Cahuzac après Strauss-Kahn, et alors que d'autres affaires sont en cours : tout cela ne peut plus être mis sur le compte seulement des personnes. Tout cela au contraire fait système !
Je le dis sans ambages, et d'autant plus à l'aise que je n'ai cessé de le dénoncer depuis des années : c'est la dérive clanique qui s'est emparée du parti socialiste qui a conduit presque mécaniquement à cette situation. DSK, pas plus que Cahuzac, ne sont des accidents. Leur attitude, et plus encore le sentiment d'impunité qui, manifestement, les habitait, sont la conséquence d'un processus d'oligarchisation de l'appareil dirigeant du parti : à mesure que les luttes de clan ont perdu toute dimension idéologique se sont constitués des groupes d'intérêt visant seulement à perpétuer le pouvoir et l'influence de leurs chefs, le cynisme prenant la place des convictions, le rapport de force celle de la confrontation d'idées.
La belle série de victoires remportées aux élections locales durant la dernière décennie a fait le reste, offrant mandats et emplois à des ribambelles d'alliés, clients et porte-flingues en tout genre, peu portés du coup à dénoncer des errements auxquels ils étaient indirectement associés.
Le tout a été facilité par un triple processus auquel n'échappe aucun parti mais qui s'est révélé mortel pour le PS (car le PS n'est plus ! Il lui faut désormais renaître !).
D'abord sa confiscation par une bourgeoisie d'appareil, qui a pris soin de remplacer l'intervention et le vote des adhérents par une cooptation systématique dont la désignation d'Harlem Désir à Toulouse a été la caricaturale illustration, la lâche passivité des cadres du parti à cette occasion témoignant également de l'ampleur du mal.
Mais comment ne pas voir qu'il s'agit là aussi du produit d'une professionnalisation à outrance de la vie publique qui fait que l'on devient toujours plus tôt, toujours plus jeune, dépendant, pour vivre, d'un mandat ou de celui ou celle qui l'exerce ? Loin de corriger cette déviance, la parité comme le non-cumul des mandats vont conforter cette tendance en favorisant l'ascension de clones sans jamais contribuer à un quelconque renouvellement, notamment celle INDISPENSABLE relative à l'origine sociale des dirigeants.
Ici enfin se trouve la troisième caractéristique de la déliquescence de ce que fut le parti socialiste qui a cédé à son tour à une "peopolisation" de la politique qui a conduit pour une partie de ses dirigeants à faire de la notoriété médiatique et des facilités qu'elle offre une fin en soi et développe connivences et passe-droits.
Là est le principal échec du parti socialiste : son mode de sélection des élites ne diffère en rien de celui à l'œuvre dans le reste de la société. Son mode de fonctionnement ne promeut aucune valeur propre distincte de celles qui gouvernent le reste du monde politique. Aussi est-il désormais incapable de produire en interne les anti-corps qui lui permettraient de prévenir ou de stopper l'ascension d'hommes ou de femmes dont l'attitude comme les choix de vie se situent aux antipodes de ses principes.
Tout cela est-il réversible ?
Sans doute, à la condition de changer brutalement de cap ! Puisque le mal trouve sa source dans une pratique du pouvoir et un mode de fonctionnement, il faut en changer de fond en comble pour se doter d'une nouvelle charte qui partout fasse vivre la démocratie, le libre choix des adhérents, l'influence des sympathisants; qui permette de casser les féodalités locales ; qui retire aux clans et courants le pouvoir de décider de la composition des instances; qui encourage une vraie diversité dans l'origine sociale de ses membres et de ses chefs.
Pour y réussir, j'en appelle à la formation d'une équipe de crise restreinte qui de façon autonome et indépendante de la direction du parti, travaillerait à réfléchir et mettre en place assez rapidement de nouvelles mesures propices à la rénovation du parti: une sorte de comité "des irréprochables" autour par exemple de Robert Badinter pour engager un véritable travail de refondation du PS en s'inspirant des valeurs éthiques et démocratiques qui forment son héritage le plus précieux ! A défaut, si rien ne change qu'à la marge, nous, socialistes, connaîtrons la lente agonie de tous ceux qui un jour ont refusé de voir la vérité en face et d'en tirer les conséquences.
Le regard que porte déjà sur nous une bonne partie des Français, et parmi les plus modestes, n'est-il pas déjà suffisamment douloureux à supporter ?
Léger décalage temporel...
