L'excellente habitude s'est prise, depuis quelques années, de débattre dans l'hémicycle des sujets qui seront à l'ordre du jour du prochain Conseil européen. Celui qui se réunira demain se tiendra dans un contexte particulièrement inquiétant du point de vue économique et financier, naturellement, mais aussi du point de vue politique.
Il n'aura en effet échappé à personne que la crise a atteint l'Europe, soulignant son déficit de leadership, faisant ressortir les tensions qui affectent l'axe franco-allemand, faisant apparaître les ambiguïtés de réformes institutionnelles incomplètes. Cela n'aura échappé à personne sauf... au ministre des Affaires étrangères - on hésite d'ailleurs à attribuer ce titre à Bernard Kouchner, tant celui-ci paraissait à la tribune peu concerné, semblant se résigner à la platitude d'un propos qui confirme malheureusement le caractère résigné d'une politique et d'une diplomatie.
Il aura fallu Elisabeth Guigou pour se placer au niveau des enjeux : l'Europe est en effet sous la menace d'une disparition quasi volontaire de la Commission. Celle-ci a renoncé à jouer son rôle. N'est-ce pas à elle en effet qu'il appartiendrait de proposer aux gouvernements une stratégie et une méthode pour mieux coordonner nos politiques économiques et budgétaires? Au lieu de cela, elle laisse les gouvernements se débrouiller entre eux, chacun n'ayant d'autre souci que de faire valoir ses propres préoccupations.
Ainsi s'explique les retards observés dans la mise en place de dispositifs de soutien à la Grèce! Ainsi s'explique l'incapacité à prendre des mesures concrètes de régulation des marchés et de taxation des banques! Ainsi s'explique la cacophonie observée sur la question pourtant déterminante de la gouvernance économique. La faiblesse de la commission ne pourrait avoir qu'une excuse : la pugnacité et la hauteur de vue des dirigeants français comme des dirigeants allemands. On en est loin! À la crise du leadership à la tête des institutions européenne s'ajoute un même déficit de leadership à la tête de nos deux grands nations.
De ce point de vue, la prise de parole de Jean-François Copé, Président du groupe UMP n'en aura été que plus dérisoire. Son discours n'avait d'autre objet que de souligner les manques de l'action du gouvernement qu'il soutient comme s'il prenait date, ce qu'il fait chaque fois d'ailleurs que l'occasion lui en est donnée. Mais alors, pour quelle stratégie au service de quelle ambition autre que personnelle pouvait on se demander?
Ce fut alors pour assister à l'énoncé d'un pénible inventaire de lieux communs qui n'est pas le pire de ceux que j'ai entendus, mais qui montre combien une belle intelligence peut se perdre en petits calculs. Pour parfaire l'exercice, le président du groupe UMP réussira même à présenter la réforme des retraites comme le gage de notre engagement européen. Il est triste de penser qu'on peut aspirer un jour à la Présidence de la république en montrant si peu de hauteur de vue. Dois-je avouer que j'en avais assez entendu et que je préférais alors me reporter à l'interview publiée dans le Figaro d'aujourd'hui, de Jacques Delors qui « après les pompiers, en appelle aux architectes »? . À en juger par la qualification professionnelle des orateurs de la majorité, il ne fait aucun doute que ce dernier corps de métier ne se trouve ni au gouvernement ni au sein du groupe UMP...
Gaëtan Gorce
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