L'extrême-droite est désormais au cœur de tous les débats. Le Premier ministre à fait le choix d'en faire sa cible privilégiée. Les sondages annoncent ses succès futurs et certains s'interrogent même sur ses chances à la présidentielle. Un tel emballement traduit ce qu'est devenue la politique française dans laquelle l'émotion, feinte ou suscitée, tient lieu de raisonnement.
À première vue en effet, aucune des données objectives qu'il est possible de réunir sur le FN ne devrait laisser craindre qu'il puisse transformer sa progression actuelle en performance décisive en 2017.
Réceptacle de ce qu'il reste des vieilles droites, le FN n'incarne pas les mouvements profonds de la société française avec laquelle il n'est manifestement guère en phase. Aujourd'hui comme hier, il ne se nourrit que du désenchantement des uns ou du ressentiment des autres. C'est sur ce vieux compost qu'il a toujours prospéré, du vichysme, à l'anti-modernisme, de l'anti-américanisme à la nostalgie de l'Algérie française ou à l'intégrisme catholique, toutes doctrines défaites les unes après les autres. C'est certes de ce "passé" qu'il tente aujourd'hui de se libérer mais avec quelles difficultés... Comment un parti qui n'est constitué que du résidu de tant de courants mis en échec par l'histoire pourrait-il constituer une menace réelle pour la République ? D'autant que la plupart de ces cadres sont issus de ces courants et que le renouvellement que sa Présidente tente de lui imposer est loin d'avoir donné, pour l'instant, de résultats tangibles.
Enfin, la marche à franchir reste excessivement haute. Si la progression du FN en 10 ans à la présidentielle reste remarquable (+ 40% en voix de 4,8M à 6,4), il est encore loin du seuil de qualification pour le 2ème tour (plus de 9 M de voix en 2007 comme en 2012).
L'on n'aurait donc aucune raison d'entretenir une angoisse quelconque... si une élection n'était pas aussi le résultat d'une compétition dans laquelle les faiblesses de l'adversaire comptent autant que ses propres forces. Or, c'est précisément de ces faiblesses, voire de ces défaillances, que s'alimente le FN.
Comment ne pas redouter les conséquences, en premier lieu, de l'incapacité de la droite comme de la gauche à répondre aux conséquences du processus de décomposition de l'esprit républicain qui s'est accéléré depuis la crise de 2008 ? L'insécurité économique que celle-ci a réveillé (le taux de chômage étant resté depuis 20 ans particulièrement élevé) percute une société en pleine mutation (la présence plus visible de l'Islam vient s'ajouter au sentiment d'effondrement du modèle républicain : impuissance de la politique face à la finance, blocage de l'ascenseur social imputé à l'école, sensibilité accrue aux inégalités, bouleversement des modes de vies lié au recul de l'emploi industriel, à la reconnaissance de pratiques minoritaires etc. ). Or, aucun des grands partis ne s'étant mis en situation de proposer une issue positive à ces interrogations, (renonçant à redonner un sens à notre projet national, multipliant les confusions sur nos valeurs fondamentales : laïcité par exemple, vote des étrangers), le FN fonctionne comme une sorte d'usine de décantation des peurs et des angoisses qui parcourent la société française. C'est parce qu'il occupe un vide qu'il peut s'autoriser, sans jamais en souffrir, tous les "à peu près" programmatique ou au regard de la réalité. Il ne saurait donc y avoir de vrai combat contre l'extrême droite sans une réappropriation de la question républicaine et nationale, c'est à dire sans clarification de l'idée que le PS comme l'UMP s'en font.
Les Français rechignent à dire adieu à une Histoire qui en revanche n'inspire plus ceux qui sont chargés de l'écrire.
Là est le principal facteur de risque que ne peut qu'aggraver la stratégie de dramatisation mise en route depuis quelques semaines. Tout se passe comme si le Président de la République et celui de l'UMP, actant la présence du FN au second tour, se disputaient seulement la deuxième place qualificative, chacun cherchant à se présenter comme le meilleur rempart.
