Qu'ils s'agissent des "réformateurs", dont je me suis un temps senti proche, ou de la gauche du parti, à laquelle je n'ai appartenu qu'au moment du CERES, tous semblent aujourd'hui engagés dans ce qui ressemble à une absurde fuite en avant !
Les premiers n'ont pourtant pas tort de vouloir rappeler, comme l'a fait le Premier ministre mercredi puis Dimanche, que la gauche n'est pas l'ennemie de l'entreprise et que les réalités économiques et budgétaires s'imposent à nous. Il ne s'agit là que d'un simple bon sens qui ne peut surprendre que ceux qui l'ont perdu depuis longtemps.
Mais les frondeurs, de leur côté, ont raison d'appeler l'attention sur une politique, qui à force de freiner la reprise, ne peut qu'entretenir le chômage et du coup le ressentiment populaire.
Mais les uns comme les autres ne se parlent pas : ils s'invectivent, trop contents d'épouser une querelle qui du point de vue de l'un comme de l'autre leur donne le beau rôle : aux uns, le monopole de l'intérêt général, aux autres celui de la "vraie gauche".
Si les deux camps voulaient bien renoncer un moment aux postures, et le parti pourrait y contribuer, peut-être verraient-ils que la voie qu'ils nous proposent respectivement ne mènent nulle part.
Les réformateurs n'oublient en effet qu'une chose : c'est que la crise de 2008 est passée par là rendant obsolète un social-libéralisme auquel j'ai cru face au conservatisme de la gauche du parti, mais que je récuse depuis qu'il a fini par se résigner purement et simplement à la logique des marchés abandonnant cette part d'espérance sans laquelle il n'est plus possible de se revendiquer socialiste. L'impuissance publique ne fait pas partie de notre ADN, d'autant qu'elle aboutit, ce qui est un comble, à sacrifier les plus modestes.
Quant aux "frondeurs" et autres radicaux, ils ne savent proposer que les outils d'hier, oubliant du coup que le monde a changé, criant "vive la gauche" pour se persuader que le passé n'est pas mort.
Alors que faire sinon leur rappeler la nécessité absolue d'adapter leur logiciel.
Ce que le socialisme n'a cessé de faire au cours de son histoire, souvent à contre-temps il est vrai. Même si ses dirigeants ont montré une sérieuse propension à ne pas écouter ceux qui les invitaient au changement : Bernstein, comme Jaurès, n'avaient-ils pas raison d'encourager le socialisme à se saisir de la loi comme du syndicalisme pour commencer à transformer la société ? Et les Planistes d'inventer le concept d'économie mixte pour répondre à la crise provoquée dans les années 30 par la Grande dépression ? Et Crossland d'appeler à l'orée des années 50 à prendre en compte les enjeux de la qualité de la vie, de la culture, de l'urbanisme, de ce que l'on appellerait aujourd'hui l'écologie ? Aucun ne proposait de renoncer au socialisme mais plutôt d'ajuster ses exigences à l'état de l'adversaire : répondre, au capitalisme sauvage des premiers temps par la Révolution, à celui, rationalisé et concentré de l'entre-deux-guerres par la planification publique, à l'économie productive mais privée de sens des années 60 par l'autogestion. A celle, dérégulée et financiarisée d'aujourd'hui, c'est par la recherche de la coopération, la rénovation des outils d'intervention publique, la mobilisation de la société pour faire reculer le marché qu'il faut riposter ! C'est donc un devoir d'invention qui s'impose à nous, ce qui doit nous conduire à récuser et le chant si doux de la nostalgie et celui, plus aigu, de l'abandon. L'idée socialiste gardera un sens tant que les valeurs humaines de justice seront reléguées au second plan. Mais si l'objectif reste le même, les moyens, eux, doivent changer ! Alors oui, Manuel, à la réforme, si elle ne perd pas de vue son objectif qui est de reprendre la main sur la folie de l'économie financière.
Oui, amis, à la fronde, si elle contribue à rénover une pensée en passe de s'ossifier.
Oui, à l'intervention de l'état, à laquelle nous ne devons pas renoncer, pour autant qu'il s'agisse d'un État rénové, remobilisé, réorganisé avec le concours de ses agents comme des citoyens. A la gauche alors d'inventer le processus démocratique qui fera de cette obligation une opportunité non seulement économique mais aussi sociale et démocratique.
Oui, à la préservation d'un haut niveau de protection sociale, mais à la condition d'éliminer les rentes, de s'attaquer aux inégalités devant la santé, et de financer prestations et services par des ressources modernisées et adaptées.
Oui à l'impôt, mais corrigé de ses injustices et de son opacité.