Cependant le sujet reste d'actualité à la veille des municipales. La machine, la machinerie "politique" est en préchauffage. La "politique" sur tableur excel, la rationalisation, l'industrialisation de l'engagement politique, la "taylorisation" de l'action politique, l'efficacité doit primer, coûte que coûte... L'électeur est contraint et il faut le lui rappeler. Il n'a pas d'autre possibilité, il doit voter... rose ou bleu marine... nous gagnerons car nous sommes les gentils et eux les méchants, rien ne vaut la sollicitation de la peur, pulsion archaïque puissante et mobilisatrice.
Voilà ce à quoi j'assiste en Drôme, rien ne permet de tenir un débat d'idée, nous sommes systématiquement ramené à une féodalité et au principe de déférence...
Je vous conseil le bouquin de Christian Salmon qui analyse le phénomène (http://www.lettreducadre.fr/transaction/tra_telecharge.php?retour=%2FPAR_TPL_IDENTIFIANT%2F21842%2FTPL_CODE%2FTPL_REV_ARTSEC_FICHE%2FPAG_TITLE%2FLe%2Bpolitique%2Bau%2Bbord%2Bde%2Bl%2527ab%25EEme%2F2091-fiche-article-de-revue.htm&id=2091&ID_RESSOURCE=21842&TLT_CODE=TLT_REVUE_ARTICLE&TLT_FORMAT=PDF&TYPE_ACCES=FORCE).
Comment être efficace pour lutter contre cette régression. Méadel à surfer la vague, n'y aurait il que des "surfers". Je suis mobilisable pour des initiatives promouvant une "réincarnation".
Rédigé par : Alain | 03 septembre 2013 à 10:34
Bravo pour cette prise de parole courageuse bien relayée par Le Monde. Maintenant il faudrait qu'elle puisse être suivie d'effets. J'ai milité très activement au PS durant 3 années qui m'ont permis de découvrir l'envers du décor, tel que vous le dénoncez. Et encore, vous ne dites pas tout. La question qui reste à se poser: existe t-il une place d'où l'on puisse transformer ce parti en en préservant l'essence, sans se voir immédiatement dissous par les jeux de pouvoirs et effacé par le flot des médias, une affaire chasse l'autre, une voix couvre une autre...
Amitiés
Rédigé par : Katell | 28 avril 2013 à 23:04
C'est normal que chacun recherche avant tous son intérêt. Hélas beaucoup de savent pas que : "L'intérêt ce trouve toujours très proche du devoir".
Oui, que chacun face sont devoir, c'est la seul solution pour reconstruire la France et pour reconstruire le P.S.
C'est pourtant pas compliquer de faire son devoir. c'est a dire de tout faire la Fraternité le 3ème mots de la devise de la république. Fraternité c'est la même chose que "S'aimer les uns les autres" Hélas les laicards ne s'en rende même pas compte. L'Eglise est pourtant totalement contre le libéralisme économique et elle le dis depuis longtemps, en des mots très durs.
Rédigé par : P. Micoud | 17 avril 2013 à 12:18
militant socialiste aux ulis je partage cette excellente analyse, qui montre que d'une part il faudra définir un statut de l'élu et permettre ainsi à tout un chacun de pouvoir être élu sans pour autant devenir un professionnel de la politique et d'autre part réfléchir aux droits et devoirs des élites formées par la nation notamment dans les grandes écoles (X, ENA, etc.).
Rédigé par : Marc Victor | 13 avril 2013 à 12:55
Entièrement d'accord avec vous sur le clanisme du PS. Nettement moins d'accord quand vous présentez Badinter comme une personnalité irréprochable. Badinter a été un homme irréprochable, l'est-il encore ? Nous l'avons tous vu à la télévision défendre DSK sans distance ni retenue dans l'affaire du Sofitel. Alors faisait-il partie du clan DSK ou/et du clan des "hommes blancs de plus de 50 ans qui n'en ont rien à faire de Nafissatou Diallo" ? Ce dernier clan est très répandu au PS.
Rédigé par : marion | 13 avril 2013 à 10:03
Monsieur Gorce, comme je vous sens très philosophe, je vous rappellerai ce qu'a écrit Platon : "Ceux qui gouvernent la cité, peuvent se permettre de mentir". S'est-il trompé ? Je vous laisse juge... Je suis tellement le nez dans la philo, que j'en suis devenu apolitique. A moins que mon imagination me donne envie de créer "l'Extrème Centre" ! Comme le journal de chez nous !
Rédigé par : Jean-Claude | 12 avril 2013 à 23:11
La Nièvre ? Je connais un peu, je suis né à Cosne et vécu à Neuvy-sur-Loire ! A La Charité, je crois qu'il y a de quoi enfermer certains hommes politiques ! Depuis 30 ans, dans le Sud-Ouest, je m'aperçois que c'est bien moins agité...
