"France, ma fille aînée...
Les jours mauvais tu n'en fais pas des mortes eaux toutes glaireuses…
Mais ces beaux ruisselets d'eau vive qui arrosent les plus beaux jardins qu'il n'y ait jamais eu au monde...
Qui arrosent les jardins de ma grâce
Les éternels jardins ".
Nous sommes tous Péguy.
Nous sommes tous Charlie.
De l'un à l'autre court le fil d'une même foi dans la liberté ...
Comment en effet ne pas commencer cette rencontre, qui devrait être un moment de convivialité et de fête sans évoquer les terribles événements qui ont secoué notre pays ces derniers jours ?
Comment ne pas avoir plus qu'une pensée pour ces hommes et ces femmes suppliciés au nom d'une idéologie absurde et abjecte ?
Et comment, pourtant, ne pas trouver paradoxalement dans ce qu'ont provoqué ces assassinats des motifs d'espérer ? Que pèsent ces trois meurtriers au regard des centaines de milliers et dimanche de ces millions d'entre nous qui se sont, dès mercredi soir, et qui vont demain se mobiliser ? Ils ne pèsent rien face à notre peuple attaché indéfectiblement depuis 226 ans à la liberté sous toutes ses formes, à la liberté, sortie parfois des barricades, comme l'a vue pour toujours Delacroix, haletante et fière, conduite justement par une femme, celle à laquelle ces esprits totalitaires ne veulent plus reconnaître aucun droit ! Liberté chérie et d'abord liberté de conscience, liberté d'expression, liberté de la presse !
N'est-ce pas une raison d'espérer que de voir ainsi rassemblés, réunis autour d'un principe, des Français que l'on disait amers, résignés, découragés..?Ce n'est pas un peuple abattu que nous voyons depuis mercredi mais une Nation certes recueillie, toute à son chagrin, mais aussi mobilisée par son amour de la liberté ! Notre vieille démocratie parfois un peu désabusée, harassée a encore de beaux jours devant elle !
Aussi n'est-ce pas notre civilisation qui est menacée par ces lâches attentats. Elle est plus forte que jamais ! Mais notre unité, notre capacité de vivre ensemble.
Nous ne sommes pas en guerre même si la bataille que nous avons à livrer sera impitoyable. Être en guerre cela voudrait dire que toutes les forces, toute l'énergie, toutes les ressources de la Nation devraient être mobilisés contre ce qui n'est qu'une poignée de fanatiques promis ici comme au Proche Orient à la défaite.
Ce que veulent ces criminels c'est que notre France, si diverse, se déchire alors que nous devons plus que jamais veiller à son unité, trouver les mots pour la rassembler, accomplir les actes pour la conforter. Ensemble, nous sommes une Nation quelque soit notre origine, nos opinions, notre religion.
C'est au contraire à préserver et à renforcer les conditions de cette unité, c'est à dire l'égalité et la laïcité, que nous devons consacrer tous nos moyens ! D'autant que d'autres facteurs que le terrorisme viennent perturber l'équilibre de notre société.
Mesdames et messieurs,
C'est vrai que notre cher et vieux Pays, comme le disait le Général de Gaulle, est aujourd'hui à la peine.
Qui peut se féliciter de l'état où il se trouve ? Qui peut dire qu'il va mieux aujourd'hui que voici quelques années ? Pourtant il a toutes les ressources pour s'en sortir à conditions de regarder les choses en face ! Trop de déficits, trop de dettes depuis trop longtemps ! Mais aussi trop de chômage, trop d'inégalités. Il faut s'attaquer à tous ces maux à la fois et mobiliser toutes les forces pour y parvenir. À défaut, c'est l'existence même de la France qui sera en jeu. Pas son existence physique, matérielle, juridique. Mais politique et morale. La France, c'est un projet que symbolise encore aujourd'hui l'esprit républicain : l'indépendance, certes, mais aussi le rayonnement et l'influence qui consiste à promouvoir un modèle particulier reposant sur la souveraineté populaire, la recherche constante de l'égalité et enfin la laïcité. Ce sont ces 3 principes qui nous appartiennent en propre. Sont-ils menacés ? Oui. Vont-ils disparaître ? Non ! Nous avons une bataille à mener pour y réussir.
