Le gouvernement est à ce point aux abois sur la question des retraites qu'il est prêt à brader le Fonds de Réserve des retraites pour couvrir l'actuel déficit de financement.
Le Fonds de Réserve des retraites, créé par Lionel Jospin et doté de 35 milliards d'euros constitue un capital dédié à tous les Français et destiné à garantir la couverture d'un partie de leurs retraites au moment où la situation démographique sera la plus tendue soit après 2020.
C'est ce potentiel qu'il conviendrait au contraire de renforcer que le Ministre du Travail s'apprête à piller sans scrupules.
Une telle attitude reviendrait à faire financer par des retraites à long terme des dépenses courantes. Elle ne peut donc être acceptée.
Le gouvernement Balladur avait d'ailleurs agi de la même façon lorsqu'il n'avait pas hésité à utiliser le produit des privatisations pour financer ses dépenses de fonctionnement.
Gaëtan Gorce
Notre Première secrétaire a décidé, voici moins d'un an, d'engager la rénovation du Parti socialiste et il faut l'en féliciter !
Mais l'organisation de primaires et la fin du cumul des mandats, s'ils constituent de véritables avancées, ne sont qu'une partie de l'effort à accomplir ! Mais l'une et l'autre ne seraient rien si elles ne s'accompagnaient d'une rénovation encore plus profonde, encore plus urgente, encore plus nécessaire : à savoir, la transformation de nos modes de fonctionnement, la modernisation et la démocratisation de l'appareil.
Pour qui a participé comme quelques uns ici à la réunion de la commission des résolutions jusqu'à plus de 3h du matin, comment ne pas avoir le sentiment d'un rituel absurde qui ne fait progresser ni la démocratie ni notre crédibilité ! Je sais qu'il existe des professionnels de l'exercice et assister à la disparition de leur savoir faire pourrait susciter, comme pour beaucoup de vieux métiers, une sorte de nostalgie.
Mais là encore puis-je suggérer qu'il serait utile de laisser sa place au progrès. Contributions, motions, courants sont à ranger d'urgence au musée aux cotés de la fameuse lampe à huile et de la non moins fameuse marine à voile ! Mais ce saut technologique, si j'ose dire, vers une démocratie moderne, sommes nous prêts à le faire ? La rénovation n'est pas un gadget : elle est la condition de la reconquête (et son absence, l'explication de nombre de nos échecs) : la confiscation du parti par des clans, la cooptation, l'instrumentalisation des débats, voilà l'ennemi ! Remettre les courants à leur place et rendre le pouvoir aux militants voilà l'enjeu : cela passe par la suppression de la proportionnelle, l'élection directe à toutes les fonctions, le choix de notre Premier secrétaire avant le congrès et le choix de notre projet via autant de votes thématiques. Disant cela, j'ai naturellement un peu l'impression de parler d'une corde dans la maison d'un pendu »!
Mais si vous avez trouvé l'énergie nécessaire à supprimer le cumul, peut être les militants trouveront-ils celle de supprimer les courants !
Le paradoxe de notre situation c'est que nous sommes victimes du conservatisme que produisent les rentes de situation. Pourquoi devons nous changer ? Non pour répondre à une mode ! Mais pour répondre à l'exigence nouvelle de transparence et de participation ressentie par nos militants et nos concitoyens !
Pourquoi devons nous changer ? Non pour complaire à je ne sais quel caprice ! Mais pour nous doter de l'outil adapté à nos ambitions ! Mais sommes nous capables d'admettre que nous sommes devenus, idéologiquement parlant, de plus en plus homogènes ? Et que les nouveaux clivages qui pourraient nous distinguer comme l'écologie ne passent malheureusement pas à l'intérieur du Parti socialiste mais sur ses marges.
Maintenir les courants n'aurait de sens que si nous avions choisi la voie des Assisses, pour rallier à nous de nouvelles sensibilités ou y accueillir de plus anciennes. Mais dès lors que nous avons fait le choix de rester entre nous, limitant l'ouverture aux primaires, ce découpage entre nous produit ce que produisent les artifices : de faux débats sur de fausses pistes.
L'enjeu est ici stratégique : un parti qui a choisi d'affirmer son identité plutôt que de s'ouvrir pour devenir un grand parti de gauche doit rassembler ses forces, se structurer en fonction de cette réalité et des combats qu'il a choisi de mener, à savoir la présidentielle ! Les courants sont aujourd'hui l'alibi d'une certaine démocratie mais aussi dans la pratique son principal obstacle. Alors voyons les raisons pour lesquelles nous faisons cette rénovation, qui lui donnent sa cohérence, et comprenons qu'elles nous entraînent nécessairement au-delà de ce qui est aujourd'hui proposé !
