Proposition de loi visant à interdire le recours à des mesures de protcetions du CD et DVD ayant pour effet de priver les utilisateurs du droit à la copie privée
par MM. Didier MATHUS, Jean-Marc AYRAULT, Mme Patricia ADAM, M. Damien ALARY, Gaëtan GORCE, Mme Sylvie ANDRIEUX, MM. Jean-Marie AUBRON, Jean-Paul BACQUET, Claude BARTOLONE, Jacques BASCOU, Christian BATAILLE, Jean-Claude BATEUX, Jean-Claude BEAUCHAUD, Jean-Louis BIANCO, Jean-Pierre BLAZY, Serge BLISKO, Jean-Claude BOIS, Daniel BOISSERIE, Augustin BONREPAUX, Pierre BOURGUIGNON, Mme Danielle BOUSQUET, MM. François BROTTES, Thierry CARCENAC, Jean-Paul CHANTEGUET, Alain CLAEYS, Gilles COCQUEMPOT, Pierre COHEN, Mme Claude DARCIAUX, M. Michel DASSEUX, Mme Martine DAVID, MM. Marcel DEHOUX, Michel DELEBARRE
Mesdames, Messieurs, Désorientées par la dématérialisation des supports musicaux et campant sur leur position monopolistique, depuis plusieurs mois, certaines grandes maisons de disques mettent sur le marché des compact-discs illisibles sur un certain nombre d'appareils de lecture (autoradios, baladeurs, ordinateurs) pour en empêcher la duplication au mépris du droit reconnu à la copie privée par la loi de juillet 1985. Ces disques dotés d'un système dit « copy-control » empêchant toute reproduction même à usage familial sont une violation flagrante de la loi de 1985 organisant le droit à la copie privée. Ce dispositif n'est pas marginal puisque 30 à 40 % des cinquante compact-discs en tête des ventes sont non copiables. Les « majors » ont sciemment entretenu la confusion entre protection du droit d'auteur, piratage et copie privée. Or la copie privée n'est pas le piratage. Elle est reconnue par la loi de 1985. A ce titre, une taxe est perçue sur la vente des supports vierges permettant ainsi la rémunération des auteurs. Le droit à la copie privée est inscrit dans la loi au titre de l'article L. 122-5 du code de la propriété intellectuelle. Facilement contournables par les professionnels du piratage, ces systèmes de verrouillage portent donc directement et uniquement atteinte au droit des consommateurs à la copie familiale et privée sans but lucratif. Le consommateur est ainsi pris dans un piège singulier : il s'acquitte d'une taxe en achetant des supports vierges mais il ne peut copier les œuvres des auteurs qu'il a pourtant rémunéré pour cela ! La redevance pour copie privée n'est pas symbolique : en 2002, elle a généré quelques 131 millions d'euros au bénéfice des sociétés de répartition des droits. Il convient de refuser l'installation de verrous techniques qui est illégale, pénalise uniquement les consommateurs et n'est pas la solution adéquate au problème réel de la contrefaçon et du marché parallèle. Le piratage qui signifie la reproduction à échelle industrielle d'un disque ne sera pas empêché par ce système de blocage. Le phénomène de la copie privée a changé de nature avec le perfectionnement des moyens de reproduction et de copiage, notamment numériques et le développement d'internet. Or quelques majors veulent dicter leur loi au monde et s'arc-boutent sur le maintien de privilèges obsolètes mais rentables. En faisant pression sur les décideurs politiques et économiques pour légaliser ces systèmes de verrouillage, ces gros labels vont à l'encontre de la révolution technologique et de l'évolution naturelle des modes de consommation. Il est inacceptable que les majors aux capitaux américains utilisent leur toute puissance sur le marché du disque pour préserver leurs profits et le monopole dont elles jouissent. Il est d'ailleurs intéressant de noter que les majors n'ont pas osé mettre ce dispositif sur le marché américain. La perspective de la ratification de la directive (2001/29/CE du Parlement européen et du Conseil du 22 mai 2001) sur l'harmonisation de certains aspects du droit d'auteur et des droits voisins, taillée sur mesure pour l'industrie du disque est inquiétante pour le consommateur : le texte pourrait légitimer les dispositifs anti-copie et pénalise leur contournement. Ces mesures ne font pas la distinction entre le piratage et la copie privée et ne clarifient pas le droit d'usage de la copie privée, tout en laissant aux États le soin d'encadrer les dispositions dérogatoires. Pour préserver la copie privée légale, il convient de compléter l'article L. 122-5 du code de la propriété intellectuelle en interdisant la mise en place de verrous technologiques sur les CD. Telles sont les raisons pour lesquelles il vous est demandé, Mesdames, Messieurs, de bien vouloir adopter la présente proposition de loi dans ces termes. PROPOSITION DE LOI Article unique Après l'article L. 122-5 du code de la propriété intellectuelle, il est inséré un article L. 122-5-1 ainsi rédigé : « Art. L. 122-5-1. - Lorsque l'auteur d'une œuvre autre qu'un logiciel, l'artiste interprète ou le producteur de phonogrammes ou de vidéogrammes mettent en place des mesures techniques de protection des droits qui leur sont reconnus par les livres I et II, ces mesures ne peuvent avoir pour conséquence d'interdire les copies ou reproductions strictement réservées à l'usage du copiste visées au 2° de l'article L. 122-5. »