<p>Texte</p>
Il faut en finir avec cette course de l’ombre, ces duels de fantômes, ces esquives et ces pantomimes qui ne sont plus à la hauteur ni d’un grand Parti, ni des enjeux qui sont devant lui. Quiconque a assisté à notre Conseil National hier soir ne pouvait qu'être accablé par l’atmosphère.
On reproche parfois aux dirigeants socialistes d’en dire trop. Cette fois, c'est le trop-plein de non-dits qui était terrifiant. A l’exception de nos élus qui ont fait partager, légitimement, leur joie, tout le reste n’était que brume et grisaille. Conséquence de la fatigue accumulée durant la campagne ? Peut-être ! Illustration surtout de l’épuisement politique et idéologique d’équipes dirigeantes qui n’ont plus rien à dire lorsqu’il ne s’agit ni de critiquer le gouvernement, ni de sacrifier aux petites phrases et aux attaques millimétrées contre tel ou tel camarade !
Isolés, certains ont bien tenté de relever le défi.
Vincent Peillon a cru avec talent pouvoir ranimer la flamme d’un socialisme d’avant Marx, d’un humanisme républicain dans lequel il a raison de chercher une nouvelle inspiration. On le remerciera d’avoir cité Anatole France, cher aux amoureux et aux connaisseurs des «Ormes du Mail ».
Benoît Hamon s’est voulu fracassant en indiquant qu’il ne signerait qu’une motion : celle qui affirmerait l’attachement des socialistes à l'État, à la redistribution et au service public. A ce niveau de généralités, qui pouvait le contredire ? N’est-ce pas plutôt sur le contenu de ces références que nous devons débattre et pas simplement de ces prolégomènes.
Mon propos ne se nourrit d’aucune amertume : le PS a au fond de lui-même et de son électorat, des ressources dans lesquelles on refuse malheureusement, obstinément, de puiser. C’est pourtant là que se situe l’avenir. Il ne faut jamais y renoncer.
Je vous joins le texte de mon intervention en vous souhaitant courage et ténacité !
Intervention de Gaëtan Gorce
au Conseil National du PS du 25 mars 2008
Chere(s) Ami(e)s et Camarades,
Trois leçons à tirer :
la première, c'est que le PS sort, c'est une litote, renforcé de ce scrutin municipal. Et je veux saluer ici toutes celles et tous ceux qui ont contribué à ce succès. Il ne faudrait pas en revanche que nous tirions de ces résultats des conclusions qui seraient au rebours de ce qu'ils nous apprennent. Il existe en effet un point commun entre notre défaite de 2007 et notre succès de 2008 : c'est que notre Parti profite à plein, et il est le seul à Gauche à le faire, de la bipolarisation croissante de notre système politique et de la présidentialisation du régime. Or, je vois émerger une double tentation qui me paraît totalement paradoxale au regard de l'évidence que je viens d'énoncer. La première consisterait à vouloir rejeter l'affirmation d'un leadership fort au sein de notre Parti alors que l'enjeu est plus que jamais de gagner la Présidentielle et que les électeurs de Gauche sont de plus en plus nombreux à attendre du Parti socialiste qu'il se mette en situation de le faire. La seconde serait de rechercher à toute force sur notre gauche ou vers le Centre des alliances alors qu'il est à chaque scrutin plus clair que nous disposons en nous-mêmes des ressources nécessaires pour créer les dynamiques électorales de premier et de second tours. La crise dans laquelle la Droite est plongée signifie que la synthèse que Sarkozy avait réalisé entre une partie de l'extrême droite et une partie du Centre a pour partie volé en éclats. Il existe donc un électorat centriste disponible qui constituera la clé des prochains scrutins et que nous pourrons convaincre, non en proposant une alliance au Modem mais en présentant au pays , un projet qui rassemble au delà de nos frontières traditionnelles.
Ce qui fait le lien avec ma seconde observation qui porte sur les raisons de notre succès. Il tient naturellement à la qualité de nos candidats. Il repose aussi sur le rejet de la politique de Nicolas Sarkozy. Il exprime surtout un désarroi profond. L'échec de la Droite laisse en effet entiers les problèmes que les deux finalistes de la présidentielle avaient promis, avec le même volontarisme, de résoudre. De scrutin en scrutin, depuis 15 ans, nos concitoyens nous font part de leur angoisse devant la montée des insécurités civiles, sociales,économiques terroristes. A cette angoisse, nous devons répondre par le langage de la vérité. Non en surfant sur les frustrations et les protestations, mais en montrant que nous pouvons à la fois fortifier notre économie et préserver un haut niveau de protection sociale si nous avons le courage de conduire une politique financière rigoureuse et une vraie réforme de l'État. C'est un nouveau mendésisme que j'appelle de mes voeux, qui mobilise notre démocratie et ses ressources au service du changement.
