte notamment sur la formation, l'amélioration des conditions de travail, la gestion prévisionnelle et prospective des emplois et des qualifications et la valorisation des acquis professionnels. |
||
Le projet social est négocié par le directeur et les organisations syndicales représentatives au sein de l'établissement au sens de l'article L. 6144-4. |
||
Le comité technique d'établissement est chargé de suivre, chaque année, l'application du projet social et en établit le bilan à son terme. |
Article 11 |
Article 12 |
Après l'article L. 6143-2-1 du code précité, il est inséré un article L. 6143-2-2 ainsi rédigé : |
...du même code, il est... | |
« Art. L. 6143-2-2. - Le projet médical comprend un volet "activité palliative des services". Celui-ci identifie les services de l'établissement au sein desquels sont dispensés des soins palliatifs. Il précise les mesures qui doivent être prises en application des dispositions du contrat pluriannuel mentionné aux articles L. 6114-1 et L. 6114-2. « Les modalités d'application du présent article sont définies par décret. » |
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CODE DE L'ACTION SOCIALE |
Article 13 | |
Art. L. 311-8.- Pour chaque établissement ou service social ou médico-social, il est élaboré un projet d'établissement ou de service, qui définit ses objectifs, notamment en matière de coordination, de coopération et d'évaluation des activités et de la qualité des prestations, ainsi que ses modalités d'organisation et de fonctionnement. |
I. - Après la première phrase de l'article L. 311-8 du code de l'action sociale et des familles, il est inséré une phrase ainsi rédigée : «Le cas échéant, ce projet identifie les services de l'établissement ou du service social ou médico-social au sein desquels sont dispensés des soins palliatifs et précise les mesures qui doivent être prises en application des dispositions des conventions pluriannuelles visées à l'article L. 313-12 .» | |
Ce projet est établi pour une durée maximale de cinq ans après consultation du conseil de la vie sociale ou, le cas échéant, après mise en oeuvre d'une autre forme de participation. |
II. - Les modalités d'application du présent article sont définies par décret. | |
Art. L. 313-12. - I. - Les établissements assurant l'hébergement des personnes âgées mentionnées au 6º du I de l'article L. 312-1 du présent code et les établissements de santé dispensant des soins de longue durée visés au 2º de l'article L. 6111-2 du code de la santé publique qui accueillent un nombre de personnes âgées dépendantes dans une proportion supérieure à un seuil fixé par décret ne peuvent accueillir des personnes âgées remplissant les conditions de perte d'autonomie mentionnées à l'article L. 232-2 que s'ils ont passé avant le 31 décembre 2005, ou avant le 31 décembre 2006 pour les établissements mentionnés à l'article L. 633-1 du code de la construction et de l'habitation une convention pluriannuelle avec le président du conseil général et l'autorité compétente de l'Etat, qui respecte le cahier des charges établi par arrêté ministériel, après avis des organismes nationaux d'assurance maladie et des représentants des présidents de conseils généraux. |
Article 14 Le I de l'article L.313-12 du même code est complété par une phrase ainsi rédigée : «La convention pluriannuelle identifie, le cas échéant, les services au sein desquels sont dispensés des soins palliatifs et définit, pour chacun d'entre eux, le nombre de référents en soins palliatifs qu'il convient de former ainsi que le nombre de lits qui doivent être identifiés comme des lits de soins palliatifs.» | |
Article 12 |
Article 15 | |
Les charges éventuelles qui résulteraient pour l'Etat de l'application de la présente loi sont compensées à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux tarifs visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. |
(Sans modification) |
AMENDEMENTS NON ADOPTÉS PAR LA COMMISSION
Amendement présenté par Mme Henriette Martinez :
Au début de la première phrase du deuxième alinéa de cet article, substituer aux mots : « Il peut faire appel », les mots : « Il fait appel ».
Amendement présenté par M. Christian Philip :
A la fin de la deuxième phrase du deuxième alinéa de cet article, supprimer les mots : « après un délai raisonnable ».
Amendement présenté par Mme Henriette Martinez :
Compléter la deuxième phrase du deuxième alinéa de cet article par les mots : « qui ne peut excéder un mois ».