Et j'allais presque dire que le drame de ces derniers jours nous donne de nouveaux arguments pour la livrer.
En réorientant l'Europe plutôt que d'y renoncer ! En modernisant l'Etat et notre système social plutôt que de l'affaiblir ! En nous tournant vers l'avenir plutôt que de le redouter !
Notre pays a plus que jamais besoin pour traiter ces maux de redonner du sens, du contenu aux principes qui le fondent. Ceux-ci sont restés trop longtemps en exergue sur les étagères. Ceux qui avaient la charge de les entretenir et qui y faisaient référence un peu mécaniquement n'ont pas vu qu'ils prenaient un peu la poussière et que la réalité s'éloignait d'eux insensiblement. Nous avons eu pourtant des rappels à l'ordre, de la crise des banlieues au référendum européen. Il est temps d'en tirer les leçons et de redonner un contenu concret aux valeurs qui nous remobilisent depuis 3 jours.
Mesdames et Messieurs,
Ce qui vaut pour la France vaut aussi pour la Nievre.
Certes les événements si douloureux changent un peu le climat de notre réunion. Mais pas la nature des propos que j'avais prévus de vous tenir.
Puisque c'est de rassemblement aussi que je souhaitais et que je souhaite plus encore maintenant vous parler !
Rassemblement au delà des clivages, des passions, des sujets de dispute et de division.
Et c'est pour pouvoir en parler librement et concrètement que j'avais choisi de le faire à Nevers.
Je n'ignore pas que la municipalité y a changé. Qu'elle n'est plus socialiste.
Et vous n'ignorez pas non plus que je suis et reste, malgré les difficultés des temps, un socialiste.
Mais c'est l'avenir qui m'importe, l'avenir de notre département et celui-ci ne peut se concevoir sans Nevers ni sans son agglomération.
Nous avons donc par dessus tout un devoir de solidarité et, j'y reviens, de rassemblement.
La période des élections n'est peut-être pas la meilleure pour y songer. Mais je souhaite alors prendre date et former le vœu, en ce début d'année, qu'une fois le scrutin passé nous nous mettions au travail ensemble pour relever les défis qui attendent la Nievre.
S'il y a une leçon que j'ai tirée du beau mandat de maire, que j'ai exercé presque jusqu'à épuisement, c'est qu'il n'est pas possible de faire avancer les choses tout seul. Ce département est trop petit pour qu'il continue à disperser ses forces !
Nous avons le devoir de bâtir un projet commun, non un inventaire, mais un ensemble limité mais ambitieux de quelques grandes priorités.
Cette ambition, Nevers peut et doit contribuer à la faire émerger. Vous avez même pour cela une position privilégiée ...à la condition que vous ne renonciez pas à ce qui a caractérisé votre démarche, à savoir une complète neutralité à l'égard des partis; que vous ne vous laissiez pas entraîner dans les batailles politiciennes, et vous obligiez ce faisant les partis locaux à se réformer et à travailler autrement.
La valeur ajoutée d'un élu dans la Nievre n'est pas proportionnelle à son sectarisme ou à son agressivité, ni à sa soif de mandat. Elle est et sera dans sa capacité à rassembler, à jeter des ponts.
Et s'il y un message politique à chercher dans ma présence ici, il est dans cet appel adressé à tous à inventer les voies et moyens d'un travail commun !
Comme je vous l'ai dit, je suis et je reste viscéralement un homme de gauche et je souhaite en mars la victoire de la gauche nivernaise
Mais je suis aussi un homme libre et je souhaite que cette victoire de la gauche soit celle d'une gauche ouverte, à l'écoute de tous et travaillant avec tous !