Rédigé par : Jean-Claude | 12 avril 2013 à 22:58
Excellente analyse que je partage. La question est de savoir avec qui refonder ? Badinter er les vieux dirigeant ne me semblent en rien qualifiés. Il faut chercher dans la jeunesse PS et hors PS. Mais , comme l'a fait remarquer Malekh Boutih les citoyens et militants découragés semblent baisser les bras. Il faut refonder mais il faut aussi un projet de société novatrice, écologique, dynamique en économie. Qui va le rédiger ?
Rédigé par : Lissac | 12 avril 2013 à 22:06
Je partage totalement l'analyse que fait Gaëtan. Je sais aujuourd'hui pourquoi je n'avais pas voulu suivre les camarades du PSU rejoignant le PS derrière Michel Roccard. Déjà au sein du PSU on sentait poindre un fonctionnement douteux. Trop puriste, peut être, j'ai préférer m'engager dans le quotidien et l'associatif plutôt que dans le militantisme colleur d'affiches. Mon job m'a souvent conduit tout près des ors de la République (j'ai hésité à mettre une majuscule à République!) j'y ai rencontrer des gens biens des gens remarquables; mais aussi des vautours, des carrièristes qui étaient capables de tout pour .... (Paraphrasons F Morel : "C'est quoi leur métier à part "politique"!!!
Je suis partant aujourd'hui, j'ai 63 ans; pour travailler à une reconstruction de la gauche, mais est ce pour reconstruire un parti ? je ne le pense pas...
Rédigé par : Paul Marie | 12 avril 2013 à 16:03
Harlem Désir, condamné pour recel d'abus de biens sociaux sans compter une probable amnistie (Wiki), chef du Parti Socialiste... Tout un symbole...
Rédigé par : Carl | 12 avril 2013 à 14:46
Pour ma part, je trouve du dernier choquant que quelqu'un qui a fait toute sa carrière politique dans et gr^ce à un parti politique se répande dans les organes de presse pour en dire du mal dans les termes qui sont les vôtres.
Non pas que l'appareil du PS soit exempt de critiques, mais plutôt que c'est plus sein de le critiquer dans les instances pour ça.
Cette démarche là, je l'appellerais une salle manière.
Si vous penser tous les jours à quitter le PS, faites-le, il n'est pas certain qu'il vous regrette. Je réagis là comme citoyen et pas comme militant de je ne sais quoi et je serais tenté de dire la même chose de quelqu'un d'un autre parti au comportement si peu élégant.
Cet interview dans le monde laisse le goût d'un je ne sais quoi de putride.
Rédigé par : Diogène | 12 avril 2013 à 13:54
Monsieur le Sénateur-Maire,
Le cumul des mandats ne vous est-il pas trop pesant, accaparant et épuisant ?
Keizer Soze (l'un de cette "bonne partie des français"...)
Rédigé par : Keizer Soze | 11 avril 2013 à 17:18
Je vous remercie de cette excellente analyse qui vient de l'intérieur.
Fidèle à la gauche j'ai commis sur mon blog un article sur cette "gauche libérale"
qui tourne le dos aux "gens ordinaires" et qui n'a rien à envier à la "droite décomplexée".
Je me permets de vous le transmettre. Cordialement. Guy Valette - Gentilly
http://alternative21.blog.lemonde.fr/2013/04/05/cahuazac-et-dsk-ou-gauche-liberale-est-il-un-oxymore/
Rédigé par : Guy Valette | 11 avril 2013 à 13:59
Bonjour !
Il y avait longtemps que je n'étais pas venu visiter ce blog...
Et il y avait longtemps que je n'avais pas lu un aussi bon texte une analyse si juste et restant porteuse d'espoir !
En espérant qu'il saura inspirer nos dirige&ants !
Merci Gaêtan !
Rédigé par : Patrice TOURNE | 11 avril 2013 à 11:44
Bien vu Mr Gorce et messieurs les commmentateurs ci dessus.J'ai longtemps voté à "goche" ;Maintenant je vote Marine Lepen.Vous devriez ,si vous etiez logique, faire de meme. Mais là je crains d'etre sensuré: La liberté de parole n'est pas socialiste!!!!!
Rédigé par : Pierrot | 11 avril 2013 à 10:06
Tout est mauvais, tout est à changer... Sauf la suppression du cumul des mandats...
N'est-ce pas, Monsieur le Sénateur-Maire ! C'est vraiment trop gros !!!
Rédigé par : TOURNAIRE | 11 avril 2013 à 10:02
Tout à fait d'accord avec l'analyse de la dérive clanique et tous les errements exprimés. Une pensée pour ceux qui militent dans le Val de Marne le fief de la Strauss-Kahnie : pendant des années une secrétaire fédérale, Michèle Sabban (la voix de son maître) qui prônait la parité sauf pour les copains, à présent relayée par des affidés qui se distribuent les postes et continuent de sévir.
