QUESTION AU GOUVERNEMENT SUR LA DÉGRADATION DE LA SITUATION DE L'EMPLOI
M. le président. La parole est à M. Gaëtan Gorce, pour le groupe socialiste.
M. Gaëtan Gorce. Monsieur le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité, depuis plusieurs mois, la situation de l'emploi ne cesse de se dégrader. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.) La détérioration s'est encore accélérée ces dernières semaines. (Exclamations sur les mêmes bancs.)
J'ai sous les yeux la liste des plans sociaux annoncés depuis septembre dernier,...
M. Jean Marsaudon. Grâce à vous !
M. Gaëtan Gorce. ... dont le Gouvernement auquel vous appartenez porte donc toute la responsabilité. (Protestations sur les mêmes bancs.)
Dans un tel contexte, l'obsession de tout gouvernement devrait être de tout faire pour soutenir l'emploi et lutter contre le chômage...
M. Thierry Mariani. Mais ce n'est pas ce que vous avez fait !
M. Gaëtan Gorce. Nous avons pourtant le sentiment que votre obsession est, au contraire, de tout faire pour remettre en cause et supprimer les outils de la politique de l'emploi mis en place au cours des cinq dernières années. J'en veux pour preuve votre décision, annoncée récemment, de suspendre, pour ne pas dire supprimer, des dizaines de dispositions de la loi de modernisation sociale, contre l'avis d'ailleurs des partenaires sociaux.
M. Dominique Dord. Et c'est très bien ainsi !
M. Gaëtan Gorce. Comment ne pas voir qu'en supprimant des dispositions qui visent, pour l'essentiel, à informer, associer, consulter les salariés préalablement aux plans sociaux, vous encouragez les licenciements et vous allumez les incendies que votre « Monsieur plans sociaux » aura bien de la peine à éteindre lorsqu'il sera en fonction ? Au moment où la liste des plans sociaux s'allonge, comment pouvez-vous justifier une telle attitude ? Pourquoi cet acharnement à vouloir remplacer des « emplois Jospin » par des « chômeurs Raffarin » ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste. - Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
Le plus grave, au fond, n'est pas tant de remettre en cause des dispositions législatives qui vous gênent que de ne les remplacer par rien. Que penser d'un capitaine qui, au plus fort de la tempête, jetterait par-dessus bord tous les instruments de la politique de l'emploi censés protéger les salariés ? (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
M. Louis Giscard d'Estaing. Et les temps de parole !
M. Gaëtan Gorce. Je ne peux pas imaginer, monsieur le ministre, que vous n'ayez pas conscience des risques que vous prenez ! (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
M. le président.
Du calme, s'il vous plaît !
M. Gaëtan Gorce. Je sais bien que ces questions vous gênent dans les rangs de la majorité, mais la question de l'emploi sera lancinante tout au long des mois à venir.
Comme je suis persuadé que vous êtes conscient de ces risques, monsieur le ministre...
M. Yves Nicolin. La question !
M. Gaëtan Gorce. ... n'est-ce pas au fond une nouvelle concession que vous faites, une de plus, au MEDEF, pour vous concilier ses bonnes grâces dans les négociations à venir ? (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
M. le président.
Monsieur Gorce, s'il vous plaît...
M. Gaëtan Gorce. J'ai fini, monsieur le président.
M. le président. Alors posez votre question, s'il vous plaît.
M. Gaëtan Gorce. Il serait souhaitable, dans l'intérêt de notre pays, et pour soutenir la confiance que vous appelez de vos voeux, que le Gouvernement, plutôt que de s'en prendre aux dispositifs existants, qui protègent les salariés,... (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
M. le président.
Monsieur Gorce, je vous demande de poser votre question !
M. Gaëtan Gorce. Mais, monsieur le président, je suis en train de la poser.
M. le président. Posez-la !
M. Gaëtan Gorce. Je souhaiterais que le Gouvernement nous dise enfin quelles sont, en matière d'emploi, ses intentions, ses prévisions, ses perspectives. A quoi s'engage-t-il aujourd'hui ? Je ne voudrais pas, pour reprendre la formule de M. le premier ministre tout à l'heure, que la courtoisie de l'expression masque l'absence de clarté des orientations. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste. - Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
M. le président.
La parole est à M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité.
M. François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité.
Monsieur le député, la loi dite « de modernisation sociale », votée sans aucune concertation avec les organisations syndicales... (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)
M. François Goulard.
C'est pourtant vrai !
M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. ... n'a eu aucun effet positif sur l'emploi ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.) La vérité, c'est que les plans sociaux ont augmenté de 39 % durant les cinq premiers mois de l'année 2002. (« Eh oui ! » sur les mêmes bancs.)
M. Manuel Valls.
Renseignez-vous !
M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Ce texte n'a eu en réalité que deux conséquences : d'une part, accélérer les dépôts de bilan d'entreprises, qui contournent les dispositions de la loi de modernisation sociale par la procédure du dépôt de bilan... (Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
Mme Martine David.
Mais non !
M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. ... d'autre part, réduire l'attractivité du territoire français aux yeux de ceux qui pourraient y créer des emplois. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
De plus, ce texte ne règle aucune question essentielle, par exemple, les licenciements en dehors des plans sociaux, qui représentent aujourd'hui les trois quarts des licenciements tout de même,...
M. Manuel Valls. Et vous, qu'est-ce que vous faites ?
M. le président. Monsieur Valls, s'il vous plaît !
M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. ... l'accompagnement des mutations industrielles, la gestion prévisionnelle des emplois ou encore l'employabilité des salariés. Le Gouvernement a donc décidé de soumettre au Parlement au cours de la présente session un texte qui visera à suspendre pendant dix-huit mois les dispositions touchant aux procédures (« Encore un coup du MEDEF ! » sur plusieurs bancs du groupe socialiste), c'est-à-dire à revenir à la législation antérieure et à renvoyer aux partenaires sociaux la fixation de nouvelles règles, comme cela avait été fait en 1996 après la suppression de l'autorisation administrative de licenciement. Au terme de ce délai, le Gouvernement tirera toutes les conséquences de cette négociation.
Monsieur le député, vous avez parlé de la confiance.
M. Jean Glavany. Elle est loin !
M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Or, pour ce qui est de l'économie, vous avez, en permanence trompé les Français ! (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.) Pour mériter leur confiance, il faut leur dire la vérité. C'est le choix que le Gouvernement a fait ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
M. Jean Glavany. On jugera aux actes !
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