Oui à la priorité à l'Education, mais pour que celle-ci garantisse une véritable réussite scolaire au plus grand nombre.
Oui au dialogue social, mais en plaçant les partenaires sociaux devant leur responsabilité, eux qui s'avèrent incapables de gérer convenablement et l'assurance chômage et le système de formation continue.
Et Oui à l'intégration européenne, si elle s'accompagne d'un véritable progrès démocratique…
Ce sont ces ambitions qui devraient figurer à notre agenda. Nos débats seraient mieux employés à les concrétiser qu'à entretenir une fausse opposition entre sociaux-libéraux et archaïques. Le temps est venu d'en finir avec cette paresse intellectuelle qu'adorent les journalistes et les rentiers de la politique mais qui nous condamne à la division et à l'inertie. Si le nouveau Premier Secrétaire du PS peut servir à quelque chose, ce serait alors de s'attaquer à ce fléau et de favoriser une recomposition interne qui mette à l'ordre du jour cette question qui a toujours été celle qu'ont dû affronter les socialistes : comment préparer par le réalisme d'aujourd'hui les transformations de demain, en somme, comment mettre l'imagination au pouvoir ? Il y a à faire...
Nous y voila , comme sur le fronton de l'enfer lisons "vous qui entrez ici abandonnez toute espérance"Je ne sais pas oû est l'imposture des postures mais je sais bien oû est l'imposture des impostures c'est que vous soyez en place et que vos fonctions ne servent à rien sinon à augmenter le montant de la dette.Je vous l'ai déjà dit ici si vous n'avez aucune prise sur les événements , sur l'économie , sur la vie de notre pays il faut vous saborder.
Il faut commencer par le président qui devrait prendre comme devise le contraire de la famille Fouquet "jusqu'oû ne descendra -t-il pas ?
Je ne sais pas comment cela va finir , sans doute très mal en récitant avec Baudelaire:
"O Satan , prends pitié de ma longue misère".
Et toi Manuel du passé fait table rase.
girard
Rédigé par : girard | 07 septembre 2014 à 15:11
"Alors oui, Manuel, à la réforme, si elle ne perd pas de vue son objectif qui est de reprendre la main sur la folie de l'économie financière."
Mais justement, la réforme telle que la conçoivent M. Valls et les dirigeants allemands va à l'encontre de cet objectif. Elle consiste à se soumettre "purement et simplement à la logique des marchés abandonnant cette part d'espérance sans laquelle il n'est plus possible de se revendiquer socialiste". "L'impuissance publique" fait bien partie de l'ADN de cette gauche prétendument moderne qu'incarnent M. Valls et désormais aussi FH alors qu'"elle aboutit, ce qui est un comble, à sacrifier les plus modestes".
Rédigé par : chatel | 01 septembre 2014 à 23:08
En tant qu'adhérent de base, j'ai le souvenir que "sous le règne" de Martine Aubry, probablement aussi pare que c'était dans le cadre de la préparation d'un projet pour l'élection présidentielle, un grand nombre de rencontres, de rapports, mêlant cadres du parti, élus, experts extérieurs (experts légitimes, généralement, pas des experts de tout comme il en passe souvent à la télé) ont été produits, que j'ai alors attentivement écoutées, lus, voire annotés, partagés, discutés.
Ce qu'il faut peut-être discuter, travailler, c'est le passage de la production d'idées et d'expertise à la réalisation, et la transparence et l'obligation de motivation dans le processus. En effet, un vrai problème au PS me semble être le concept de "boite à outils" : des projets (ciblés) de politiques publiques sont élaborés, puis une certaine partie, ou rien cela, n'est finalement retenu, sans que la non-sélection ne soit motivée. Bien entendu, on ne peut pas tout faire, et tout n'est pas bon, et les institutions du gouvernement et du parlement sont légitimes pour déterminer les politiques publiques.
Mais en l'état, l'expérience est trop souvent que la production formalisée d'idées ira caler une armoire, et d'autres rapports seront commandés, en interne au gouvernement. Les intellectuels et praticiens en seront peut-être découragés de participer aux démarches socialistes. Mon point central serait donc le suivant : il faut que l'executif prenne l'habitude de motiver précisément les choix qu'il fait et les choix qu'il délaisse. D'ailleurs, trop souvent, les exposés des motifs et études d'impact des activités parlementaires ne sont pas au niveau qu'il faudrait, par bonne ou par mauvaise foi - on sent que cet exercice est parfois, pour le rédaction, vécu comme un exercice obligé fastidieux et que l'exposé des motifs est un peu trop rédigé en fonction de la conclusion qu'on veut tirer.
Rédigé par : Un militant PS quelconque | 01 septembre 2014 à 11:45