A en croire un récent sondage, les deux tiers de nos compatriotes seraient déçus de l'action du Président de la République. A suivre l'actualité et les déclarations répétées des uns et des autres, il semblerait qu'il faille même compter au nombre des mécontents, une fraction croissante d'élus ou de dirigeants socialistes. Par un curieux mimétisme se dressent en effet aujourd'hui toutes sortes d'indignés pourtant nourris au lait de Solférino : là, c'est un groupe de puristes qui fait connaître par voie de presse son refus de voir la suppression du cumul des mandats reportée à 2017 ; ici, c'est un contingent de députés qui fait savoir à peine un projet de loi présenté à l'Assemblée sa détermination à durcir un texte jugé trop complaisant avec les banques ; partout enfin fleurissent des factions nouvelles se revendiquant d'une gauche, tantôt forte, tantôt populaire, tantôt durable, mais surfant à chaque fois sur les supposées insuffisances du gouvernement. Il est curieux (mais banal) d'observer combien l'humeur des élus d'une majorité peut épouser celle de l'opinion ! Et plus curieux encore de noter que ces soudaines et tonitruantes prises d'initiatives surgissent quelques semaines après un Congrès qui fut, lui, d'un calme plat. Ceux, bien rares et dont j'étais, qui proposaient de faire de ce rendez-vous l'occasion d'un vrai débat sur l'organisation et le rôle du parti dans cette période inédite, se voyaient alors opposer les éternelles vertus du rassemblement et des non-dits que celui-ci implique nécessairement. Elus et cadres socialistes, tous ou presque ont ainsi accepté à l'automne, d'un même mouvement, une procédure absurde consistant à coopter avant toute délibération un Premier secrétaire et "son" équipe, acceptant du coup sans mot dire le nouveau quadrillage imposé à nos instances par des ministres en mal d'influence. Je me souviens, brandissant l'étendard de la rébellion, d'avoir alors voulu solliciter tous mes collègues parlementaires de l'Assemblée comme du Sénat, pour refuser cette ineptie, le plus souvent condamnée officieusement par un grand nombre : un seul (je le remercie encore) répondit à cet appel ! Et l'on pût applaudir à Toulouse à la plus curieuse communion d'hypocrisies à laquelle il m'avait été donné d'assister depuis longtemps, chacun (ou chacune, le manque de courage étant scrupuleusement paritaire) ayant une "bonne" raison de cacher en public ce qu'il ne manquait pas de dire en privé ! Aussi, ai-je aujourd'hui tendance à penser que les unes et les autres, plutôt que d'afficher leurs états d'âme, devraient désormais ne s'en prendre qu'à eux-mêmes !
Aussi, au cœur de la bataille, n'est-il plus temps de se plaindre et d'accentuer encore par l'écho de ses récriminations les difficultés du moment. Il fallait agir à temps ! Instrumentaliser la question du cumul, ne peut plus avoir pour effet que d'affaiblir un peu plus nos sortants à un an d'une échéance qui sera particulièrement dure. Il faut donc, maintenant que la reforme a été confirmée et son calendrier arrêté, que la polémique cesse !
Critiquer publiquement certains choix économiques ou fiscaux ne peut, de même, qu'accentuer le trouble qui affecte déjà largement l'opinion.
Le simple bon sens politique nous indique que nous n'avons plus d'autre solution que de serrer les rangs... sans renoncer pour autant à débattre de notre action ! Nous ne pouvons ignorer le malaise de l'opinion ni renoncer à en traiter les causes. Mais à la condition de l'aborder avec une vue d'ensemble et non en prenant tel ou tel point précis permettant de se distinguer à bon compte et sans risque (comme sur le cumul par exemple) mais au prix de l'affaiblissement de tous.
Il y aurait en effet beaucoup à dire, non pas tant sur le contenu de la politique conduite, que sur la manière dont elle l'est.
La vraie source de déception tient a mon avis à un défaut de pédagogie. Il faut cesser de biaiser et dire clairement aux Français la gravité de la crise et ses conséquences. En somme, les prendre au sérieux ! Le Président n'a, à aucun moment, cédé, ni pendant sa campagne, ni depuis, aux facilites de la démagogie. Alors pourquoi ne pas aller jusqu'au bout et assumer un marasme dont son ambition est de faire sortir le pays ? Montrer un cap est indispensable mais possible qu'une fois qu'on a clairement sur la carte reconnu sa position !
"La vraie source de déception tient a mon avis à un défaut de pédagogie".
Là est, selon moi, l'erreur. Le problème, me semble-t-il, n'est pas du tout que les français ne comprennent pas la politique suivie. Ils comprennent très bien, trop bien même, que cette politique vise à rassurer les marchés et à donner des gages à l'Europe. Le problème est qu'ils n'en veulent pas, du moins l'électorat populaire qui est l'électorat naturel de la gauche. Ce n'est pas de pédagogie dont ils ont besoin; c'est d'une autre politique économique. Il serait temps d'en prendre conscience.
Merci de bien vouloir publier ce commentaire puisque, vous le dites vous-même, il ne faut pas renoncer à débattre.
Rédigé par : chatel | 11 mars 2013 à 14:50
Déception, le mot est faible, en fait les deux tiers des Français pensent que vous ne valez pas mieux que vos illustres devanciers .
Dire cela va -t il au delà de la modération?La France est elle un pays ingouvernable?
Déception,trouble,difficultés, malaise, défaut de pédagogie,marasme,ces mots sont bien en dessous de la réalité et il est faux de parler de "l'humeur des élus"ce n'est pas une humeur, c'est sentir par avance le vent du boulet, car je vous le dis vous allez être balayés, patience mais ça viendra .
Ce genre de commentaire dépassant "l'opposition de sa majesté"ne sera pas publié, je m'en moque, mais vous ne pourrez pas dire que vous n'avez pas été prévenus.
girard
Rédigé par : girard | 07 mars 2013 à 20:44
Serrer les rangs l'idée est excellente,mais sans vouloir verser dans l'ironie il y a urgence car ces mêmes rangs sont de plus en plus clairs.
Serrer les rangs a été dans les guerres napoléoniennes une technique militaire pour éviter la panique quand les rangs se faisaient de plus en plus clair: nous y sommes.
Qu'il y ait un défaut de pédagogie peut être mais ce qui a été fait c'est "rassurer les marchés" et c'est pour ainsi dire tout, je le disais ici dans un commentaire , cela ne peut suffire.
Bien sur il est indispensable de montrer un cap mais je n'y crois guère , les Français même ceux qui n'apprécient pas Renaud se posent toujours la même question:
"François c'est quand qu'on va oû"?et faute de réponse ils pensent qu'on va droit dans le mur.
girard
Rédigé par : girard | 05 mars 2013 à 20:53