" C'est parce que j'aime profondément et
passionnément la France que je vous dis aujourd'hui qu'il n'y a pas d'autre
chemin que celui de l'effort."
Mes chers compatriotes,
La vérité aujourd'hui s'impose à nous !
Voici près d'un an, j'ai pris devant vous un
nombre raisonnable et déterminé d'engagements.
D'ores et déjà plusieurs ont été réalisés qui
ont contribué, en apportant plus de justice, à apaiser et à réunir une France
que j'ai trouvée à mon arrivée, divisée, souvent angoissée, parfois déchirée.
Comme je m'y étais engagé, l'âge de départ en
retraite a été ramené à 60 ans pour ceux qui ont commencé à travailler tôt et
dans des métiers éprouvants.
Comme je m'y étais engagé, les avantages
fiscaux indus accordés aux plus riches ont été supprimés. Des emplois nouveaux
ont été crées pour l'école, pendant que les moyens de la police et de la
justice étaient réévalués. L'allocation de rentrée scolaire a été augmentée.
Comme je m'y étais engagé, de nouveaux outils, emplois d'avenir et contrats de
génération, ont été mis en place pour endiguer le chômage des jeunes.
Le dialogue social a été relancé et la
compétitivité de nos entreprises dopée via un mécanisme innovant de crédit
d'impôt.
Enfin, comme je m'y étais engagé, des
réformes de société importantes ont été impulsées qui vont faire reculer les
discriminations tandis que le gouvernement était composé à l'image de la France
d'aujourd'hui, et d'abord en respectant pour la première fois une stricte et
désormais irréversible parité !
Tout cela, qui a été accompli au cours des
dix derniers mois, témoigne que le changement s'est mis en route !
Mais parmi les engagements que j'ai pris
devant vous, d'autres, c'est vrai, se heurtent, pour se concrétiser, à des
difficultés majeures.
Ces difficultés sont liées, vous le savez, à
la gravité de la crise que notre pays doit affronter, au même titre que
l'ensemble de nos voisins européens.
Je sais combien cette crise, qui dure
maintenant depuis plus de quatre ans, vous inquiète. Vous vous demandez s'il
s'agira seulement d'un mauvais moment à passer ou bien au contraire d'une
remise en question susceptible d'affecter en profondeur notre capacité à
conserver nos entreprises, nos emplois, nos industries, en un mot notre mode de
vie !
Au cours de l'année qui vient de s'écouler,
je me suis battu pour convaincre nos partenaires européens de redonner sa
chance à la croissance.
J'ai obtenu, en votre nom, une réforme du
système bancaire désormais mieux contrôlé à l'échelle de la zone euro tout
entière, un renforcement des mécanismes de solidarité pour empêcher la
résurgence d'une crise financière comme celle que nous avons connue, un
programme de soutien à l'investissement.
Mais, à l'évidence, et chacun de vous l'a
bien compris, cela ne peut suffire à inverser la tendance !
Eh bien, je ne suis pas d'un tempérament à me
résigner !
Pas plus que vous, je ne consentirai à voir
notre pays s'affaiblir et le découragement s'installer dans les cœurs comme
dans les esprits.
Mais la volonté, pour s'imposer, se doit
d'être lucide !
Autour de nous, de nouvelles puissances
couplées à de nouvelles ambitions émergent et s'affirment avec force. Des
pays-continents jouent de leur puissance et cherchent à imposer leur influence.
L'Asie tout entière s'est mise en mouvement. L'Afrique s'éveille à son tour.
L'ouverture au progrès de ces nouveaux horizons constitue une chance pour des
peuples restés si longtemps en marge de la paix et de la prospérité.
Mais aussi pour nous-mêmes si nous décidons
de relever le défi et de re-inventer notre avenir.
Un monde est en train de mourir et un autre
en train de naître. Mais parce qu'il n'y a aucune fatalité, ce monde sera ce
que nous en ferons ! Et la France (comme l'Europe) y occupera la place pour
laquelle elle aura choisi de se battre !
