De tous les mérites que vous venez de reconnaître à Max-Pol Fouchet, poète, historien de l'art, journaliste, et dont témoigne cette exposition, il en manque un, néanmoins, que je dois m'empresser de rappeler.
Sa biographie ne témoigne-t-elle pas qu'il fut un grand professeur de topographie et à ce titre toujours à l'endroit où il fallait, au moment où il le fallait ? N'est-il pas à Alger, dès avant la guerre, si près de Camus son exact contemporain ? Dans la Résistance, à peine celle-ci esquissée, via la revue Fontaine ? Ne fait-il pas, au moment où partout s'éveillent les peuples colonisés, le tour de ce monde qui s'éveille pour nous en montrer, y compris par la photo, les beautés ? Ne se penche-t-il pas sur le berceau de la télévision naissante, l'ouvrant, aux côtés de Dumayet et Desgraupes, à la littérature auxquels il consacra sa vie ? Et ne choisit-il pas cette pierre précieuse qu'est Vézelay pour s'y installer, y écrire... et y être inhumé face à la vallée là même où Saint Bernard prêcha la deuxième croisade ?
Sur cette immense carte que compose une vie, ainsi sut-il toujours clairement se situer : du côté du beau, du juste, et si possible du vrai.
A cet égard, il fut un pédagogue, mission qui ne se conçoit pas sans passion. Il jeta des ponts entre les sujets, les disciplines, les publics et de ce point de vue servit notre cause commune : vivre, vivre ouvert sur les autres, vivre avec appétit, avec curiosité... Avec le recul, on s'étonne presque qu'une telle flamme puisse s'éteindre ! S'est-elle vraiment éteinte alors que vous êtes là nombreux à fêter le centenaire de sa naissance ?
En tout cas, je n'hésite pas à dire que nous aurions, que nous avons, plus que jamais besoin de lui ! Non pour combattre la misère intellectuelle, la platitude et la démagogie médiatiques, l'ignorance des êtres et des choses camouflée derrière le démon de la notoriété. Mais seulement pour ne plus y prêter attention, pour en être détournée par son enthousiasme ("créer, c'est résister!"), sa langue, sa foi en l'homme, si riche.
Formons le vœu que nous n'ayons pas demain à nous rappeler l'époque où il vécut avec nostalgie : que l'intelligence et l'humilité, l'élégance de pensée, le goût (et le respect) des idées retrouvent vite droit de cité ! Que depuis Vézelay, via Clamecy et ses amis qui y sont aujourd'hui réunis redescendent vers nous tous un esprit, presque un état d'esprit qui fasse de la vie non un but à atteindre mais une existence à remplir !
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