Amendement présenté par M. Christian Philip :
A la fin du dernier alinéa de cet article, supprimer les mots : « en dispensant les soins visés à l'article L. 1110-10 ».
Amendement présenté par Mme Henriette Martinez :
Compléter le dernier alinéa de cet article par une phrase ainsi rédigée : « L'ensemble du personnel soignant est autorisé à adapter la sédation à l'état clinique du malade pour lui éviter une agonie prolongée et douloureusement inutile. »
Amendements présentés par M. Christian Philip :
· Dans le dernier alinéa de cet article, après les mots : « quelle qu'en soit la cause », substituer au mot : « et », le mot : « est ».
· A la fin du dernier alinéa de cet article, substituer au mot : « prises », le mot : « envisagées ».
Amendement présenté par Mme Henriette Martinez :
A la fin du dernier alinéa de cet article, substituer au mot : « prises », le mot : « envisagées ».
LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES
Mardi 9 novembre 2004
Dr Régis Aubry, Président de la Société française d'accompagnement et de soins palliatifs
Dr François Stéfani, Président de la section Éthique et Déontologie, Conseil national de l'Ordre des médecins
Mme Nicole Questiaux, Ancien Ministre, membre du Comité consultatif national d'Éthique, Président de section honoraire du Conseil d'État
Dr Jean Cohen, Président de l'Association pour le droit à mourir dans la dignité (ADMD)
Mercredi 10 novembre 2004
Pr André Lienhart, Pr Louis Puybasset, Groupe Éthique de la Société française d'anesthésie et de réanimation (SFAR)
Dr Jean-Philippe Wagner, Président de l'Association « Jusqu'à la mort, accompagner la vie » (JALMAV)
Mme Bérangère Arnold, Conseillère technique du Ministre de la Santé
M. Stéphane Noël, Conseiller technique du Garde des Sceaux
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N° 1929 - Rapport sur la proposition de loi relative aux droits des malades et à la fin de vie (M.. Gaëtan Gorce, Président, M. Jean Leonetti, rapporteur)
1 La composition de cette commission figure au verso de la présente page.
2 () Rapport de l'Assemblée nationale n° 1708 fait au nom de la Mission d'information sur l'accompagnement de la fin de vie, par M. Jean Leonetti.
3 () Rapport de la mission d'information, p. 153
4 () L'interruption de traitement : réflexion éthique. Revue trimestrielle du Centre Laennec n° 4, 2003
5 () Rapport de la mission d'information, p. 245
6 () Idem, p. 246
7 () Ibidem, p. 250
8 () Rapport de la mission d'information p. 251
9 () Cité par l'étude de droit comparé du Sénat de novembre 2004 disponible sur le site internet du Sénat www.senat.fr
10 () Etude de droit comparé du Sénat de juillet 2002 disponible sur le site précité
11 () Rapport de la mission d'information, p. 247
12 () Réforme de l'assurance maladie - Le dossier médical personnel - Regards sur l'actualité, La Documentation française n° 304, octobre 2004.
13 () Rapport de la mission d'information, p. 150 et 154
14 () Rapport de la mission d'information, p. 239
15 () Rapport de la mission d'information, p. 143 et suivantes
16 () Idem
17 () Ibidem, p. 108
18 () Ibidem
19 () Rapport de la mission d'information, p.108 et 123
20 () Article L. 1111-6 du code de la santé publique
21 () Rapport de la mission d'information, p. 188 et suivantes
22 () Rapport de la mission d'information, p. 258
23 () Cf supra, le commentaire de l'article 3
24 () Cf. supra, le commentaire de l'article 5
25 () Rapport de la mission d'information, p. 50 et 154
26 () Idem, p. 52
27 () Rapport de la mission d'information, p. 83 et suivantes
28 () Idem, p. 52 et 145
29 () Ibidem, p. 150 et 155
30 () p. 46-47
31 () Rapport de la mission d'information, p. 160 et 161
32 () Idem, p. 168 et 169
33 () Article L. 6143-2 du code de la santé publique
© Assemblée nationale
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