Le dossier des retraites sera un véritable test pour la rénovation du PS.
A tort ou a raison, les Français reprochent aux socialistes de n'avoir pas eu le courage de s'y attaquer de front. C'est donc d'abord à ce sentiment qu'il faut répondre. Et l'on y parviendra que dans et par la clarté.
Sans doute doit-on dénoncer l'échec de la réforme Fillon ! Social, sans nul doute, puisque le taux de remplacement diminue, et d'abord pour les femmes ; financier ensuite puisque les comptes, loin d'être équilibrés, accusent déjà un large déficit. Mais le reproche ne peut prendre tout son sens que s'il s'accompagne de contre propositions précises et argumentées.
L'échec tient-il à un insuffisant allongement de la durée des cotisations ? J'imagine mal les socialistes user d'un tel argument. A une baisse insuffisante du niveau des pensions ? Insupportable ! Est-ce alors le niveau des prélèvements, indispensable à la pérennité de notre système par répartition, qui serait insuffisant ? Et sommes nous partisans de son relèvement ? La CSG retraite par conséquent ! Dans un contexte de ralentissement économique, avec la perspective tout aussi inquiétante du déficit croissant de notre régime d'assurance maladie, l'option paraît rien moins qu'incertaine, voire inopportune ! Pourtant, ces débats doivent être tranchés ! Car on ne pourra sans cesse faire le procès de la réforme Fillon sans dire comment nous procéderions si nous étions aux responsabilités ...
Il en va de même de la question des régimes spéciaux. Il faut certes rappeler que leur stigmatisation relève de la manipulation politique ; que leur réforme soulève d'autres questions que celles de la durée de cotisation ; que d'autres régimes, en particulier les professions libérales, méritent eux aussi d'être passés au crible des arguments de la justice et de l'équité. Mais soulevés ces arguments, on ne peut s'en tenir pour quitte en renvoyant simplement à la négociation. Les socialistes sont-ils oui ou non favorables à un alignement progressif, négocié, conditionné des régimes spéciaux sur le régime général ?
A en juger par le communiqué adopté hier par le Bureau national, qui appelle plusieurs lectures pour comprendre qu'il n'est pas destiné à donner une seule réponse, on mesure le chemin qu'il reste à parcourir. Nous ne pouvons retrouver la confiance des Français, si nous ne choisissons pas de leur dire la vérité, une vérité qu'ils connaissent ou qu'ils pressentent. Sinon, c'est celle de la Droite qui continuera malheureusement, à commencer pour les agents des services et des entreprises publics, à s'imposer ...
Il n'existe en matière de retraite aucune solution miracle. Les options qui sont sur la table appellent toutes des décisions courageuses. A s'enfermer dans le déni, la synthèse molle ou le contournement, la Gauche prend le risque une fois de plus de laisser tout l'espace à Sarkozy ...
Un matraquage médiatique, mené par la droite et suivi sans aucun recul par les grands organes de presse, a persuadé l'opinion que les régimes spéciaux étaient "indigne" pour reprendre les propos du président de la république. Persuadé que l'opinion est favorable à une réforme des régimes spéciaux, le PS n'ose pas prendre parti, de peur de s'aliéner cette opinion.
Une politique courageuse serait pourtant d'expliquer la réalité des régimes spéciaux, loin du matracage médiatique de la droite. Pour prendre le cas de la SNCF que je connais bien pour y travailler :
1°) Même s'il part à 55 ans, un agent SNCF doit cotiser 37.5 annuités pour bénéficier d'une retraite à taux plein. En pratique, un agent SNCF ne part donc jamais avec une retraite à taux plein. Pour le faire, il devrait avoir été embauché à 17 ans et demi.
2°) En moyenne, un salarié du privé touche à la retraite 84% de son dernier salarie, un salarié SNCF touche seulement 67.5% de ce dernier salaire (source : direction des ressources humaines de la SNCF)
3°) Le salaire d'un agent SNCF est en général inférieur à celui du privé (en moyenne 20%, d'après ce que j'ai pu constater pour moi même et des collègues ayant quitté le privé pour rejoindre la SNCF)
4°) Le chomage fait qu'environs 1/3 des plus de 55 ans issus du secteur privé sont sans activité (retraite, préretraite, chomage dispensé de recherche d'emploi), la situation d'un agent SNCF à ce titre n'est pas si "anormale".
5°) Le régime spécial de la SNCF est équilibré et ne coute pas un centime à l'état et n'est pas payé par "les impôts" des autres salariés. (plus de détail sur le financement de la SNCF sur mon blog)
Je ne dis pas qu'il faut pleurer sur le sort des régimes spéciaux, mais que l'avantage d'une retraite à 55 ans est compensé par de nombreux désavantages, qui grosso modo s'équilibrent et surtout ne pénalisent en rien les autres salariés.
Mais bon, en politique, il est toujours plus facile de suivre le mouvement plutôt que d'essayer d'expliquer une situation complexe, et le PS ne s'engage pas dans cette voie, dommage.
Par ailleurs, on peut aussi rappeler des éléments simples :
Le déficit des retraites, c'est 5 milliards d'euros par an. Les bénéfices du CAC 40, c'est 100 milliards l'année dernière. Le "paquet fiscal" voté cet été, c'est 15 milliards par an. Les exonérations de charges (dont le financement de la retraite) c'est environs 70 milliards.Donc, créer un impôt sur les bénéfices de 5% spécifique aux 40 seules entreprises côtées au CAC 40 (donc ne visant pas les PME/PMI), réduire d'1/3 le paquet fiscal suffirait à résoudre le problème des retraites, ou revenir sur quelques exonérations de charges suffiraient à résoudre le problème.
Bref, le déficit de la caisse de retraite est somme toute très petit, tout à fait gérable. Et comme la gauche antilibérale le dit depuis longtemps, l'argent, il y'en a. Il suffit de le prendre là où il se trouve.
Donc, comme la gauche antilibérale se tue à le dire
Rédigé par : Pingouin094 | 12 septembre 2007 à 19:32