Notre pays n'a-t-il pas toujours su trouver,
en particulier pour traverser les moments les plus douloureux de son histoire,
l'énergie de se redresser ?
Que voulons-nous ? Une économie forte, des
emplois solides et sûrs, un modèle social juste et solidaire, une planète en
paix, un monde, enfin, concerné et actif face aux enjeux du réchauffement
climatique.
La paix, la justice, la prospérité, la
préservation de l'avenir, c'est le message que la France a toujours su et voulu
porter.
Cette grande et belle voix, la France ne
pourra de nouveau la faire pleinement entendre qu'une fois réglées les dettes
du passé.
Au cours de la dernière décennie, celles-ci
ont encore empiré. Les déficits comme l'endettement publics ont explosé,
entrainant notre pays dans la spirale de la stagnation et du chômage.
Au cours de la dernière décennie, nos emplois
comme la valeur créés par nos industries ont diminué de moitié. Quel pays au
monde, aussi riche et puissant soit-il pourrait supporter une telle dégradation
de son rang, une telle réduction de son potentiel de richesse, sans réagir ?
Aussi nous revient-il cette tâche,
douloureuse mais noble, de faire ce que ceux qui nous ont précédés n'ont pas eu
le courage d'entreprendre.
Mon devoir est de vous dire que nous ne
pouvons plus différer les mesures de redressement sans lesquelles c'est
l'avenir de nos entreprises, de nos emplois, de nos valeurs morales même, qui
serait obéré. Pas plus que vous, je ne peux accepter que notre jeunesse soit
privée d'espérance. Pas plus que vous, je ne veux accepter que celles et ceux
qui travaillent voient s'éloigner la juste récompense de leurs efforts et que
s'affaiblissent dans les esprits, les sentiments de justice et de solidarité.
Mais il n'est qu'un moyen pour redonner à notre pays un élan et une force,
c'est de regarder la vérité en face !
Et c'est parce que j'aime profondément et
passionnément la France que je vous dis aujourd'hui qu'il n'y a pas d'autre
chemin que celui de l'effort.
Et c'est parce que je connais l'étendue de
nos ressources et de nos savoirs-faire, parce que je crois dans votre talent,
votre énergie, votre patriotisme, que je vous dis que ce chemin sera vite
parcouru et qu'en quelques années nous aurons su recouvrer nos forces et ouvrir
au pays de nouvelles perspectives.
Quelle tâche nous attend ?
D'abord poursuivre le rétablissement de nos
comptes publics qui, hors les effets de la crise, se sont en dix ans, dégradés
de plus de 60 milliards d'euros. Les efforts consentis l'an passé, nous ont
déjà permis de réduire nos déficits de près d'un point de PIB. De nouveaux
sacrifices sont cependant nécessaires.
Ainsi allons-nous devoir engager une réforme des retraites trop souvent
annoncée par le passé mais jamais complètement réalisée au point qu'il manquera
à nos régimes plus de 20 mds € pour être entièrement financées. Parce que cette
reforme devra être marquée au sceau de la solidarité et de la justice, je veux qu'à son issue chaque € cotisé crée
exactement les mêmes droits à pension sous réserve naturellement des situations
créées par le chômage ou les aléas de la vie. Ainsi les avantages particuliers
accumulés par certaines professions à travers l'histoire de régimes segmentés
seront gelés ou supprimés. Non parce qu'ils
seraient devenus illégitimes mais pour cette simple raison que nous ne pouvons
plus, pour l'instant, nous les permettre.
De même, procéderons-nous à une révision en
profondeur de nos politiques de santé pour corriger cette situation qui fait
que nous dépensons plus pour notre santé que la plupart des pays comparables
sans obtenir de meilleurs résultats !