Cette "stratégie" est grosse de dangers puisque c'est choisir de faire de l'extrême droite l'axe structurant de notre système politique. C'est choisir d'en revenir à une vision, plus morale que politique, du bien et du mal qui transcenderait les clivages traditionnels... et laisserait aussi de côté les catégories populaires rejetées avec l'eau du bain frontiste au profit d'une nouvelle alliance des bien-pensants.
Outre les aléas propres à une telle approche (elle ne fera qu'un vainqueur et contraindra le vaincu à se fondre dans la nouvelle majorité présidentielle) elle donne au FN un avantage exorbitant en l'aidant en réalité à accomplir ce qu'elle est censée empêcher : faire du FN son adversaire principal, c'est faire du FN le premier parti de France !
Il n'est pas sûr que la sagesse revienne après les départementales.
La multiplication des duels risque en effet de donner raison à ceux qui les remporteront et penseront voir ainsi leur analyse confirmée.
Pourtant, s'il existe diverses façons de se suicider, et la gauche en a expérimenté déjà plusieurs, celle-ci est manifestement la pire...
FN
2002 : 4,8 M
2007 : 3,8
2012 : 6,4
Aux Européennes il a multiplié son score par 4 par rapport à 2009 (en %) et par presque 2 par rapport à sa meilleure année (14% en 89)- 4,7 M
En 2002 le seuil de qualification est de 4,8 (5,6 Chirac), 9,5 en 2007 (SR) (Bayrou 6,8) et 9,7 M en 2012.
Le noyau dur de cet électorat est + libéral eco.et dur sur l'immigration, celui sui rejoint étant plus concerne par le chômage et le pouvoir d'achat.
40% est entre 35/60 ans
Il ne saurait donc y avoir de vrai combat contre l'extrême droite sans une réappropriation de la question républicaine et nationale
On ne saurait mieux dire. Mais qu'on en est loin ! La plus grande confusion règne désormais en ce domaine, tout particulièrement en ce qui concerne la laïcité au nom de laquelle certains refusent la confection de repas de substitution ou s'opposent à l'exercice du droit de vote...
Le plus grave est que de nombreuses personnalités politiques, et non des moindres, donnent le sentiment d'être elles-mêmes complètement perdues...
Rédigé par : chatel | 28 mars 2015 à 11:01
Raison garder...mais le bon peuple de France ne fait que cela.
Avoir élu un président qui ne tient pas ses promesses, qui fait une politique de droite, il eut été plus naturel et plus logique de laisser faire cette politique par la droite.Pas un seul geste pour la piétaille qui lui a donner le pouvoir, oui tu a raison Gaëtan, il n'est pas sur que la "sagesse" revienne après les départementales car ce que tu nomes "sagesse" serait de l'aveuglement, de la bêtise ,vous récolter ce que vous avez semer, rien de plus faites donc un immense "mea culpa" qui ne servira à rien sinon à reconnaître vos fautes, il ne reste tu as raison que le suicide.
girard
Rédigé par : girard | 20 mars 2015 à 19:53
Il faut en convenir le président n'a pas su ré-enchanter le rêve Français ,pour les quelques millions de nos compatriotes qui vont voter front national c'est même le cauchemar , il faut être réaliste et ne pas se voiler la face.
Ce n'est pas une question de sagesse qui reviendrait ou non après les départementales, c'est le constat de votre échec et de celui de la droite que vous avez remplacé pour faire la même politique .
Vous n'avez plus aucun crédit et vous le savez bien, je ne sais pas si une autre politique est encore possible, mais je sais que de toute façon si tel est le cas qu' elle se fera sans vous.
Adieu donc et essayer de disparaitre sans faire de vague ce sera le denier service que vous rendrez à la France.
girard
Rédigé par : girard | 19 mars 2015 à 20:55