Rédigé par : Landolfi | 11 avril 2013 à 00:06
Bonsoir Gaëtan,
Militant socialiste à la section de Varennes-Vauzelles, je ne peut être qu'entièrement d'accord avec toi sur l'état actuel du PS. Ras le bol de ces pseudo-socialistes qui n'ont rien à faire dans ce parti. Moi-même, je me suis posé la question de rester ou pas dans ce parti. Mais les fautifs, ce sont eux, pas moi. C'est à eux de partir. Il est grand temps de nettoyer le parti, de faire émerger tout une nouvelle génération de femmes et d'hommes, issu des classes populaires ou moyennes, des gens élus pour SERVIR le pays et non se servir de leurs mandats à des fins personnels. M'investir moi-même en politique? J'y pense de plus en plus, mais malheureusement aujourd'hui, pour s'engager en politique, il faut beaucoup de temps, de disponibilité, peu compatible avec une activité salariée. Alors avec un statut de l'élu?...
Rédigé par : JONAS Christophe | 10 avril 2013 à 22:03
Ha oui la baronne Martine Aubry nous a imposé ce nul D'Harlem Désir et nous a parachuté son petit chien-chien protégé Jean-marc Germain dans la 12e des hauts de seine pour remplacer au pied levé un maire condamné pour harcèlement moral suite au suicide de sa directrice de la communication par défenèstration.
Bref le parti est verrouillé.
Merci de me publier.
Rédigé par : Damien TEXIER | 10 avril 2013 à 21:55
Refuser la délibération, comme le dernier Congrès l'a montré, cela mène à l'impasse, l'impuissance. Avec Gaëtan, nous avons été plusieurs à assister à ce mauvais film. Car le débat n'a été que de façade, il fallait approuver une orientation déclarée majoritaire avant même le vote ! D'ailleurs, y en avait-il une, d'orientation, dans le texte-édredon ? Sur la nécessaire refondation du parti, aucune.
Rédigé par : Daniel Cordiez | 10 avril 2013 à 19:12
merci pour votre analyse, de sensibilité sociale et membre du PS à la fin des années 80, je ne puis que souscrire à votre constat: le PS n'est qu'un appareil d'élus dont la seule obsession et de conserver leur siège, des professionnels entrée trop jeune en politique et déconnecté de la société...
Bien que partisan du non cumul des mandats et surtout de leur non renouvellement plus d'une fois, je trouve pertinent votre remarques sur les clones issus de la parité et du non cumul au PS...
Rédigé par : have | 10 avril 2013 à 18:05
Bonjour,
J'y ai songé.
Mais je suis d'abord et avant tout socialiste et j'ai du mal à abandonner ce parti à des gens qui ne méritent pas forcément de le diriger ou représenter.
Par ailleurs, si je suis d'accord sur l'idée qu'il faut remettre à plat les conditions et les objectifs de notre engagement européen, je ne suis pas certain de partager les convictions de Jean Luc Melanchon à ce sujet.
Bien cordialement,
G
Rédigé par : Gaëtan GORCE | 10 avril 2013 à 16:01
Contrairement à ce que vous pensez, c'est le cumul des mandats qui est en partie à l'origine de ce que vous dénoncez. Un système ne peut que dériver quand il n'est entre les mains que d'une poignet d'hommes. Au contraire, plus il y a d'interlocuteurs différents plus il y a d'acteurs potentiellement aptes à laisser le système dans un droit chemin (ou un chemin de Droit, c'est selon).
Pour la professionnalisation de la vie politique, si vous ne l'avez pas remarqué, les débats au Parlement ressemblent plus souvent à des débats de juristes qu'à des débats de "simples représentants". Tout est devenu technique et complexe, et il est fini le temps où l'on pouvait représenter la population avec une tête à moitié vide.
Rédigé par : Nicolas | 10 avril 2013 à 10:45
Vous venez de prononcer l'acte de décès de votre parti. Qu'y a-t-il à récupérer ?
Bizarre que vous restiez dans un tel bocal putride alors même que vous le dénoncez.
Rédigé par : Charles | 10 avril 2013 à 09:19
DSK, Dray, Besson, Cahuzac issus du PS vilipendé par un de ses anciens sénateurs ayant voté oui à Maastricht et faisant moitié moins de voix que l'extrême droite dans une circonscription de gauche.
Mitterrand avait au moins appris à parler socialiste !
Rédigé par : Clément Bernardin | 10 avril 2013 à 01:40