Dans le même esprit, je veux que les
allocations familiales soient désormais placées sous condition de ressources et
qu'une réforme fiscale soit préparée pour rétablir partout la progressivité de
l'impôt, dont nous nous sommes éloignés ces dernières années, et pour restituer
de cette manière du pouvoir d'achat à celles et ceux d'entre nous qui disposent
des revenus les moins élevés. Enfin, l'Etat continuera d'améliorer son
organisation et son efficacité et dégagera les économies exigées par la
situation.
Tout cela, nous l'accomplirons pour nous
ouvrir pour demain de nouvelles perspectives !
Préparer l'avenir en relançant
l'investissement productif constituera ainsi ma deuxième priorité. Ni l'Etat,
ni nos entreprises n'ont aujourd'hui les moyens de relancer l'activité en
donnant un coup de pouce à la consommation. Pourtant, nous ne pouvons laisser
stagner notre économie et vieillir nos équipements. C'est pourquoi je vous
demande de souscrire à un grand emprunt national qui devra nous permettre de recueillir et
d'orienter vers l'innovation, la recherche et la modernisation de nos
infrastructures l'équivalent des 20 milliards d'euros déjà consacrés à l'amélioration
de notre compétitivité via le crédit d'impôt . Plutôt que de recourir à des
impôts supplémentaires, je veux faire appel à l'Epargne, c'est à dire au
patriotisme de toutes celles et tous ceux qui veulent être utiles à leur pays !
Pour être pleinement efficace, cet emprunt,
dont les conditions seront précisées par le gouvernement, sera levé dès le
prochain trimestre et les premiers financements affectés avant la fin de cette
année. Je suis persuadé que toutes celles et tous ceux d'entre vous qui le
peuvent se feront un devoir d'apporter ainsi volontairement leur contribution
au relèvement du pays.
Mes chers compatriotes,
C'est parce que je refuse la résignation que
j'en appelle à la mobilisation de toutes et tous. L'effort, auquel je vous
invite, est certes d'autant plus douloureux qu'il vient s'ajouter aux délicats
problèmes auxquels vous avez à faire
face au quotidien et que je n'ignore pas .
Mais cet effort volontaire, solidaire, est le
moyen par lequel, parvenant à nous relever, nous retrouverons bientôt la pleine
maîtrise de notre avenir. C'est par cet effort aujourd'hui que nous rendrons
possible demain le changement sans lequel notre modèle de civilisation ne
survivra pas.
Plus forts et plus sûrs de nous-mêmes, nous
pourrons alors nous tourner vers l'Europe et la convaincre d'assumer sa place
dans le monde et une pleine solidarité sur notre vieux continent !
Plus pénétrés que jamais des vertus de notre
histoire, nous pourrons prendre le monde à témoin de l'absolue nécessité de
faire reculer la faim, la pauvreté et de mettre en œuvre les moyens de prévenir
la catastrophe écologique qui menace notre planète !
Plus convaincus encore de la pertinence de
nos valeurs, nous pourrons ouvrir le chemin aux changements majeurs qui nous
permettront, dans la justice d'assurer l'avenir et la durabilité de notre
système social !
L'ultra-libéralisme qui a servi de viatique à
tant de gouvernements en mal d'imagination, à tant de leaders en panne
d'inspiration nous a montré voici 4 ans ses limites. En nous précipitant dans
la plus grave crise qu'ait connu le monde depuis le seconde guerre mondiale, il
a ouvert la voie à une indispensable alternative. C'est cette alternative qu'il
appartient désormais à nos peuples de construire en nous appuyant sur les
acquis de notre expérience.
A la Libération, les hommes et les femmes qui
avaient combattu nous ont légués l'ambition d'une société fondée sur la
solidarité, la liberté et la justice. Ils ont su alors se doter des moyens de
faire de leur idéal une réalité pour tous. C'est ce même défi que notre
génération, en France et en Europe, doit aujourd'hui relever. En choisissant le
chemin du redressement, économique et moral, c'est ce que je vous vous invite à
entreprendre et à réussir.