J'ai préféré laisser passer quelques jours pour réagir a l'élection de Barack Obama, pour prendre un peu de recul, laisser l'émotion retomber. Mais l'émotion est toujours là, aussi vive, aussi dense. La télévision y est naturellement pour beaucoup, qui nous fait revivre cet extraordinaire moment du discours de Chicago où, par sa maîtrise et son sang froid, Obama semblait dominer l'événement comme un pilote de F1 sûr de sa vitesse et de sa capacité à la contrôler!. Mais au-delà de l'effet médiatique, si l'émotion demeure, c'est naturellement en raison de l'exceptionnelle dimension historique, symbolique de ce qui s'est passé! Victoire posthume des héros de la lutte contre la ségrégation! Victoire posthume de toutes les victimes de l'esclavage, des violences raciales, des préjugés et des haines viscérales.
Tout cela certes n'a pas été effacé d'un coup mais l'histoire avait enfin livré son verdict et désigné les vainqueurs : les humiliés, les opprimés, les laissés pour compte... Quoi que l'on espérer de la politique a venir d'Obama le symbole de son élection gardera toujours pour des hommes et des femmes de gauche partout dans le monde le même impact, la même signification : l'échec du cynisme et du fatalisme, la récompense de l'idéal et de la générosité... Comme toujours, il aura fallu un peu des premiers pour permettre la victoire des seconds mais dans un dosage que le rêve américain seul pouvait permettre.
Ceci posé, et c'est le second sujet, la victoire d'Obama nous donne-t-elle des indications sur les politiques à mettre en oeuvre en France? Le parallèle n'a pas manqué de se faire . Et fleurissent depuis quelques jours les comparaisons (hâtives), les encouragement (vagues) à l'imiter, les initiatives aussi comme celles publiées ce dimanche dans le JDD. Mais c'est paradoxalement la grande faiblesse de l'appel à l'égalité réelle qui vient d'être lancé que de se référer aux États-Unis.
À titre personnel, j'approuve un appel qui stigmatise l'étanchéité des cercles de pouvoir, exige une politique ambitieuse pour briser les ghettos, prône la reconnaissance de la diversité et la prise en compte des causes ethniques ou raciales des discriminations sociales. Mais le défi auquel est confrontée la République n'a rien à voir avec la ségrégation raciale qui fut le stigmate de la société américaine ; les victimes de discrimination, et heureusement, ne voient pas celle-ci comme une composante de notre histoire. Il ne s'agit pas, pour nous, ici et maintenant, d'expier ni de corriger les fautes d'hier, pour sortir de l'exclusion une communauté entière, mais de régler avec les moyens d'aujourd'hui les problèmes d'aujourd'hui.
C'est pourquoi la référence si tentante à Obama me paraît cette fois déplacée et dangereuse. C'est dans nos principes même, nos valeurs politiques que nous devons chercher les réponses. Obama, pour l'Amérique, a-t il procédé autrement ? A lire et à relire son discours de Philadelphie on sait bien que non : il a exprimé un message universel en s'appuyant sur les valeurs particulières de l'histoire et de la démocratie américaine !
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