Marianne : Vous voyez dans le dispositif préconisé par Arnaud Montebourg pour désigner le Premier secrétaire du parti une « régression », un renforcement du « rôle pernicieux des courants » ?
Gaëtan Gorce : Le mal qui gangrène notre parti, ce sont les courants. Leur représentation à la proportionnelle garantit des « rentes de situation ». On l’a vu lorsqu’il a fallu attribuer des places sur les listes aux élections régionales et européennes… Ce qu’il faut, c’est que le Premier secrétaire soit dégagé totalement de l’influence néfaste des courants et qu'eux-même reviennent à leur rôle initial : des courants d’idées. Ce qu’il faut, c’est rendre le pouvoir aux militants. C’est d’ailleurs ce qu’avait permis Lionel Jospin en autorisant les militants à désigner directement leur Premier secrétaire et à n’importe lequel d’entre eux de se p! orter candidat. C’était une avancée.
Mais on ne peut pas dire que le dispositif actuel hérité de Lionel Jospin ait empêché les luttes entre courants ?
G.G. : Ce n’est pas un système idéal. Le Premier secrétaire est élu après le congrès. J’ai toujours considéré qu’il fallait qu’il le soit avant. Ça lui permettrait de bénéficier d’une certaine légitimité en arrivant au congrès qui ne doit en aucun cas servir à laver son linge sale en famille. Aujourd’hui, les congrès du PS sont devenus des procès d’intention à ciel ouvert. En faisant ça, nous fournissons des arguments à nos adversaires.
Malgré tout, ce que propose Arnaud Montebourg a le mérite de clarifier les choses, de les rendre plus cohérentes : il n’y aura plus déconnexion entre candidat et orientation.
G.G. : Contrairement à ce qu’on dit, le PS est de plus en plus homogène. Prétendre que les motions seront porteuses d’orientations différentes est faux. On est dans l’affichage et pas dans le débat de fond. Les différences existent surtout entre des personnalités. Le congrès de Reims l’a montré. Pour les questions de fond, on pourrait organiser des conventions thématiques comme nous le faisons actuellement.
Vous craignez également que les primaires n’aient pas lieu. Pourtant la décision de Ségolène Royal — dont vous êtes proche — de se rapprocher de Martine Aubry et de Dominique Strauss-Kahn pourrait conduire à ce genre de scénario. Du moins, les primaires pourraient-elles perdre de leur sens s’il n’y avait qu’un seul d’entre eux pour se présenter ?
G. G. : Je suis proche de Ségolène Royal, mais je suis quelqu’un de libre et autonome dans sa parole. Je pense qu’en faisant ça, elle a très bien agi. Elle met fin à la guerre des chefs. C’est une démarche intelligente, une démarche apaisante. Mais ça ne doit pas être un prétexte pour supprimer les primaires...
Par un double tour de passe-passe, la rénovation du PS, au moment même où l'on prétend la mettre en oeuvre est au contraire en train d'expirer. À suivre les débats de la commission qui en est chargée et à lire le document qui nous a été présenté hier en Bureau national, elle se résumerait en réalité à une seule innovation : les Primaires, dont on est pas même sûr, au regard des déclarations des une et des autres, qu'elles pourront se tenir !
Or, cette question a permis d'occulter toutes les autres et en particulier celles du fonctionnement de nos instances, du renforcement (oublié) du rôle des adhérents et plus largement de la limitation du rôle pernicieux des courants. Au contraire, ceux-ci, qui nous ont fait jusqu'ici tant de mal, voient leur influence confortée puisqu'il est proposé de supprimer de facto la seule disposition dont bénéficiaient les militants depuis Lionel Jospin : à savoir l'élection par les adhérents du Premier Secrétaire.
Désormais, celui-ci ne pourra être que le chef de file de la motion arrivée en tête. C'est une formidable régression que l'on réintroduit discrètement en détournant notre attention vers des sujets plus médiatiques (quoique utiles) comme le cumul des mandats. Ma conviction est faite depuis longtemps que rien ne sera possible tant que nous n'aurons pas rendu le pouvoir à nos adhérents en supprimant les courants ou en leur retirant toute influence sur le choix de nos candidats et de nos dirigeants.
L'enjeu est d'adapter notre parti aux exigences d'une démocratie moderne. Pas aux intérêts des mêmes groupes cooptés. C'est le sens du texte alternatif que j'ai décidé de présenter au vote des militants dans le cadre de la convention sur la « rénovation ». Pour ma part, en effet, je refuse de m'associer à une procédure qui ne nous garantit en rien contre le retour de nos vieux démons !