Ce qui me conduit à ma troisième observation : l'urgence d'une transformation en profondeur de notre Parti pour relever ce double défi électoral et politique. Au lendemain des présidentielles et des législatives, alors que je plaidais à cette tribune pour un changement radical, on m’avait dit alors que l’on ne changeait pas une équipe qui perd. On me dira sans doute aujourd’hui, sans souci de contradiction et avec sans doute plus d’arguments, qu’on ne change pas non plus une équipe qui gagne.
Mais n’est-ce-pas alors plutôt le système qu’il faut changer, nos formes de travail, d’organisation, de débat, de délibération ? N’est-ce pas plutôt une dynamique nouvelle qu’il faut enclencher pour reconquérir ces dizaines de milliers d’adhérents qui nous ont quittés dans l’indifférence générale et pour en conquérir encore de nouveaux ?
Après nous avoir proposé hier d’attendre, que nous propose-t-on aujourd’hui sinon de continuer, c'est-à-dire de conserver les vieilles formes de débats qui confinent notre expression depuis près de 10 ans ? Que nous propose-t-on sinon de reconstituer le vieux cortège des contributions, des motions et des nuits de synthèses ? Que nous propose-t-on sinon de transformer une compétition entre des présidentiables que rien n’oppose sur le fond en une irrémédiable bataille de congrès ? Avec pour seule alternative, pour seul échappatoire la constitution, à force de tractations dans les coins et les rabicoins, d’un ventre mou du Parti dont l’étendard, le cri de ralliement serait, excusé du peu, le refus de choisir ! N’aurions-nous donc le choix qu’entre l’affrontement et l’arrangement ? Ne serait-il pas préférable de faire celui du changement, un changement réfléchi, pour préparer l’avenir ?
Je préconise ici, puisque l’on ne m’a pas donné l’occasion de le faire à la Commission de la Rénovation à laquelle je n’ai pas été conviée, de réformer nos règles et de les réformer vraiment. Et de fonder notre prochain congrès sur la parole de nos militants plutôt que sur la contribution de ses dirigeants. Je propose de lancer un vaste débat dans chaque fédération, dans chacune de nos sections. D’en recueillir chaque idée, chaque proposition pour bâtir sur cette parole le texte qui sera soumis au vote final, et aux amendements, des militants.
A cette fin, je propose de mettre en place une Commission, indépendante, qui aurait pour mission d'organiser ce débat et d'en faire les synthèses, comme l’ont fait avant nous avec succès, par exemple, nos amis belges. Tant je suis persuadé que la dynamique viendra de nos militants, de nos élus plutôt que de courants, de d'équipes, d'écuries essoufflées.
Je propose enfin que notre futur Premier secrétaire soit élu avant le congrès pour que sa légitimité doive tout aux adhérents et rien aux petits arrangements de congrès, de factions, de clans ou d’intérêts.
En somme, je propose que nous engagions le changement qui nous permettra de répondre au triple défi électoral, stratégique et organisationnel que nous lance la situation nouvelle dans laquelle nous sommes entrée depuis 2007.
Bonjour,
je partage entièrement votre point de vue et votre ...enthousiasme. Je souscris et j'appuie. J'allais dire "je soutiens la motion" mais je remballe. Votre analyse de ce système des motions est pertinente et frappe en plein dans le mille. Une rectif : cela ne fait pas 10 ans que nous vivons sous ce modus operandi mais plus de 30 ans (pour les anciens).
2 questions si vous le permettez :
- pendant la campagne présidentielle, les débats particpatifs organisés très largement ont permis de recueillir un "matériel" de très bonne qualité. Plutôt que de re-partir toujours de zéro, pourquoi ne pas se servir de ces "cahiers d'espérance"comme point de départ. Afin aussi de ne pas toujours redécouvrir le fil à couper le beurre militant. On pourrait parler d'actualisation comme pour les conventions nationales que vous relancez (quelle honte collective pour ce manque de travail). Où sont d'ailleurs les commissions d'études; le GPE, etc...
- Vous écrivez "nous pouvons à la fois fortifier notre économie et préserver un haut niveau de protection sociale si nous avons le courage de conduire une politique financière rigoureuse et une vraie réforme de l'État. C'est un nouveau mendésisme que j'appelle de mes voeux, qui mobilise notre démocratie et ses ressources au service du changement". Oui et qui ne serait pas d'accord sur ces propositions... Mais comment y parvenir avec des propositions sérieuses, cohérentes et réalistes ?