M le maire, il n'y a donc pas d'autre message dans ma présence auprès de vous, à Nevers où fut élu François Mitterrand, dont Daniel Benoist puis Pierre Bérégovoy furent les édiles, que la courtoisie due au maire de la ville chef-lieu et le souci d'exprimer cette volonté de rassemblement sans laquelle la Nièvre ne pourra s'en sortir ! Je forme le vœu d'ailleurs que les aigreurs bien naturelles nées des dernières municipales laissent place peu à peu à un esprit de coopération, de participation de l'ensemble du conseil municipal…
Je forme le vœu aussi pour concrétiser cette volonté à l'échelle du département que puissent se tenir, avant l'été, des "États généraux de la Nievre qui avance" dont le mouvement que j'ai lancé, La Nievre Autrement, pourrait être le fer de lance !
Il n'y a par conséquent aucune ambiguïté : il ne m'appartient pas de dire si ce que fait le maire de Nevers est bon ou mauvais pour Nevers. C'est le rôle des Neversois et je ne viens pas ici vous apporter un quelconque soutien politique. Je viens seulement dire qu'il est de l'intérêt de la Nievre que vous réussissiez et pas plus que je ne l'ai fait pour d'autre je ne vous demanderai pour qui vous votez avant de vous aider; c'est au vu de la qualité du projet que je le ferai !
Mesdames et Messieurs,
2015 ne fait que commencer. La tragédie qui vient de se produire ne doit pas nous condamner au pessimisme. C'est dans les épreuves qu'il faut chercher et trouver un regain d'énergie.
Il nous en faudra pour faire aboutir de nombreux dossiers. Celui de l'A 77 est désormais bien avancé.
La qualité et la densité de notre liaison ferroviaire devra nous mobiliser, de Nevers à Cosne, main dans la main. Comme sur le tracé médian de la LGV ou avec vous et le Président du Conseil général nous sommes tous retrouvés.
D'autres sujets nous attendent, du développement de Renault Trucks Défense à la réorganisation territoriale où là encore je plaide pour plus de solidarité en particulier tout le long de la Loire où faute de voir l'Agglo s'agrandir vers le Nord les deux Pays, Bourgogne Nivernaise et Sud Nivernais, seraient bien inspirés de n'en faire plus qu'un seul d'ici 2017.
La baisse des dotations de l'Etat, dont j'ai réussi à limiter un peu l'impact en obtenant une augmentation de plus de 20% de la Detr, nous oblige à coopérer ! À la condition ce soient les élus qui en décident et pas l'Etat.
Quant à la fusion des deux Régions, j'ai une proposition à vous faire : en se décalant vers l’Est, la nouvelle Région pourrait bien Nevers et la Nievre. Alors oui à la fusion mais à une condition : qu'elle se fasse sur un trépied d'est en ouest, de Besançon en passant par Dijon â Nevers. L'Etat comme les 2 régions, universités, consulaires vont devoir redéfinir la répartition de leurs services entre les 2 capitales. Et bien l'aménagement du Territoire exige que Nevers bénéficie d'une partie de la redistribution et accueille certaines des directions régionales de l'Etat comme des Régions, à rebours de ce qui s'est passé jusqu'à présent. Un courrier en ce sens au Préfet et aux 2 Présidents sera proposé la semaine prochaine à la signature des élus de ce Département ! C'est une proposition de LNA.
Il est temps de conclure.
Mon propos, je vous l'ai dit est celui d'un élu engagé mais aussi d'un homme libre. Dans cette période où les certitudes ont disparu ou les déceptions sont nombreuses, il est essentiel de garder sa liberté de jugement et de parole. C'est la seule façon de vous être fidèle et d'être fidèle à mes convictions.
Bonne année à toutes et tous !