Deux rapports publiés cet été, l'un début juillet par France Stratégie, l'autre en ce début septembre par l'OFCE, permettent de mieux comprendre les processus à l'œuvre dans notre pays et confortent, qu'on le veuille ou non, les réserves exprimées ici depuis trois ans sur la politique menée par les gouvernements successifs.
Commençons par l'économie et ce que nous dit l'OFCE des conséquences des choix opérés par F. Hollande depuis 2012. Le constat est sans appel : à l'instar de ce que j'ai eu l'occasion de développer à de nombreuses reprises au sein de mon groupe, mon parti et auprès des ministres, le rapport confirme que les choix budgétaires opérés, qui se sont traduits par une augmentation de plusieurs points de PIB des prélèvements fiscaux et sociaux (et d'abord au détriment des ménages) ont exercé un effet négatif sur la croissance de l'ordre de 0,8 point de PIB depuis 2012 en moyenne, soit 4 points de croissance en moins ! Ce qui revient à dire que les budgets que l'on nous a fait voter ces dernières années (ce que j'ai d'ailleurs, avec de trop rares autres, refusé de faire) ont, à l'encontre des déclarations officielles qui prétendaient toutes donner la priorité à la lutte pour l'emploi, contribué à la montée du chômage ! Et ceci sans changer radicalement la donne en matière de redressement des comptes publics, l'amélioration incontestable de notre solde structurel n'ayant pas stoppé la croissance de notre dette !
L'honnêteté exige d'ajouter que le rapport de l'OFCE souligne en revanche l'efficacité du Pacte de responsabilité et des mesures associées qui ont permis un rétablissement des marges de nos entreprises et une reprise lente mais progressive de l'investissement (sans effet significatif pour l'instant sur l'emploi). Est-ce à dire que la politique de F. Hollande portera ses fruits après l'échéance présidentielle ? Ce serait un comble, mais ce résultat (malheureusement pour le pays) ne se produira pas. Fondée pour l'essentiel sur les « fameuses baisses de charges » (nos entreprises auront ainsi bénéficié sur le quinquennat d'une remise sociale et fiscale d'environ 20 milliards d’€), cette politique poursuit dans la voie de ce qui n’est ni plus, ni moins qu’une "subvention" au secteur marchand et qui assimile les gains de compétitivité à la seule diminution du coût du travail. Or, ces démarches sont suivies par la plupart des autres pays européens entraînant une course au dumping dont les effets ne pourront que trouver très rapidement leurs limites, puisque ce que gagne l'un l'est nécessairement au détriment du voisin... L'autre voie qui aurait consisté à privilégier l'investissement et la formation reste ignorée, et le restera d'ailleurs de la droite, nous condamnant à un affaiblissement progressif et à des arbitrages toujours plus douloureux entre dépenses de solidarité et soutien à l'économie ! Ce que le second rapport nous aide à mieux cerner.
Ce document, qui émane de l'ex-commissariat général au Plan, illustre l'impact que ces choix politiques et économiques exercent sur les inégalités territoriales. Celles-ci ne cessent en effet de se creuser entre 15 pôles métropolitains représentant 40% de la population mais 50% de l'activité économique et 70% des créations d'emploi et des zones moins denses (pas forcément rurales puisqu'elles englobent tout le réseau de nos villes moyennes) dont le revenu par habitant est inférieur de près de moitié à celui de ces métropoles, écart qui a été multiplié par trois en 15 ans !
En nous expliquant ensuite, les raisons qui ont permis à cette césure de ne pas se transformer en fracture génératrice de réactions vives, le rapport met le doigt sur la contradiction majeure dans laquelle est prise la politique "conformiste" des droites et aujourd'hui de cette fraction de la gauche qui gouverne.
La rupture, nous est-il dit, n'est évitée en matière de revenus individuels qu'en raison de l'effet redistributif de nos politiques sociales. En clair, si nos politiques territoriales (et l'on s'en doutait après le barnum de la réforme régionale) ne répondent pas à des objectifs clairs en matière d'équilibre des territoires, celui-ci est plus ou moins atteint par nos systèmes sociaux (retraites, chômage etc.) qui empêchent que la chute soit plus brutale.
Qu'en déduire ? Sinon que l'effet économique négatif de la priorité donnée à la métropolisation, comme celui négatif exercé sur le pouvoir d'achat par les baisses du coût du travail, ne sont compensés que par l'inflation de nos dépenses sociales. Ce qui revient à dire que nous subventionnons le revenu des plus modestes, faute que ceux-ci aient un travail et un travail qualifié, pour pouvoir subventionner des emplois mal rémunérés !
Ne serait-il pas temps de prendre conscience de cette folie et de remettre les choses en ordre : soutenir l'investissement et la création de valeur ajoutée, former et qualifier jeunes et salariés pour tirer vers le haut tout le système ?
Si c'est être frondeur que de raisonner ainsi, je veux bien l'être et le rester ! Mais j'ai plutôt le sentiment qu'il s'agit de simple bon sens et que ceux qui refusent de le voir ont d'autres buts que ceux qu'ils veulent bien annoncer...
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