Cordialement
Rédigé par : Robert | 02 avril 2008 à 23:47
Bruno, ce type de situation s'est reproduite un peu partout.
Tout est fait par les cadres de l'appareil du PS, à tous les niveaux, pour rejeter la sève du parti.
Les dissidences ont été la cause de l'appareil, de façon avouée ou non. En collaboration étroite et entendue avec d'anciens élus qui ont refusé tout renouvellement. Le Congrès a débuté concrètement, lors de ces Municipales (sinon en juin dernier, où Gaëtan Gorce avait mis le doigt sur la plaie).
Tout ceci ne s'est guère vu, et n'a pas été repris par la presse : le problème s'est surtout posé pour des villages ou zones péri-urbaines.
Pour le Congrès qui vient, les adhérents étant exclus ou cadrés, parqués pour ne pas nuire, la bagarre va se réduire à une lutte féroce entre les apparatchiks dont les fameux reconstructeurs style Cambadélis ou Bartolone, qui ont déjà leur candidat ..... ( who ?... devinette ?) et les élus de terrain, "grands élus" compris car eux en prise avec les réalités. Ceux-ci en ont assez autant que les militants-lambda : cf Cohen, Coullomb,...
Rédigé par : le concombre masqué | 01 avril 2008 à 09:56
Difficile de ne pas partager votre point de vue. Mais, hélas pour moi et quelques camarades d'une petite section, ayant oeuvré depuis mars 2007 avec des citoyens partageant nos valeurs et avec des militants communistes et vert afin de mettre au point un programme municipal et une liste dite "Gauche citoyenne", démarche à laquelle participaient 12 des 14 adhérents de notre section (dont j'étais le Secrétaire), nous sommes aujourd'hui "hors parti", exclus, virés... Oui, vous avez bien lu. Trois camarades ayant un projet très personnel nous ont quittés pour entamer un porte à porte permettant au dernier moment, le 31 octobre dernier, d'obtenir de justesse un vote proposant à la Fédération girondine du PS une "tête de liste" pour une liste autonome... légitimée en convention fédérale. Moins nombreux que nous... ils ont réussi à non seulement casser la section mais amener "le poing et la rose" en 3ème position des municipales avec 18,83 % des suffrages exprimés (Ségolène avait fait 49 % le 6 mai et le candidat socialiste aux législatives 51 %). Le PS à moins de 20 %... Malgré leur division et leurs coups de boutoir, notre liste d'union a obtenu 20,2 %... La droite a été élue au 1er tour avec... 60,9 % !
Tout cela, cher (ex)camarade pour dire qu'il y a tout de même un énorme travail à accomplir... et pour constater que, nous, des militants, seront hors des débats du fait de nos injustes (et politiquement idiotes)exclusions...
En Gironde, hélas, le PS a perdu des positions ; son bilan, bien examiné, est "mitigé".
Vous ayant laissé mon adresse e-mail, vous pouvez me contacter si vous le souhaitez. Pour l'anecdote : le courrier d'exclusion se terminait par "salutations distinguées" en lieu et place du traditionnel "amitiés socialistes". Et précision : ma première adhésion au PS date d'avril 1974, époque où... l'union était "un combat".
Bruno
Rédigé par : Bruno | 31 mars 2008 à 14:47
Comme vous êtes intelligent, Gaëtan !
Mais aussi courageux :
rares sont ceux qui osent comme vous.
Les "grandes-gueules" sont muettes ... tiens donc ?
Et vous avez le ressort de proposer par-dessus le marché !
Pourquoi être obligé de dire de telles vérités aux dirigeants du PS, qui devraient avoir la lucidité et l'honnêteté que tant espérent dans l'électorat de gauche.
C'est leur job ! car on ne peut parler de militantisme ni de convictions à ce stade de décomposition avancée...
Rédigé par : le concombre masqué | 28 mars 2008 à 21:12
Bonjour,
je souhaite, en effet,que dans nos sections, nous débattions sur les éléments importants que nous voulons voir dans le projet, sans attendre les contributions nationales
Une grille de recueil des propositions pourrait être établie soit au niveau national, soit au niveau fédéral, favorisant la synthèse.
bien cordialement
Jean Lassort Bordeaux sud
Rédigé par : lassort | 27 mars 2008 à 16:53
Proposition intéressante sur le 1er secretaire pre congres mais quid si ses idées ne sont pas majoritaire ensuite ?
La vraie révolution serait de dire: le vote se fait sur une paire 1er secretaire - motion car les idées doivent être incarnées avec un scrutin majoritaire à 2 tours.
Rédigé par : FP NICOLAS | 26 mars 2008 à 18:33